Changer les mentalités sur l'éducation des filles rohingyas au Bangladesh

<p>Le GPE soutient le Bangladesh à travers un financement accéléré pour garantir que les filles disposent d'espaces d'apprentissage sûrs et favorables, que les enseignants soient correctement formés et que la communauté Rohingya reconnaisse l'importance de l'éducation des filles au-delà du niveau du primaire.</p>

Changer les mentalités sur l'éducation des filles rohingyas au Bangladesh

Ismat Khatun is 12 years old and attends grade 6 in an all-girls class at the Chayabithi Learning Center in the Rohingya camp in Cox’s Bazar. Credit: GPE/Salman Saeed
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Points clés

  • L'accès à l'éducation des adolescentes du camp de réfugiés rohingya de Cox's Bazar se heurte à d'importants obstacles, notamment les croyances et pratiques culturelles, l'absence d'espaces d'apprentissage et les problèmes de sécurité.
  • Le Partenariat mondial pour l'éducation (GPE) soutient le Bangladesh à travers un financement accéléré, dont l'UNICEF est agent partenaire, pour que les filles bénéficient d'espaces d'apprentissage sûrs et accueillants, que les enseignants soient bien formés et que la communauté rohingya reconnaisse l'importance de l'éducation des filles au-delà de l'enseignement primaire.
  • Grâce au travail des femmes bénévoles de la communauté et à l'organisation de cours réservés aux filles dans certains des 600 centres d'apprentissage soutenus par le GPE dans le camp, plus de jeunes filles peuvent continuer à étudier.
Carte du Bangladesh

Cet article a été rédigé en collaboration avec UNICEF Bangladesh.

Chaque jour d'école, Rubaida accompagne Ismat, 12 ans, au centre d'apprentissage de Chayabithi, dans le camp de réfugiés rohingya de Cox's Bazar. C'est grâce à des femmes comme elle qu'Ismat peut continuer à fréquenter le centre d'apprentissage et suivre des cours de sciences, de langue birmane, d'histoire et de mathématiques.

Rubaida est l'une des 100 bénévoles de la communauté rohingya dans le camp qui s'assurent que les filles rohingya peuvent apprendre, en particulier lorsqu'elles grandissent. « Lorsqu’elles deviennent adolescentes, elles cessent souvent de venir à l'école », explique-t-elle. « Et celles qui viennent à l'école n'ont pas le droit d'y aller seules. C'est pour cette raison que je les aide. »

Ismat Khatun a 12 ans et est en sixième année dans une classe réservée aux filles au centre d'apprentissage de Chayabithi, dans le camp de réfugiés rohingya de Cox's Bazar. Crédit : GPE/Salman Saeed

Ismat Khatun a 12 ans et est en sixième année dans une classe réservée aux filles au centre d'apprentissage de Chayabithi, dans le camp de réfugiés rohingya de Cox's Bazar.
Crédit : GPE/Salman Saeed

Rubaida est une bénévole qui aide les adolescentes à se rendre dans les centres d'apprentissage dans le camp de réfugiés rohingya de Cox's Bazar. Crédit : GPE/Salman Saeed

Rubaida est une bénévole qui aide les adolescentes à se rendre dans les centres d'apprentissage dans le camp de réfugiés rohingya de Cox's Bazar.
Crédit : GPE/Salman Saeed 

Rubaida parcours le camp de réfugiés rohingya pour parler aux parents et aux responsables d’enfants de l'importance de l'éducation des filles. Crédit : GPE/Timo Diers

Rubaida parcours le camp de réfugiés rohingya pour parler aux parents et aux responsables d’enfants de l'importance de l'éducation des filles.
Crédit : GPE/Timo Diers

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À partir de leur 12 ans, les filles rohingyas sont soumises à des restrictions de mouvement et d'engagement social en public, ce qui constitue l'un des principaux obstacles à l'éducation. Cela fait partie de la pratique du « purdah ». Selon les normes culturelles et les croyances religieuses, lorsqu'une fille atteint l'adolescence, elle doit assumer le rôle d'aidante et rester à la maison jusqu'à ce qu'elle se marie.

Le camp de réfugiés est situé à la périphérie de Cox's Bazar, une ville côtière du sud-est du Bangladesh, à quelques kilomètres seulement de la frontière avec le Myanmar. Actuellement, environ un million de Rohingyas y ont trouvé refuge, dont plus de la moitié sont des enfants. Il s'agit du plus grand camp de personnes déplacées de force au monde.

Sur les 340 629 enfants et jeunes actuellement scolarisés dans les différents établissements d'enseignement du camp et dans les écoles des communautés d'accueil, 49 % sont des filles.

Cependant, le taux de scolarisation des filles âgées de 11 à 18 ans est faible. En effet, le taux d'abandon scolaire des filles augmente fortement et les disparités entre les genres se creusent. Au niveau du secondaire, seuls 24 % des élèves sont des filles.

À l'intérieur du centre d'apprentissage de Chayabithi situé dans le camp, lors d'un cours réservé aux filles. Crédit : GPE/Salman Saeed
À l'intérieur du centre d'apprentissage de Chayabithi situé dans le camp, lors d'un cours réservé aux filles.
Credit:
GPE/Salman Saeed
Ismat et ses camarades de classe se lavent les mains devant le centre d'apprentissage de Chayabithi à Cox's Bazar. Crédit : GPE/Salman Saeed
Ismat et ses camarades de classe se lavent les mains devant le centre d'apprentissage de Chayabithi à Cox's Bazar.
Credit:
GPE/Salman Saeed

Changer les mentalités en faveur de l'éducation des filles rohingyas

Depuis 2018, le GPE soutient les efforts du Bangladesh pour offrir un apprentissage équitable et de qualité tant dans le camp de réfugiés rohingya que dans les communautés d'accueil aux alentours de Cox's Bazar. UNICEF Bangladesh est l’agent partenaire de ce programme.

Un premier financement du GPE de 8,3 millions de dollars, alloué à partir d'un financement pour la mise en œuvre du programme sectoriel de l’éducation, a permis à 76 000 enfants d'avoir accès à l'éducation entre 2018 et 2022.

Début 2023, le Bangladesh a commencé à mettre en œuvre un autre financement du GPE de près de 11 millions de dollars pour continuer à améliorer l'éducation à Cox's Bazar. Il cible 56 000 enfants du camp de réfugiés rohingya et plus de 6825 adolescents non scolarisés (50 % de filles), dans des centres d'apprentissage de compétences/entreprises locales.

Le programme soutient également la formation de 136 formateurs et instructeurs en artisanat et 1024 maîtres-artisans dans la communauté d'accueil.

L'une des principales préoccupations est de veiller à ce que les adolescentes de la communauté rohingya puissent terminer l'enseignement primaire et accéder à l'enseignement secondaire.

Pour assurer un meilleur avenir à la communauté rohingya, il est essentiel de changer les comportements et les mentalités des parents et des responsables d’enfants, afin de favoriser l'éducation des filles.

Ezatullah Majeed
« Il n'est pas facile de changer le comportement et l'état d'esprit des familles pour qu'elles autorisent les jeunes filles à se rendre dans les centres d'apprentissage. Nous devons les approcher par l'intermédiaire de différentes personnes influentes au sein de la communauté. »
Ezatullah Majeed
Chef du bureau local de l'UNICEF à Cox's Bazar

Les membres de la communauté comme Rubaida, qui sont sélectionnés par les parents, les responsables d'enfants, les aînés et les enseignants, jouent un rôle clé dans cette approche.

Ces bénévoles, généralement des femmes plus âgées qui ont la confiance de leur communauté et jouissent d'un statut social élevé parmi leurs pairs, jouent le rôle de mentors pour les adolescentes et les accompagnent tout au long de la journée d'apprentissage.

Les volontaires veillent également à ce que les filles n'abandonnent pas leurs études. « J'essaie d'expliquer aux familles que lorsque les filles étudient, elles acquièrent de l'expérience et peuvent poursuivre des études supérieures », explique Rubaida. « Je leur demande également s'ils ont des difficultés à envoyer leurs filles au centre d'apprentissage. »

L'implication de volontaires de la communauté comme Rubaida a renforcé la confiance des familles rohingyas dans l'éducation des filles et beaucoup se sentent plus rassurées lorsque leurs filles se rendent dans les centres d'apprentissage. « Si elles n'étudient pas, elles ne peuvent rien faire, où que ce soit. Elles ne pourront travailler nulle part », déclare Zafar Alam, le père d'Ismat.

 Zafar Alam
« Nous voulons qu'elle apprenne l'anglais pour qu'elle puisse se débrouiller partout où elle ira. C'est ce que nous espérons pour elle. »
Zafar Alam
Père d'Ismat

Actuellement, plus de 4000 adolescentes suivent 150 cours réservés aux filles au niveau secondaire. Environ 83 % d'entre elles fréquentent régulièrement les centres d'apprentissage, c'est-à-dire plus de quatre jours par semaine.

Sans les bénévoles, ces jeunes filles ne pourraient pas poursuivre leurs études secondaires dans les centres d'apprentissage.

Ismat profite des cours au centre d'apprentissage de Chayabithi. Plus tard, elle veut être médecin pour aider à soigner les gens de sa communauté. Crédit : GPE/Salman Saeed
Ismat profite des cours au centre d'apprentissage de Chayabithi. Plus tard, elle veut être médecin pour aider à soigner les gens de sa communauté.
Credit:
GPE/Salman Saeed

Construire les bases de l'apprentissage

Le déploiement du programme scolaire du Myanmar dans le camp de réfugiés rohingya est une étape importante pour l'éducation de tous les enfants du camp, y compris ceux qui ne bénéficient pas du programme financé par le GPE. Auparavant, le programme scolaire du camp était un programme informel basé sur les compétences et développé par le secteur.

En décembre 2021, avec l'autorisation du gouvernement du Bangladesh, le programme d'études du Myanmar a été testé auprès de 10 000 élèves de la 6e à la 9e année. Cette mise en œuvre du programme scolaire a depuis été étendue aux classes de la maternelle à la 10e année.

En août 2023, le programme scolaire du Myanmar avait été suivi par environ 262 493 enfants dans les camps de réfugiés rohingyas.

Le programme d'études permet aux enfants de s'appuyer sur les connaissances qu'ils ont déjà acquises. De plus, il est conçu dans l'optique d'une reconnaissance formelle de leur éducation.

L'adoption du programme officiel du Myanmar a également entraîné un changement dans l'organisation de l'enseignement dans les camps et a nécessité davantage d'espaces d'apprentissage. Fournir suffisamment d'espace pour que les enfants du camp puissent apprendre est une priorité pour l'UNICEF.

Actuellement, il existe environ 3528 centres d'apprentissage dans le camp, dont 600 fonctionnant grâce au financement du GPE, permettant que les enfants puissent apprendre dans des environnements sûrs et accueillants, y compris des installations sanitaires séparées pour les filles et les garçons.

Recruter et former des enseignants pour un enseigment de qualité

Le succès du déploiement du programme dépend de la disponibilité d'enseignants bien formés et soutenus. Toutefois, le recrutement d'enseignants pour la mise en œuvre du programme d'études du Myanmar reste difficile, en particulier à partir de la sixième année, car la communauté Rohingya manque cruellement de personnes ayant des connaissances en mathématiques et en sciences du niveau du secondaire.

Pour aider à couvrir les besoins de la mise en œuvre du programme scolaire du Myanmar, le programme financé par le GPE devrait recruter, former et soutenir en permanence 1200 enseignants. La priorité sera donnée aux enseignantes, afin d'encourager davantage de familles à envoyer leurs filles adolescentes dans les centres d'apprentissage.

Mohammad Yunus est issu de la communauté rohingya et enseigne le birman et les sciences sociales. Crédit : GPE/Salman Saeed
Mohammad Yunus est issu de la communauté rohingya et enseigne le birman et les sciences sociales.
Credit:
GPE/Salman Saeed
Mohammad Yunus, enseignant, aide l'un de ses élèves à faire un devoir en birman. Crédit : GPE/Salman Saeed
Mohammad Yunus, enseignant, aide l'un de ses élèves à faire un devoir en birman.
Credit:
GPE/Salman Saeed

Le perfectionnement professionnel des enseignants au niveau du primaire comprend l'apprentissage par les pairs dans les cercles d'apprentissage des enseignants et inclut la formation aux compétences pédagogiques, la prévention de l'exploitation et des abus sexuels, et la préparation aux situations d'urgence pour une réponse efficace afin d'assurer la continuité de l'apprentissage.

Au niveau du secondaire, les enseignants reçoivent une formation à la pédagogie par matière et à l'évaluation des acquis scolaires, ainsi que des cours visant à améliorer les compétences linguistiques en birman et en anglais.

Mohammad Yunus, professeur de birman et d'études sociales en 6e année, issu de la communauté rohingya et travaillant au centre d'apprentissage de Chayabithi, a bénéficié de la formation des enseignants : « Après avoir rejoint l'école en tant qu'enseignant pilote du programme scolaire du Myanmar, nous avons reçu différents types de perfectionnement professionnel pour les enseignants, y compris des formations en birman et en anglais. Nous avons beaucoup appris. Ces formations nous sont très utiles pour enseigner aux enfants de manière plus efficace. »

Alors que l'avenir de la communauté rohingya au Bangladesh est incertain, l'éducation jouera un rôle clé dans le développement des compétences dont des milliers d'enfants et d'adolescents rohingyas ont besoin pour saisir leurs chances futures, bénéficier d'un meilleur niveau de vie et contribuer à la société.

Pour les filles comme Ismat, pouvoir fréquenter un centre d'apprentissage garantit son droit à l'éducation, lui apporte stabilité et espoir, et contribue à la protéger du travail et du mariage des enfants.

Le GPE, l'UNICEF et leurs partenaires restent déterminés à prendre des mesures audacieuses pour offrir aux enfants et aux adolescents, en particulier aux filles du camp et de la communauté d'accueil de Cox's Bazar, des espaces d'apprentissage sûrs et accueillants ainsi que des enseignants qualifiés.

Décembre 2023