Le rôle crucial de la société civile dans la riposte à la pandémie de coronavirus

L'Education à voix haute, le fonds du PME destiné à soutenir le plaidoyer de la société civile en faveur de l’éducation, vient de lancer un nouvel appel à propositions. Ces financements, qui interviennent à un moment critique de la crise mondiale de COVID-19, permettront à la société civile de continuer à jouer son rôle essentiel de responsabilisation des gouvernements et de donner une voix aux plus marginalisés.

22 avril 2020 par Sarah Beardmore, GPE Secretariat, et Michael Gibbons, American University
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Des participants à la Semaine nationale de l’éducation du Ghana à Accra travaillant en groupe. Août 2019.
Des participants à la Semaine nationale de l’éducation du Ghana à Accra travaillant en groupe. Août 2019.
Credit: PME/Philippe Menkoue

Le Partenariat mondial pour l'éducation considère qu'une éducation équitable et de qualité est essentielle aux progrès vers la réalisation de tous les objectifs de développement durable adoptés en 2015.

Alors que nous travaillons à faire face aux conséquences désastreuses du coronavirus du mieux possible, le PME redouble d'efforts pour aider les pays partenaires à protéger et à maintenir leurs systèmes éducatifs à flot, et à faire en sorte que les besoins des enfants les plus vulnérables soient prioritaires dans les efforts de réponse et de rétablissement. Notre fonds baptisé L’Éducation à voix haute peut ainsi jouer un rôle essentiel en soutenant les efforts vitaux de la société civile dans ce domaine.

L'aggravation des inégalités

La propagation et l'impact du COVID-19 sont sans précédent. Cette urgence de santé publique entraînera probablement une crise économique mondiale, qui touchera le plus durement les communautés les plus démunies et les plus marginalisées. Ces deux crises mettent en évidence les inégalités croissantes dans le monde et menacent d'exacerber le fossé entre les riches et les pauvres, et freiner nos progrès vers un monde plus égalitaire, en nous ramenant à des décennies en arrière.

À court terme, la fermeture généralisée des écoles - qui touche aujourd'hui 91 % de la population étudiante dans le monde - prive les enfants de services essentiels et de la protection qu'offrent les écoles. Les enfants les plus vulnérables issus des familles les plus pauvres seront les plus susceptibles de voir leur santé, leur nutrition et leur bien-être affectés, leur apprentissage interrompu et leur sécurité menacée parce que leur école a fermé.

Si l'école perd sa fonction sociale, les inégalités économiques, géographiques et sociales déjà frappantes risquent de fortement s'aggraver.

Pour beaucoup, en particulier les apprenants de la première génération, l'enseignement à domicile n'est peut-être pas une option. Pour eux, les filles en particulier, la fermeture des écoles signifie qu'ils ne pourront plus jamais remettre les pieds dans une salle de classe (les exposant ainsi à des risques accrus (en anglais) de violence domestique, d'abus sexuels, de mariage et de grossesse précoces.

Along terme, un demi-milliard de personnes supplémentaires pourraient sombrer dans la pauvreté, selon Oxfam (en anglais), à mesure que les économies perdent des emplois, que les petites entreprises ferment et que les filets de sécurité sont perdus à cause de cette pandémie. Le manque de nourriture, l'augmentation du nombre de sans-abri et l'insécurité accrue vont définitivement remettre en cause l'avenir autrefois radieux de millions d'enfants à travers le monde. Et le choc économique risque de réduire encore les dépenses en faveur de l’éducation, ce qui mettra les ménages sous pression pour combler les déficits de financement croissants. Comme pour aggraver ces difficultés, la peur croissante du public et la désinformation peuvent alimenter la discrimination, la stigmatisation et l'intolérance.

La société civile en péril

La capacité à atténuer ces impacts dépend fortement de la capacité de la société civile à maintenir son rôle et à donner la parole aux communautés les plus susceptibles d'être laissées pour compte dans la réponse publique aux situations d'urgence. Or, la crise va également entraver la capacité de la société civile à réagir. La fermeture des espaces d'expression civiques, les restrictions de mouvement et les politiques de plus en plus autoritaires dans de nombreux pays rendent extrêmement difficile le travail de sensibilisation et de responsabilisation.

La société civile sera également confrontée à une diminution des ressources, car les contributions qui lui permettent d'œuvrer au nom de l'intérêt général s’amenuisent en raison de la crise économique généralisée. La pandémie pourrait entraîner l'effondrement de la société civile dans de nombreux pays.

C'est pourquoi, aujourd'hui plus que jamais, il est essentiel de soutenir des réseaux civiques forts et actifs. L’Éducation à voix haute du PME peut jouer un rôle clé en cette période critique en élargissant la base de financement en faveur de l'action civique.

Le rôle de la société civile pendant et après la crise

Si le contexte actuel s’avère être l'un des plus difficiles pour la société civile, il s'agit également d'un moment critique où son travail est très important. La société civile a un rôle immédiat à jouer dans le suivi de l'impact de la fermeture des écoles sur les plus pauvres, en particulier les filles, et dans le plaidoyer en faveur de réponses efficaces face à la pandémie.

Les gouvernements qui s'efforcent de réagir et de se rétablir auront besoin de rétroactions continues, ouvertes et actives qui les aideront à comprendre en temps réel l'impact des décisions prises sur leurs citoyens. La société civile peut faciliter l'engagement auprès des communautés touchées, un élément essentiel pour garantir des réponses adaptées au contexte.

Par exemple, lors de l'épidémie d'Ebola en 2014, la coalition Éducation pour tous en Sierra Leone (en anglais) a joué un rôle primordial dans la conception d'un programme d'enseignement novateur à la télévision et à la radio pour atteindre les enfants à distance, et a contribué à renforcer l’impact de la campagne baptisée « C’est la rentrée » en utilisant des programmes radio et des réunions communautaires locales pour atteindre les citoyens.

Les mesures d'intervention d'urgence doivent être transparentes, car une action précipitée entraîne un risque de corruption, de mauvaise planification et de conséquences involontaires - provoquant une érosion de la confiance dans le gouvernement.

Les leçons tirées de l'épidémie de SRAS (en anglais) indiquent que l'un des facteurs les plus importants de l'efficacité de la réponse d'un gouvernement pour arrêter la propagation d’une maladie est le niveau de confiance de ses citoyens.

Comme le COVID 19 met encore plus de pression sur l'universalité et la qualité des systèmes d'éducation - et sur la capacité des gouvernements à suivre ces impacts et à y répondre - la société civile peut jouer un rôle majeur en veillant à ce que la réponse à la crise soit ciblée sur les plus vulnérables et soutenue pendant la phase de rétablissement.

Pour jouer ce rôle, il est toutefois essentiel que la société civile soit soutenue pour plaider en faveur de mesures visant à protéger les plus vulnérables et à leur donner la priorité - notamment en utilisant son influence pour informer les priorités des gouvernements dans les phases d'urgence et de rétablissement de la réponse à la pandémie. Le suivi budgétaire, la mobilisation sociale à la base et le suivi de la qualité et de la portée des prestations de services seront autant d'éléments importants de l'engagement civique pour reconstruire l'éducation pendant et après la crise.

Les organisations civiques doivent pouvoir se demander : comment les ressources publiques (dans le secteur de l'éducation notamment) sont-elles réaffectées et dépensées pour protéger les personnes les plus vulnérables dans nos sociétés ? Quelles sont les mesures qui permettent de soutenir l'apprentissage des plus démunis et comment pouvons-nous appliquer ces connaissances pour améliorer l'égalité en matière d'éducation après la crise ?

L'avenir de la reprise de l'éducation sera construit par ces réseaux civiques, travaillant activement avec les communautés pour aider à garantir que les systèmes éducatifs sont effectivement renforcés pour servir et inclure les plus marginalisés.

L'Éducation à voix haute, une bouée de sauvetage

Au milieu de cette crise, L’Éducation à voix haute apparait comme une bouée de sauvetage. Le fonds a lancé ses deux premiers appels à propositions l'année dernière, et les financements nouvellement approuvés peuvent être recalibrés pour inclure un soutien à la promotion et au suivi des ripostes liées au COVID-19.

Cette semaine, le PME lance son troisième appel à propositions, invitant les organisations nationales de la société civile à solliciter des ressources pour promouvoir la transparence et la responsabilité des politiques du secteur de l'éducation au niveau national, et de leur mise en œuvre. Avec des financements de 450 000 à 1,2 million de dollars US sur une période pouvant aller jusqu'à trois ans, ce soutien aidera les groupes de la société civile à :

  • Concevoir des stratégies relatives à la reddition des comptes adaptées aux questions cruciales dans un contexte politique en constante évolution
  • Améliorer la transparence, la participation et la responsabilité du dialogue politique dans le secteur de l'éducation
  • Accroître la disponibilité, les sources et la variété des informations pour formuler et mettre en œuvre des solutions politiques pertinentes
  • Mobiliser les citoyens en tant que garants du droit, afin qu'ils jouent un rôle actif dans le suivi de la mise en œuvre des politiques et des finances de l'éducation et qu’ils utilisent ces informations pour que les responsables rendent des comptes à tous les niveaux.

Ce travail créatif et réactif peut se concentrer sur un plaidoyer inclusif et un suivi transparent, afin de garantir l'équité pour les plus vulnérables dans la conception et l'exécution des réponses éducatives et du rétablissement face au COVID-19.

L'appel vient d'être lancé et sera ouvert jusqu'au 19 juin 2020. Pour en savoir plus et soumettre votre candidature, consultez le site www.educationoutloud.org (en anglais).

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Merci au PME pour cette opportunité. Le troisième appel à proposition de l'éducation à voix haute est un plus pour renforcer les organisations de la société civile dans son rôle de veille citoyen et de plaidoyer pour une éducation de qualité et inclusive. La COVID-19 étant une crise sanitaire qui affecte significativement l'éducation, notamment la fermeture des écoles; la réponse mérite d'être urgente. Les réponses jusqu'ici apportées dans les cadres des cours à distance (télévision et radio, en ligne) sont salutaires; mais restent très insatisfaisantes. Nous pensons aux localités les plus reculées de la ville dans les pays pauvres qui sont encore fortement enclavés (village, zone de forêt qui est le lieu d'habitation des minorités autochtones, sans oublier les personnes handicapées ), qui ne bénéficient pas encore de couverture électrique, du réseau internet, etc pour suivre les enseignements à distance ou en ligne. La société civile doit sans cesse porter la voix des ces personnes vulnérables auprès du gouvernement et autres partenaires de l'éducation; ceci suivant la cible 5 de l'ODD4 afin de ne laisser personne pour compte.
Cordialement. Olivier TANKEU, Chargé de Programme de la coalition camerounaise des organisations de la société civile de l'éducation (CEFAN).

le monde entier a payé un lourd tribu à cause de cette pandémie du covid 19 , qui a endeuillée plus d'une famille, mieux, plus d'un continent.. Et cette opportunité que vous offrez aux organisations nationales de la société civile, pour moi, est une main tendue de Dieu à tous ces pauvres qui voient leur vie se dégrader de jour en jour du fait de cette pandémie qui n'épargne personne. merci et que Dieu vous donne de travailler avec des organisations qui travaillent pour la dignité du genre humain, qui pourront donner le sourire à ces veuves qui jouent le role de père pour la scolarisation et l'éducation de leurs enfants, à tous ces parents qui ont perdus leur emploi et n'arrivent pas à joindre les duex afin d'offrir meme un repas à leur famille, aussi à tous ces élèves et étudiants qui ont perdus tout espoir du que les parents sont décédés ou ont perdus leur emploi. merci. Dieu nous garde.

Nous vous écrivons de la République démocratique du Congo ou nous sommes une organisation de la société civile congolaise base dans l'Est du pays. Nous sommes très intéressés par votre appel à proposition concernant l'éducation. Cependant , nous voudrions savoir si notre pays RDC figure sur la liste de vos partenaires d'Afrique, et peut aussi postuler à cet appel à subvention.
Nous vous remercions anticipativement pour votre réponse

En réponse à par IBUCWA LIPANDA…

Bien sûr  ! La République démocratique du Congo est l'un de nos pays partenaires.

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