Yémen : l’éducation dans un contexte marqué par dix ans de conflit

<p>Découvrez comment le Yémen, avec le soutien du GPE et d’autres partenaires, a pu assurer l’éducation des enfants tout au long de l’une des plus grandes crises humanitaires au monde.</p>

Yémen : l’éducation dans un contexte marqué par dix ans de conflit

Yemen's education journey amid a decade of conflict
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Points clés

  • Le conflit qui sévit au Yémen depuis une décennie pèse lourdement sur les enfants et leur éducation.
  • Le GPE a étroitement collaboré avec le gouvernement, les organisations de la société civile et les partenaires internationaux afin de mobiliser des ressources pour éviter l’effondrement du système éducatif.
  • Investir dans l’éducation est essentiel au rétablissement du Yémen, ainsi qu’à son développement économique et la consolidation de la paix.
Carte du Yémen

Ce récit a été écrit en collaboration avec le ministère de l’Éducation du Yémen, l’UNICEF, Save the Children et le Programme alimentaire mondial.

Ragda

« Un jour, il y a eu des bombardements et ma maman a eu peur et m’a dit de ne pas aller à l’école. Nous ne nous sentions pas en sécurité alors nous avons déménagé ici où nous nous sentons en sécurité. »

Ragda
Élève de 17 ans, école Saeed Hassan Fare’a, gouvernorat de Ta’izz

Le conflit au Yémen a privé d’école plus de 4,5 millions d’enfants et perturbé l’éducation de beaucoup d’autres, y compris celle de Ragda qui a été interrompue pendant six mois.

Heureusement, Ragda a pu poursuivre sa scolarité tout au long du secondaire, mais sa famille, comme tant d’autres, a dû fuir le conflit pour s’installer dans une partie plus stable du pays.

Elle vit avec sa mère, sa sœur et son frère, dans un appartement d’une pièce situé dans un village du district de Ash Shamayatayn ; son père est décédé avant le début du conflit.

La mère de Ragda, qui n’a jamais appris à lire, gagne sa vie en fabricant du henné et croit fermement en l’importance de l’éducation.

Ragda’s mother

« Je rêve que mes enfants étudient, trouvent du travail et qu’ils aient un avenir brillant. »

Mère de Ragda
  • Ragda et sa mère à leur domicile dans le district de Ash Shamayatayn, Yémen.
    Crédit : Anas Hassan Ahmed Ahmed Al Haj/AP Images pour le GPE

  • Ragda et son frère Amer vont chercher de l’eau après l’école.
    Crédit : Anas Hassan Ahmed Ahmed Al Haj/AP Images pour le GPE

Ragda étudie à l’école Saeed Hassan Fare’a depuis la première année du secondaire et elle s’y plaît beaucoup.

L’école est située à 30 minutes de son domicile mais elle n’a pas les moyens de prendre le bus pour aller et revenir de l’école, alors elle y va à pied avec un groupe de camarades de classe.

Malgré son déplacement et les difficultés financières, Ragda est déterminée à poursuivre ses études.

Despite displacement and financial hardship, Ragda is determined to continue her education.

  • Des élèves se rendent à l’école à pied, district de Ash Shamayatayn, Yémen.
    Crédit : Anas Hassan Ahmed Ahmed Al Haj/AP Images pour le GPE

  • Des élèves se mettent en rang avant le début des cours à l’école Saeed Hassan Fare’a, gouvernorat de Ta’izz.
    Crédit : Anas Hassan Ahmed Ahmed Al Haj/AP Images pour le GPE

L’école Saeed Hassan Fare’a a accueilli un afflux d'élèves déplacés au cours des dernières dix années, mais elle peine à les prendre en charge.

Face au grand nombre d’enfants fuyant les conflits, les écoles situées dans les zones plus stables sont mises à rude épreuve par des classes surchargées et des ressources insuffisantes.

Taha Noman Abdullah Al-Ghaili

« Les écoles situées dans le sud du pays ont dû absorber une grande partie des déplacements de personnes venues des régions du nord où sévit la guerre. Ces écoles ont eu du mal à accueillir tous les élèves. Néanmoins, nous avons maintenu le processus éducatif autant que possible avec les ressources dont nous disposons. »

Taha Noman Abdullah Al-Ghaili
Directeur de l’éducation, district de Ash Shamayatayn, gouvernorat de Ta’izz

L’impact de la guerre sur l’économie du pays a dissuadé certains parents d’envoyer leurs enfants à l’école. Beaucoup d'élèves ont abandonné l’école pour travailler et aider leur famille à subvenir à leurs besoins.

Malgré les difficultés liées à un taux d’inscription élevé, les écoles du district de Taha se sont associées à leurs communautés, y compris les camps de déplacés, afin de réintégrer plus de 100 élèves qui avaient abandonné l’école. Ces élèves n’étaient plus scolarisés depuis trois à cinq ans en moyenne.

Mohammed Abdulrahman Al-Massni

« Nous invitons tous les élèves qui abandonnent l’école, particulièrement les enfants déplacés, à y retourner. Nous les soutenons, conjointement avec les organisations, la communauté et les personnes du monde des affaires. Nous accompagnons toute personne qui souhaite recevoir une éducation. »

Mohammed Abdulrahman Al-Massni
Responsable du Conseil des parents, école Saeed Hassan Fare’a

Mohammed a quatre enfants et dirige le Conseil des parents de l’école Saeed Hassan Fare’a.

En plus d’aider les enfants à retourner à l’école, le Conseil des parents travaille avec les directeurs d’établissements scolaires afin d’analyser les besoins de l’école, d’élaborer des plans pour répondre à ces besoins et de garantir une utilisation efficace des ressources.

  • Des élèves de secondaire pendant un cours à l’école Saeed Hassan Fare’a, gouvernorat de Ta’izz.
    Crédit : Anas Hassan Ahmed Ahmed Al Haj/AP Images pour le GPE

L’éducation, un lien vital

La scolarité de Ragda et de ses camarades est semée d’obstacles et les enseignants du Yémen jouent un rôle héroïque dans ce combat pour l’éducation.

Malgré les classes surchargées, le matériel pédagogique inadéquat, les salaires irréguliers et les problèmes de sécurité, les enseignants, comme Arwa Hael, refusent de baisser les bras.

Arwa Hael

« J’ai étudié dans cette école et j’y ai de bons souvenirs d’enfance. Lorsque j’ai terminé mes études universitaires, je suis revenue pour aider l’endroit où j’étais allée à l’école. La situation s’est dégradée et mon salaire n’est pas suffisant, mais je n'arrêterai pas d’enseigner. C’est mon devoir de persévérer pour que l’éducation ne se détériore pas davantage. Je veux que les enfants acquièrent des connaissances afin qu’ils puissent avoir de meilleures opportunités pour leur avenir. »

Arwa Hael
Enseignante à l’école Saeed Hassa Fare’a

L’éducation dans un contexte fragile

L’éducation dans un contexte fragile

Après dix ans de conflit, le Yémen est maintenant confronté à l'une des plus graves crises humanitaires au monde et son système éducatif est au bord de l’effondrement. Certains enfants yéménites n’ont jamais connu la paix ni été à l’école.

Une école sur quatre au Yémen est inutilisable parce qu’elle a été endommagée ou détruite, transformée en abri pour les personnes déplacées ou utilisée à des fins militaires.

Les enfants non scolarisés sont davantage exposés à l’exploitation, aux violences, au travail des enfants, au recrutement militaire, aux mariages précoces et à la détresse psychosociale.

Malgré ces difficultés, le Yémen a œuvré pour maintenir les écoles ouvertes, offrant aux enfants une stabilité, la possibilité d’apprendre et un lien avec leurs communautés.

Assurer la continuité de l’éducation

Afin d’éviter l’effondrement du système éducatif, le gouvernement a travaillé avec les partenaires de développement de l’éducation ainsi que les organisations de la société civile au sein et en dehors du Yémen. Ce partenariat a été déterminant pour le maintien de l’éducation.

Le financement du GPE et de l’Association internationale de développement, ainsi que le soutien coordonné avec des partenaires tels que Save the Children, l’UNICEF, l’UNESCO, la Banque mondiale et le Programme alimentaire mondial parmi d’autres, a permis aux gouvernorats les plus touchés du Yémen de :

  • Remettre en état les écoles endommagées et accorder des subventions aux écoles pour l’entretien, les fournitures scolaires et de loisirs ainsi que le matériel d’enseignement et d’apprentissage.
  • Distribuer des fournitures scolaires, des repas sains et un soutien psychosocial aux élèves afin qu’ils puissent surmonter les traumatismes liés à la guerre, tels que le déplacement, la violence et le recrutement militaire.
  • Former des enseignants, payer les salaires et embaucher davantage d’enseignantes dans les zones rurales où les filles sont plus susceptibles que les garçons de ne pas être scolarisées.
  • Impliquer les parents et les communautés dans la gestion des écoles afin de favoriser la responsabilité collective et la redevabilité.
  • Soutenir les capacités locales en matière de planification sectorielle, de collecte de données et d’élaboration de politiques fondées sur des données probantes.
  • Ragda reçoit son repas quotidien à l’école. « Je ne pourrais pas apporter mon déjeuner de chez moi. Nous n’en avons pas les moyens, » explique-t-elle.
    Crédit : AP Images pour le GPE

  • Une enseignante du primaire donne un cours de mathématiques à l’école Masajid Adeem, gouvernorat de Ta’izz, Yémen. Grâce à un plus grand nombre d’enseignantes, les filles sont plus nombreuses à aller à l’école au Yémen.
    Crédit : Anas Hassan Ahmed Ahmed Al Haj/AP Images pour le GPE

Un partenariat de longue date

Le Yémen a rejoint le GPE en 2003 et a reçu plus de 175 millions de dollars américains de financement. Depuis que la guerre a éclaté en 2015, le GPE et ses partenaires se sont adaptés à l’évolution des besoins éducatifs du pays.

L’approche partenariale du GPE a permis de rassembler les acteurs nationaux et mondiaux, mobilisant des ressources indispensables au maintien de l'accès à l’éducation et pour éviter l’effondrement du système éducatif.

Tant que le conflit perdure, les efforts déployés par le GPE et ses partenaires demeurent essentiels pour garantir aux enfants yéménites comme Ragda de ne perdre pas l’opportunité d’un avenir meilleur.

Mars 2025