Le Malawi est-il en bonne voie pour assurer un apprentissage fondamental de qualité pour tous ?

Le Malawi met en œuvre des programmes d’apprentissage fondamental à grande échelle et le soutien et la collaboration des partenaires peuvent contribuer à des améliorations significatives des résultats d’apprentissage au cours des prochaines années.

03 décembre 2024 par Alice Ching’oma, Foreign Commonwealth and Development Office
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Lecture : 4 minutes
Des élèves et leur enseignante en classe à l’école primaire de Yepa, située dans la zone de Dzenza, à Lilongwe, au Malawi. Crédit : Cambridge Education
Des élèves et leur enseignante en classe à l’école primaire de Yepa, située dans la zone de Dzenza, à Lilongwe, au Malawi.
Credit: Cambridge Education

Le mois d'octobre 2024 a marqué une étape importante dans l'enseignement et l'apprentissage fondamental des mathématiques au Malawi.

Avec le soutien du Foreign, Commonwealth and Development Office du Royaume-Uni, le ministère de l’Éducation a déployé un nouveau programme scolaire pour la 1ère et la 2è année de l’enseignement primaire. Cela signifie que tous les élèves de ces classes bénéficieront d'un programme de mathématiques actualisé et moderne, d'enseignants formés et de cahiers d'exercices de très bonne qualité.

Cet investissement vient compléter les initiatives du ministère de l’Éducation en matière de pédagogie structurée autour des compétences en lecture et en écriture soutenues par l’USAID, ciblant la 1ère et la 2è année de l’enseignement primaire. En effet, les conditions sont réunies pour améliorer les résultats d’apprentissage.

Ces investissements devraient modifier la trajectoire actuelle : au Malawi, parmi les enfants âgés de 7 à 14 ans, seuls 19 % acquièrent les compétences de base en lecture et en écriture et 13 % en mathématiques.

Ces investissements complètent-ils le puzzle de l’apprentissage fondamental ?

Une évaluation du programme pilote de mathématiques a montré que les enfants ont acquis l’équivalent d’une demi-année de scolarité supplémentaire. Des résultats similaires ont été observés à grande échelle.

Toutefois, l’évaluation a révélé un impact modéré chez les élèves les moins performants. L’absentéisme et le manque de soutien ciblé en raison de la taille des classes, ainsi que le besoin continu de formation et de tutorat pour les enseignants figurent parmi les principales causes.

Il manque encore quelques pièces pour compléter ce puzzle

Dans le cadre du récent programme du Partenariat mondial pour l’éducation (GPE), dont la Banque mondiale est l’agent partenaire, le Malawi a donné la priorité au rattrapage scolaire pour soutenir les élèves en difficulté.

À cette fin, le ministère de l’Éducation, avec le soutien du Foreign, Commonwealth and Development Office, pilote une approche de rattrapage intégré au programme scolaire qui a déjà fait ses preuves.

L’environnement d’apprentissage est également crucial. Le soutien du GPE et de la Banque mondiale pour la construction d’environ 10 900 salles de classe permettra de réduire les effectifs des classes.

Cependant, plus de 35 000 salles de classe supplémentaires sont nécessaires pour qu’il y ait au moins une salle de classe pour 90 élèves dans les niveaux inférieurs. Le recrutement d’enseignants auxiliaires permet également de réduire les ratios élèves-enseignant.

En outre, il est indispensable de renforcer la responsabilité et l’efficacité. Le projet de la Banque mondiale, « Governance to Enable Service Delivery » (la gouvernance pour faciliter la prestation de services), complète les interventions éducatives en incitant les collectivités locales à fournir des services éducatifs.

Il s’agit notamment de déployer des enseignants en fonction des besoins tout en garantissant leur présence telle que prévue, et de débourser en temps voulu les ressources financières nécessaires à l’achat des manuels pédagogiques et d’apprentissage.

Cet élément demande à être affiné pour optimiser son efficacité, notamment en renforçant la collaboration entre le ministère de l’Éducation et les autorités locales.

Des élèves et leur enseignante en classe à l’école primaire de Yepa, située dans la zone de Dzenza à Lilongwe, au Malawi. Crédit : Cambridge Education
Des élèves et leur enseignante en classe à l’école primaire de Yepa, située dans la zone de Dzenza à Lilongwe, au Malawi.
Credit:
Cambridge Education

Avec tous ces éléments, les pièces du puzzle sont-elles toutes réunies ?

Pas tout à fait. La motivation des enseignants reste un élément central du programme d’enseignement et d’apprentissage.

Les données montrent que la plupart des enseignants exercent dans les écoles urbaines ou péri-urbaines, laissant les écoles des régions isolées en sous-effectif. Cette situation est encore plus prononcée concernant les enseignantes, ce qui a un impact négatif sur les filles.

Les écoles situées dans les régions isolées sont confrontées à des problèmes bien particuliers, dont le manque de routes praticables, de réseaux électriques et de systèmes de santé fiables, ainsi que de logements adéquats.

Certaines collectivités locales répondent à ce défi en ciblant le recrutement d’enseignants pour des écoles spécifiques, permettant ainsi aux enseignants de savoir à l’avance où ils seront affectés.

Cependant, certains besoins fondamentaux sont universels et nécessitent une collaboration et des programmes intersectoriels.

Les investissements dans l’eau potable, l’électricité et les infrastructures routières au niveau des municipalités devraient s’appuyer sur une cartographie des services de base.

Les efforts récents du projet d'électrification financé par la Banque mondiale, ciblant les écoles et les centres de santé, sont louables.

Une autre pièce du puzzle est nécessaire

Un autre élément critique est l’impact de la faim liée aux effets du changement climatique. Lors de la saison maigre (entre deux récoltes), de nombreux élèves sont absents car les familles évaluent les coûts de l’éducation. Il est nécessaire que l’État mène un programme d’alimentation scolaire mais le défi réside dans celui de le pérenniser.

L’idée du ministère de mobiliser les communautés afin de faire des réserves de denrées alimentaires pour les élèves mérite d'être étudiée.

Le soutien du Programme alimentaire mondial (PAM) dans la modélisation de programmes d’alimentation scolaire contribuera à l’élaboration de pratiques durables.

Il est essentiel que les programmes intersectoriels pour la protection sociale continuent d’inciter les foyers à investir dans l’éducation de leurs enfants.

L’éducation et le changement climatique sont inextricablement liés ; les élèves peuvent être des agents de changement dans le cadre de l’atténuation des effets du changement climatique, et non de simples victimes.

Les plans nationaux du Malawi en matière de lutte contre le changement climatique visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à limiter le réchauffement de la planète ne définissent pas clairement la place de l’éducation.

L’Initiative du GPE pour des systèmes éducatifs intégrant le climat est l’occasion pour le secteur de l’éducation de définir les risques liés au changement climatique et d’identifier les interventions prioritaires.

Là encore, cela demande d’améliorer la collaboration intersectorielle.

Une vue d’ensemble

Cette discussion s’est concentrée sur l’enseignement primaire, mais il est important que les spécialistes du développement gardent un œil sur l’ensemble du secteur.

Au Malawi, le nombre d'élèves en termes de pourcentage du nombre total d’enfants en âge d’aller à l’école primaire, représente plus de 129 %.

Ce chiffre diminue considérablement aux niveaux post-primaires, atteignant 27 % pour le secondaire et 3 % pour l’enseignement supérieur ce qui indique des difficultés d'accès.

Tous les élèves devraient entrer en primaire prêts à apprendre après avoir bénéficié d’une éducation de la petite enfance de qualité. Ils devraient être motivés à terminer leur éducation primaire, sachant que des opportunités les attendent au niveau de l’enseignement secondaire.

Par la suite, des parcours professionnels potentiels devraient être établis par le biais du développement de compétences et de l’enseignement supérieur, en vue de meilleures perspectives économiques et sociales.

Le Malawi se trouve à un moment charnière

Le puzzle de l’éducation est fait de toutes ces composantes, et il est indispensable que le gouvernement et les spécialistes du développement se concentrent sur chaque niveau du secteur pour en garantir la complémentarité.

Le Malawi est un pays à surveiller car il possède des éléments essentiels à la mise en œuvre de l’apprentissage fondamental à grande échelle. Grâce à une collaboration et des synergies solides, ainsi qu’à une volonté d’apprendre, nous devrions constater des améliorations importantes des résultats d’apprentissage dans les années à venir.

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