Réparer des rêves brisés : faire face à l'impact de la COVID-19 sur l'éducation des filles

La « nouvelle normalité » imposée par la pandémie de COVID-19 nous contraint à revoir l'avenir de l'éducation pour des millions de filles en Afrique. Afin de comprendre l'impact de la COVID-19 sur les filles à partir de leurs propres expériences, l’ONG Plan International et l'African Child Policy Forum (ACPF) ont mené une étude continentale dont nous vous proposons ici quelques-unes des grandes lignes.

28 octobre 2020 par Sam Norgah, Plan International African Union Liaison Office
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Lecture : 4 minutes
Une fille lisant son manuel scolaire dans sa salle de classe une école primaire à Madagascar. Crédit : UNICEF Madagascar/2014/Ramasomanana
Une fille lisant son manuel scolaire dans sa salle de classe une école primaire à Madagascar.
Credit: Crédit : UNICEF Madagascar/2014/Ramasomanana

Nous avons tous des aspirations et des rêves pour le futur. Nous voulons tous, pour nous-mêmes, nos enfants, notre communauté, un avenir qui promet une qualité de vie meilleure. Les rêves et les aspirations constituent le fondement de toute entreprise humaine et sont ancrés dans nos croyances, nos traditions, nos politiques et nos législations. Cependant, la nouvelle « normalité » imposée par la pandémie de COVID-19 a brusquement redéfini l'avenir de l'éducation pour des millions de filles en Afrique.

Plan International (en anglais) et l’African Child Policy Forum (ACPF) ont mené une étude à l’échelle continentale et publié un rapport intitulé : En Etat de siège : L’impact de la COVID-19 sur les filles en Afrique afin de comprendre l'impact de la COVID-19 sur les filles, sur la base de leurs propres expériences.

Le rapport nous aide à appréhender l'impact de la COVID-19 sur les filles. Les filles avec lesquelles nous avons discuté nous ont expliqué comment la COVID-19 a brisé leurs rêves et freiné leurs aspirations.

Le rapport présente une dure réalité : l’avenir de millions de filles ne sera plus jamais le même en raison de la perturbation des systèmes éducatifs causée par la pandémie de COVID-19. Les réalités vécues par ces filles en cette période particulière et leur impact sur leur éducation sont bien comprises par certaines d'entre elles. La COVID-19 a réduit l'espace consacré à l'éducation.

« Les cours me manquent vraiment. Parfois, j'essaie d'étudier à la maison, mais il y a tellement de tâches ménagères à gérer que je ne peux pas réviser mes notes. Je m'occupe de mes frères et sœurs ainsi que de la maison et de la ferme. Je commence à travailler très tôt et me couche très tard ».

Halima, jeune nigérienne de 16 ans.

Quel avenir pour l’éducation des filles dans le contexte de la COVID-19 ?

Les mesures mises en place par les gouvernements pour contenir la propagation du virus ont entraîné la fermeture des écoles (entre autres restrictions) dans plus de 70 % des pays d'Afrique. Pour mettre les choses en perspective, plus de 120 millions de filles ne vont toujours pas à l’école car plusieurs d’entre elles restent fermées.

Pensez-y un instant. En supposant que 10 % des filles ne puissent pas y retourner lorsque les écoles rouvriront, le nombre de filles qui abandonneront l'école en Afrique s'élèvera à 12 millions. C’est juste stupéfiant ! Cela équivaudrait presque d’au total des populations de la Gambie, du Botswana, du Gabon, du Lesotho et de l'île Maurice combinées. Cela inquiète et bouleverse en même temps.

Les écoles ne se contentent pas toujours à assurer l’éducation uniquement l’éducation des enfants. Dans la plupart des pays, elles offrent également des repas nutritifs dans le cadre de programmes d'alimentation scolaire ; préservent des millions de filles des mariages précoces ; leur fournissent des informations sanitaires adaptées à leur âge et les protègent contre la violence sexiste.

L'environnement scolaire offre également un espace de socialisation et de réseautage pour les filles. Certaines filles ont exprimé leurs craintes face à l'augmentation des taux de mariages précoces, de mutilations génitales féminines, de violences physiques et sexuelles, entre autres.

« Les choses sont devenues très compliquées pour moi depuis le début de l'état d'urgence. C’est affreux d’être à la maison toute la journée avec ma famille car, ils me mettent la pression pour que je me marie. »

Angelina, jeune mozambicaine de 17 ans.

De nombreux pays ont introduit l'apprentissage en ligne afin de limiter l'impact de la fermeture des écoles sur l’apprentissage. La pertinence de cette initiative des gouvernements doit être saluée. Cependant, malgré les avantages de l'apprentissage en ligne, les filles ont soulevé d'autres difficultés telles que :

  • Le coût de la connexion à Internet et son accès limité dans les communautés défavorisées
  • L’inadaptation des plates-formes virtuelles aux besoins des personnes handicapées
  • Certaines personnes responsables d’enfants sont incapables de les aider durant les sessions en ligne
  • L'apprentissage en ligne est un phénomène nouveau pour les enseignants et les apprenants.

Réflexion personnelle

Divers cadres normatifs et législatifs tels que les objectifs de développement durable, l'Agenda 2063 de l'Union africaine et la stratégie d'éducation continentale pour l'Afrique soulignent l'importance de l'éducation.

L'impact de la COVID-19 sur l'éducation pourrait annihiler des décennies d'efforts et de ressources investis pour assurer l'égalité des sexes dans l'éducation, en particulier au niveau de l’enseignement de base.

Si nous n'agissons pas de manière décisive et n'augmentons pas les investissements dans les domaines essentiels du secteur de l'éducation, les inégalités entre les sexes dans l'éducation ne feront que s’aggraver à la longue. Je souhaite ainsi poser quelques questions :

  • Face à la COVID-19, les gouvernements, les bailleurs de fonds, les partenaires de développement, les organisations de la société civile font-ils assez pour garantir l’accès des filles à l'éducation ?
  • Les investissements vont-ils dans les bons programmes, les bonnes plates-formes et initiatives à même de garantir des résultats scolaires optimaux aux filles ?
  • Avons-nous mis en place des mécanismes de responsabilité efficaces pour suivre les résultats obtenus en matière d’éducation, le financement et les autres ressources destinées à l'éducation des filles ?
  • Les plates-formes d'apprentissage alternatives sont-elles capables de fournir un apprentissage efficace ? Des mesures d'amélioration sont-elles mises en place ? Les plates-formes d'apprentissage alternatives sont-elles sensibles à la dimension du genre ?
  • Les mesures de confinement et de restriction tiennent-elles compte des réalités vécues par les filles et les autres groupes vulnérables et de la manière dont ces populations en particulier sont touchées ?

Pouvons-nous nous permettre de rester inactifs pendant que les rêves de millions de filles se brisent ? C'est là que les organisations qui soutiennent l'éducation des filles comme le GPE et Plan International peuvent et doivent investir de manière stratégique en faveur de l'éducation pour renverser les rêves brisés et restaurer les aspirations de millions de filles en Afrique.

Ainsi, mes collègues du bureau de liaison de Plan International à l'Union africaine et moi-même levons la main pour soutenir l'investissement en faveur de l'éducation de tous les enfants, en particulier des filles. Et vous devriez certainement en faire de même.

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