De nouvelles données publiées aujourd’hui par l’Institut de la Statistique de l’UNESCO (ISU) montrent que 617 millions d’enfants et d’adolescents dans le monde n’atteignent pas les niveaux de compétence minimums en lecture et en mathématiques. Ces données signalent une crise de l'apprentissage qui pourrait menacer les progrès réalisés en vue des Objectifs de développement durable (ODD).
Les chiffres sont énormes : l’équivalent de trois fois la population du Brésil est incapable de maîtriser la lecture ou le calcul. Un tel gâchis de potentiel humain nous indique que la scolarisation des enfants n’est qu’une partie à moitié gagnée. Le défi est désormais de garantir que chaque enfant scolarisé apprend, au minimum, les compétences de base dont il aura besoin en lecture et mathématiques.
Six enfants et adolescents sur dix n’apprennent pas les compétences de base en lecture ou en mathématiques
Dans le monde, six enfants et adolescents sur dix n’apprennent pas les compétences de base en lecture ou en mathématiques, selon un nouveau document de l’ISU. Le total, 617 millions, comprend plus de 387 millions d’enfants en âge de fréquenter le cycle primaire et 230 millions adolescents en âge d’être scolarisés dans le premier cycle du secondaire.
Cela signifie que plus de la moitié, soit 56 %, de tous les enfants n’auront pas atteint le niveau de compétences minimums à la sortie du cycle primaire. La proportion est encore plus grande pour les adolescents, à 61 %.
Le plus grand nombre se situe en Afrique subsaharienne, avec 202 millions d’enfants et d’adolescents dont l'apprentissage est défaillant. Dans l’ensemble de la région, près de neuf enfants sur dix âgés de six à quatorze ans n'auront pas le niveau de compétences minimums en lecture et en mathématiques. L’Asie centrale et du Sud affiche le deuxième taux le plus élevé, avec 81 %, soit 241 millions d’enfants. Ces chiffres sont également élevés en Asie de l’Ouest et en Afrique du Nord (46 millions, soit 57 % des élèves) et en Asie de l’Est et du Sud-Est (78 millions, soit 31 %).
Ces données suggèrent que ces nouveaux chiffres résultent de trois problèmes courants. Premièrement, le manque d’accès, avec des enfants non scolarisés, qui ont peu de chance, voire aucune, d’atteindre un niveau de compétences minimums. Deuxièmement, l'incapacité à retenir chaque enfant à l'école et à le maintenir dans un parcours d'apprentissage adéquat. Et Troisièmement, le problème de la qualité de l’éducation et de ce qui se passe dans la classe.
La plupart des enfants qui n’apprennent pas sont scolarisés
Les nouvelles estimations de l’ISU sur l’apprentissage concernent aussi bien les enfants et les adolescents scolarisés que non scolarisés. Le plus surprenant, voire alarmant, est qu’en fait, les deux tiers des enfants qui n’apprennent pas sont scolarisés.
Sur les 387 millions d’enfants en âge de fréquenter le cycle primaire et incapables de maîtriser la lecture, 262 millions (soit 68 %) sont scolarisés. Il y'a environ 137 millions d’adolescents en âge de fréquenter le premier cycle du secondaire, qui sont incapables de maîtriser la lecture bien qu'ils soient scolarisés.
Ces chiffres, s’ils sont stupéfiants, nous indiquent le chemin à suivre. Nous savons que ces enfants existent et qu’ils vont à l’école. Ils ne sont ni cachés ni isolés des pouvoirs publics et de leur communauté : ils sont sur les bancs de l’école, munis de leurs propres aspirations et de leur potentiel. Nous pouvons atteindre ces enfants, mais pas dans l'unique espoir qu'ils poursuivent leurs études et acquièrent les bases. Nous devons comprendre leurs besoins et palier les manques constatés dans l'enseignement actuel.
Cela nécessite une volonté d’engagement et des ressources, mais également une nouvelle approche pour améliorer la qualité de l’éducation. Celle-ci ne peut se concevoir qu’avec les données, c’est pourquoi l'ISU collabore si étroitement avec les pays et partenaires tels que le Partenariat mondial pour l’éducation pour les aider à explorer différentes options et à progresser.
Les nouvelles données
Ces nouvelles données sont les toutes premières réunies portant sur les progrès dans la réalisation de la cible de l’ODD 4.1, qui exige de l’enseignement primaire et secondaire qu’il débouche sur « un apprentissage vraiment utile ».
Pour élaborer ces estimations, l’ISU a créé une nouvelle base de données sur les acquis scolaires, qui réunit les résultats d’évaluations dans plus de 160 pays / territoires entre 1995 et 2015. La base de données utilise deux bases de référence différentes pour refléter les contextes des pays dont les niveaux de revenu sont variables. Elle s’appuie sur la référence SACMEQ (niveau de compétence de base) pour la lecture et les mathématiques au niveau du cycle primaire.
Par ailleurs, elle intègre des résultats (présentés dans le document) qui s’appuient sur le niveau de compétences minimums défini par l’IEA pour les PIRLS et la TIMSS, évaluations internationales auxquelles participent les pays à revenu intermédiaire et élevé. Pour le cycle secondaire, c’est la référence utilisée par le PISA qui s’applique.
Un instantané de l’apprentissage dans le monde
Ces nouvelles estimations offrent un instantané de la situation mondiale en termes d’apprentissage et des crises qui s’annoncent dans différentes régions. Nous nous trouvons clairement au début d'un processus hautement technique et politique nécessaire pour définir des normes de référence et développer les outils requis pour le suivi et la réalisation de l'ODD 4. Ces questions sont abordées dans le document et seront plus largement étudiées dans de prochains blogs.
Toutefois, sans ces nouvelles estimations de l’ISU, nous ignorerions que tant de millions d’enfants n'apprennent pas les savoirs dont ils ont besoin, même ceux qui ont été scolarisés pendant des années. Il s’agit là, en essence, d’une prise de conscience pour un investissement bien plus conséquent – et urgent – dans la qualité de l’éducation.
Ce blog a été précédemment publié (en anglais uniquement) par l'ISU