L’éducation des réfugiés du lac Tchad ne peut attendre
Le Partenariat mondial pour l'éducation a décaissé près de 7 millions de dollars en 30 jours en soutien d'urgence au Tchad
12 février 2016 par Alice Albright, GPE Secretariat
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Lecture : 9 minutes
Boys raise their hands in a classroom in Chad. Credit: Educate a Child

Cette semaine, le Partenariat mondial pour l’éducation a décaissé 6,95 millions de dollars en soutien d’urgence à l’éducation des populations réfugiées, rapatriées et déplacées dans la région du lac Tchad.  

Frontalier avec le Cameroun, la République centrafricaines, la Libye, le Niger, le Nigéria et le Soudan, le Tchad se trouve au cœur de plusieurs crises humanitaires majeures. Le pays est affecté par la crise alimentaire qui frappe le Sahel et la crise financière déclenchée par la chute des prix du pétrole.

Dès la fin 2013, l’augmentation des activités terroristes au Nigéria, ainsi que les efforts du gouvernement pour lutter contre cette menace ont provoqué l’arrivée de nombreux réfugiés et rapatriés au Tchad, en particulier dans la région du lac Tchad, à la frontière occidentale du pays.

Des conflits oubliés

On estime globalement à 4 millions le nombre de personnes nécessitant une aide humanitaire au Tchad en 2016, soit près d’un tiers de la population du pays.

Il se trouve que la région du lac Tchad est déjà mal desservie par le système éducatif national. Soixante-deux pourcent des enfants ne sont pas scolarisés, le nombre moyen d’élèves dans une classe de primaire est de 75 et le taux d’analphabétisme est de 95,8 % chez les adultes. La population souffre de niveaux élevés de malnutrition et d’insécurité alimentaire, et 57 % des enfants sont en insuffisance pondérale.

À la fin de l’année dernière, le gouvernement tchadien a lancé un appel auprès de la communauté internationale pour recueillir 566,7 millions de dollars afin de répondre à cette crise humanitaire. Sur ces fonds, 7,3 millions de dollars ont été demandés pour permettre au pays de satisfaire, au sein de cette région isolée, les besoins des réfugiés en matière d’éducation.

Le financement de 6,95 millions du GPE représente une fraction des fonds promis la semaine dernière lors de la Conférence sur la Syrie pour l’éducation des enfants touchés par le conflit dans ce pays. Tandis que le conflit syrien monopolise l’attention du monde entier, des douzaines de conflits « oubliés » font rage partout dans le monde, notamment aux frontières du Tchad.

Un secteur largement sous-financé

La vaste majorité (86 %) des réfugiés dans le monde vivent dans des pays en développement, et l’éducation dans les situations d’urgence est généralement sous-financée. Les principaux critères d’allocation de fonds en situation d’urgence et de crise humanitaire concernent les interventions d'aspect vital. L’éducation est rarement une priorité lorsqu’il s’agit de faire des compromis avec les autres besoins élémentaires tels que la fourniture d’un abri, de nourriture, d’eau potable et de conditions sanitaires viables.  

Pourtant, l’éducation aussi est vitale. Elle donne aux enfants et à leur famille l’espoir d’un avenir meilleur et une raison de vivre. C’est précisément lors d’une crise qu’il est de la plus haute importance de maintenir l’éducation. Une fois qu’un enfant décroche du système scolaire, il y a de fortes chances pour qu’il ne soit plus jamais scolarisé. Les écoles constituent des espaces sécurisés pour les enfants. Et l’éducation peut apporter une sensation de retour à la normale à l’enfant dont l’univers se trouve complètement bouleversé.

Ces perceptions commencent heureusement à évoluer, et l’importance cruciale de l’éducation est ainsi de plus en plus reconnue, non pas dans le cadre d’une intervention post-crise, mais lors du déclenchement d’une situation d’urgence. Lors de la Conférence sur la Syrie de la semaine dernière, l’éducation a par exemple constitué l'un des trois domaines pour lesquels des fonds ont été promis.

Relier l’aide humanitaire et l’assistance au développement

Le 8 janvier 2016, le gouvernement tchadien a soumis une requête de financement accéléré pour 6,95 millions de dollars auprès du Partenariat mondial pour l’éducation, dont l’UNICEF est le partenaire d’exécution (agent partenaire). Jeudi 4 février, un comité du Conseil d’administration du Partenariat mondial pour l’éducation a approuvé la demande du Tchad, et le transfert des fonds à l’UNICEF a été fait le 8 février.

Ces 6,95 millions de dollars de fonds financeront un programme d’urgence  pour l’éducation de base conçu pour bénéficier aux populations de réfugiés et de rapatriés, ainsi qu’aux communautés d'accueil.  Ce financement répond non seulement aux besoins humanitaires immédiats de ces populations mais également aux priorités en termes de développement, puisqu’il s’agit de créer un système éducatif plus durable.  

Le programme est axé sur l'offre de services de base et comprend notamment la construction de 86 salles de classe permanentes, 40 structures d’apprentissage provisoires, 25 puits et 80 latrines. Plus de 8 500 enfants bénéficieront de déjeuners scolaires et de meilleurs environnements d’apprentissage.

Le programme financera des rations de micronutriments et des traitements antiparasitaires pour tous les élèves, ainsi que la distribution de 63 700 manuels scolaires, 1 900 kits scolaires et 175 kits pédagogiques destinés aux enseignants. Il fournira une formation continue à 877 enseignants, paiera des subventions à 327 enseignants et proposera une formation pratique à 1 000 jeunes.

Tout en satisfaisant les besoins élémentaires des enfants en âge d’être scolarisés (eau potable, hygiène, repas scolaires) pour les placer dans de bonnes conditions d’apprentissage et en veillant à ce que les enseignants soient prêts à satisfaire leurs besoins d'apprentissage, le projet vise également le renforcement des capacités scolaires par la construction de salles de classe, susceptible de créer plusieurs centaines d'emplois provisoires.

Le financement accéléré aide à réagir rapidement aux crises

Le Tchad a fait appel au mécanisme de financement accéléré du Partenariat mondial pour faire cette requête de fonds. Le GPE a développé et adopté ce mécanisme de financement en 2012 pour permettre les décaissements rapides en cas de crise et la reprise rapide des activités éducatives essentielles. Les fonds sont décaissés en huit semaines et peuvent représenter jusqu'à 20 % du montant indicatif total de l'allocation fixée par le GPE pour la mise en œuvre de la phase suivante du plan sectoriel de l'éducation du pays. Ce mécanisme soutient les activités pouvant être mises en œuvre dans l’année.

Les pays sont éligibles au financement accéléré conformément au Cadre directeur pour l’accélération de l’appui dans les situations d’urgence et de reconstruction du GPE s’ils sont déjà éligibles aux financements du GPE pour la mise en œuvre de programmes, affectés par une crise pour laquelle un appel à l’aide humanitaire a été lancé par le BCAH des Nations unies comprenant l’éducation, et s’ils sont capables de démontrer que les fonds du GPE sont des fonds supplémentaires.  

L’éducation ne peut attendre

La scolarisation passe trop souvent entre les mailles du filet lorsque survient une crise humanitaire, mais elle constitue un besoin élémentaire et un droit humain qui ne doivent pas être négligés. Dans les situations de fragilité et de conflit comme au Tchad, le Partenariat mondial pour l'éducation utilise une approche progressive permettant la flexibilité de la réponse.

Au Tchad, le Ministère de l’Éducation recevra les 6,95 millions de dollars demandés pour maintenir l’éducation malgré les conditions extrêmement difficiles sévissant dans la région du lac Tchad.  

Le Partenariat mondial continuera d’aider le Tchad et 27 autres pays partenaires fragiles ou touchés par un conflit afin de veiller à ce que les enfants puissent poursuivre leur apprentissage.

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