Semer les graines du changement : l'éducation au changement climatique pour les jeunes élèves de la région Asie-Pacifique

Les jeunes de la région Asie-Pacifique sont parmi les plus vulnérables au changement climatique. Un accès dès le bas-âge à une éducation complète sur le changement climatique peut renforcer leurs habitudes écoresponsables et les amener à adopter des modes de vie qui s’adaptent au changement climatique et contribuent à l'atténuer sur le long terme.

09 février 2024 par Catherine Wilczek, UNESCO Bangkok
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Lecture : 5 minutes
Chhay Kim Hak et ses élèves de première année nettoient la cour de l'école avant le début des cours à l'école primaire de Chambak Haer, dans le district de Puok à Siem Reap au Cambodge. Crédit : GPE/Roun Ry
Chhay Kim Hak et ses élèves de première année nettoient la cour de l'école avant le début des cours à l'école primaire de Chambak Haer, dans le district de Puok à Siem Reap au Cambodge.
Credit: GPE/Roun Ry

Le changement climatique s'intensifie. L'année 2023 est considérée comme l'année la plus chaude jamais enregistrée dans le monde depuis le milieu du 19e siècle, battant un record établi il y a quelques années à peine.

Dans la région Asie-Pacifique, où de nombreuses populations vivent dans des villes côtières et des territoires de faible altitude et où les principales industries sont souvent liées à la pêche et à l'agriculture, les communautés sont particulièrement sensibles à ce risque accru.

Il faut agir, et vite, si l'on veut que la région parvienne à relever ce défi imminent.

Parmi les nombreux moyens mis en œuvre par les gouvernements, les entreprises et la société civile pour tenter d'endiguer une crise future, l'éducation au changement climatique s'avère l'une des approches les plus prometteuses pour sensibiliser à la lutte contre le changement climatique et accélérer la mise en œuvre de solutions climatiques pour un avenir durable.

Il est donc encourageant de constater que lors des Semaines régionales du climat 2023 Asie-Pacifique, l'éducation a été reconnue comme l'une des voies les plus prometteuses pour stimuler la transformation de la viabilité environnementale, la participation des enfants et des jeunes figurant en bonne place dans le programme.

De même, lors de la dernière conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28) à Dubaï (Émirats arabes unis), 39 pays partenaires du Partenariat pour une éducation verte ont approuvé la Déclaration sur le changement climatique et l'éducation, s'engageant ainsi à renforcer la capacité des élèves à s'adapter aux effets actuels du changement climatique, ainsi qu'à en limiter son aggravation.

Qu’est-ce que l’éducation au changement climatique ?

Le changement climatique est bien plus qu'une question environnementale. Il a en effet des implications sociales et économiques sur le développement humain, notamment la pauvreté, l'inégalité et l'injustice.

En reconnaissant cela, l'éducation au changement climatique vise à développer les connaissances, les compétences, les valeurs et les comportements qui aideront les individus et les sociétés à fonctionner comme des « acteurs du changement » résilients pour l'adaptation au climat, l'atténuation de ses effets et, à terme, la viabilité environnementale.

Le modèle du vélo de Cantell et al. (2019) illustre la portée considérable et les éléments interconnectés du changement climatique tout en mettant l'accent sur la réponse orientée vers l'action que représente l'éducation.

L'éducation holistique au changement climatique vise à renforcer la compréhension des élèves des causes et des impacts du changement climatique en encourageant la mise en pratique, la motivation et la participation active des élèves à des mesures d'atténuation et d'adaptation au changement climatique. Son objectif final est d’inciter chacun à devenir un acteur du changement tout au long de sa vie.

Pourquoi enseigner le changement climatique dès la petite enfance ?

Les jeunes enfants de la région Asie-Pacifique sont parmi les plus vulnérables au changement climatique. Un accès précoce à une éducation complète sur la lutte contre le changement climatique stimule les comportements respectueux du climat et l'adoption de modes de vie qui s'adaptent au changement climatique et en atténuent les effets sur le long terme.

L'éducation et la protection de la petite enfance (EPPE) sensibles au climat doivent viser à renforcer la résilience des enfants et à les préparer à être des acteurs de changement positif, pour le présent comme pour l'avenir.

La Déclaration de Tachkent et les engagements à l’action pour la transformation de l’éducation et la protection de la petite enfance (2022) soulignent explicitement à quel point il est impératif que les États membres promeuvent une éducation et une protection de la petite enfance sensibles au climat. L'UNESCO a également souligné récemment la nécessité de développer des systèmes éducatifs intégrant le climat et sensibles au climat pour l'Asie et le Pacifique.

Néanmoins, l'éducation et la protection de la petite enfance (EPPE) ne figure pas encore parmi les éléments clés des plans d'adaptation et d'atténuation au changement climatique de la région Asie-Pacifique. À quoi ressemblerait l'intégration de l'éducation au changement climatique dans l'EPPE ?

Donner aux éducateurs de la petite enfance les moyens d'enseigner le changement climatique avec assurance

L'éducation au changement climatique commence généralement au niveau primaire où elle se concentre sur l'autonomisation des jeunes en tant qu'acteurs du changement (Rapport mondial de suivi sur l’éducation, 2022).

Pour mettre en œuvre une éducation au changement climatique efficace au niveau de la petite enfance en Asie-Pacifique, il est essentiel de disposer d'enseignants et d'éducateurs compétents dans le domaine de l’EPPE.

Pourtant, les instructeurs de l'EPPE de la région ne sont ni bien préparés ni bien formés. Bien que 83 % des professionnels du développement de l'enfant aux Philippines soient convaincus de la nécessité d'enseigner le changement climatique aux jeunes enfants, moins de 30 % d'entre eux se disent prêts à acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour le faire correctement (ARNEC, 2023).

Dans ce contexte, il devient indispensable de renforcer les capacités de la main-d'œuvre en charge de la petite enfance dans la région Asie-Pacifique :

  1. Offrir aux enseignants en formation initiale et continue une formation qui réponde à leurs besoins pour enseigner le changement climatique et qui leur fournisse l'occasion d'échanger et de partager leurs expériences en matière d'enseignement.
    Une formation de qualité crée une communauté de pratique et dote les enseignants des connaissances, des compétences, des valeurs et des comportements nécessaires pour comprendre les impacts du changement climatique et y faire face. En outre, elle introduit des stratégies pédagogiques efficaces qui développent la capacité des enseignants à impliquer les élèves de manière holistique. La recherche et les pratiques recommandent des pédagogies telles que l'apprentissage actif et de type activiste, la recherche par l'art et l'apprentissage par la nature.
  2. Intégrer l'enseignement socio-émotionnel dans la formation.
    L'apprentissage socio-émotionnel est essentiel pour protéger les enseignants et les enfants de l'anxiété liée au changement climatique ainsi que d'autres émotions angoissantes liées à leur prise de conscience croissante de la crise climatique. Le changement climatique et la dégradation de l'environnement entraînent des répercussions négatives sur tous les aspects du bien-être psychologique des enfants en Asie-Pacifique, comme le décrit le Nurturing Care Framework, et cette formation peut atténuer les répercussions sur la santé mentale des enfants.
  3. Fournir aux enseignants des supports pédagogiques de qualité, adaptés au contexte, et garantir un accès inclusif pour un apprentissage ininterrompu pendant les fermetures d'écoles.
    L'adaptation du matériel d'enseignement et d'apprentissage aux impacts du changement climatique propres à la ville et au pays de chaque élève permet de développer des connaissances contextuelles et d'améliorer l'expérience de l'élève en matière de changement climatique. Elle rend l'éducation au changement climatique « plus authentique et plus pertinente par rapport à des situations spécifiques et aide à trouver des solutions d'adaptation locales, réalistes et abordables ». Le Programme d’études au contenu local indonésien en est un bon exemple : lors de l'intégration de sujets et de thèmes relatifs à la réduction des risques de catastrophes dans différentes disciplines aux niveaux primaire et secondaire, les éducateurs ont commencé par analyser les besoins sociaux, culturels et naturels locaux de la communauté.

Doter les enseignants d'une formation complète à l'éducation au changement climatique qui intègre une approche socio-émotionnelle, des supports pédagogiques adaptés au contexte et la promotion de la collaboration communautaire sont des stratégies impératives pour : donner aux éducateurs les moyens de dispenser efficacement une éducation au changement climatique, veiller au bien-être socio-émotionnel des élèves, garantir un apprentissage inclusif et renforcer l'engagement en faveur de pratiques respectueuses de l'environnement.

Si nous développons à grande échelle ces stratégies en Asie-Pacifique, une génération d’individus informés et résilients sera mieux préparée à relever les défis de notre climat en pleine évolution. Nous devons semer aujourd'hui les graines de l'action climatique dans l'éducation de la petite enfance, dans l'intérêt d'un avenir durable pour tous.

**Les recherches pour cet article ont été effectuées par Yining Jia, une stagiaire qui soutient le travail de l'équipe chargée de l'apprentissage inclusif et équitable au sein de la Section Éducation du Bureau régional de l'UNESCO à Bangkok.

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