Un cadre commun pour la transformation numérique dans l’éducation, développé en partenariat avec le Digital Transformation Collaborative, a récemment été lancé et présente six piliers qui permettent d’appuyer les pays dans leurs efforts visant à tirer durablement parti de la technologie au service de l'éducation. En s'appuyant sur ce cadre, un nouveau document de travail du GPE examine la façon dont les pays peuvent exploiter la technologie grâce à une approche partenariale pour améliorer les résultats en matière d'éducation. À travers des exemples concrets, ce blog passe en revue l'importance du leadership et de l'engagement collaboratif pour s'assurer que la technologie a une incidence positive sur l'apprentissage équitable et inclusif.

La transformation numérique rapide de l'économie mondiale entraîne partout une demande de nouvelles compétences. En réalité, 44 % des compétences des travailleurs risquent de changer au cours des cinq prochaines années.

Dans le même temps, les progrès pour atteindre l'objectif de développement durable No 4 accusent un retard et la pandémie de COVID-19 a fait sombrer des millions d'enfants supplémentaires dans la « pauvreté des apprentissages ».

Ces défis nécessitent des solutions innovantes et des systèmes éducatifs conçus pour tirer parti de la technologie en vue d'améliorer la qualité et l'équité de l'apprentissage, tout en dotant les générations actuelles et futures des compétences nécessaires pour que chacun puisse profiter équitablement des progrès technologiques lorsqu'il entre sur le marché du travail.

Les pays ne seront pas en mesure d'exploiter pleinement le potentiel de la technologie dans l'éducation sans un leadership visionnaire des pouvoirs publics axé sur des résultats équitables et inclusifs.

Cela signifie que l'intégration efficace des technologies dans l'éducation dépend de la capacité des responsables de l'éducation à définir une vision claire pour atteindre les objectifs en matière d'éducation pour les élèves et la société, se préparer au changement systémique qui est soutenu par des mécanismes de gouvernance et de responsabilisation appropriés, encourager l'engagement collaboratif à tous les niveaux et renforcer les écosystèmes locaux.

La nécessité de disposer d'un leadership éducatif dans la transformation numérique

Une étude a démontré que le leadership est l'un des facteurs les plus importants qui influencent les résultats scolaires. Cependant, les ministères de l'Éducation ne disposent pas toujours des compétences en leadership nécessaires pour pouvoir planifier et mettre en place efficacement les technologies de l'éducation.

Le rapport mondial de suivi sur l’éducation 2023 (rapport GEM) indique que seulement 58 % des ministères de l'Éducation sont aux commandes de la gouvernance des technologies de l'éducation. Et lorsqu'ils le sont, leur collaboration et leur coordination avec les ministères des Technologies de l'information et de la communication (TIC) et d’autres parties prenantes concernées pourraient être davantage renforcées.

Par conséquent, les plans sectoriels de l'éducation et les politiques nationales en matière de transformation numérique ont tendance à être en désaccord. Seulement 13 % des pays disposent de politiques visant à favoriser un accès équitable aux technologies dans les écoles.

Des examens réalisés en 2022 ont révélé que seulement un tiers des 24 stratégies nationales en faveur de l'intelligence artificielle (IA) accessibles au public intégraient l'IA dans l'enseignement et l'apprentissage, même si 11 gouvernements sur 51 avaient élaboré et mis en œuvre des programmes d'enseignement de l'IA.

Ces acteurs sont souvent chargés d’élaborer des stratégies technologiques au niveau de l'école qui prévoient de renforcer les capacités et de partager les meilleures pratiques, d’utiliser les données, d’approvisionner et d’affecter les ressources, de réaliser le suivi et l'évaluation, ainsi que de gérer et d’établir des rapports.

Le rapport GEM 2024 sur le leadership dans l’éducation a révélé que sur les 211 systèmes éducatifs examinés, seulement la moitié demandait aux directeurs d'établissement scolaire de promouvoir la coopération entre les enseignants, notamment grâce à l'intégration de la technologie.

Ces dernières années, plusieurs pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire ont accomplis d’importants progrès pour intégrer la technologie dans leur système éducatif en s'appuyant sur un leadership solide et une étroite coopération à tous les niveaux.

Alors que les effets de ces initiatives commencent tout juste à se faire ressentir, l'Indonésie et le Malawi présentent d’excellentes opportunités d’apprentissage de leur expérience en matière de transformation numérique de l’éducation équitable, équilibrée et centrée sur l'humain.

Comment l'Indonésie a défini des attentes et une vision pour se préparer au changement numérique

Bien que l'économie indonésienne ait réalisé des progrès remarquables, les disparités entre les régions constituent un frein à son développement, comme en témoigne son coefficient de Gini élevé de 0,379.

Conscient de ces défis, le gouvernement indonésien a défini ses attentes dans le cadre de la Vision 2045 de l'Indonésie et du Plan national de développement à moyen terme 2020-2024 en vue de favoriser un développement économique et social durable, ce qui implique d’exploiter les technologies numériques pour développer sa main-d'œuvre.

Selon les prévisions du gouvernement, l’Indonésie aura besoin de 113 millions de travailleurs dotés des compétences numériques d'ici 2030-2035.

Dans un premier temps, le gouvernement a élaboré une feuille de route pour la transformation numérique et une stratégie nationale en matière d'intelligence artificielle (IA) dans tous les secteurs, dont l'éducation et la recherche, afin de : mettre en place des réglementations et des dispositifs de financement favorables pour encourager l'innovation dans l'écosystème numérique ; développer l'infrastructure numérique dans les zones rurales et reculées pour réduire la fracture numérique dans l'accès à la technologie de ses citoyens et ; renforcer les compétences numériques pour garantir que les compétences requises soient disponibles.

Par ailleurs, une loi sur la protection des données personnelles a été adoptée en 2022 afin de sensibiliser les citoyens et de renforcer la sécurité et le respect de la vie privée dans les environnements numériques.

Le ministère de l'Éducation, de la Culture, de la Recherche et de la Technologie (MdECRT) a également exposé sa vision à travers son plan stratégique quinquennal qui vise à créer des possibilités d'apprentissage pour tous et à promouvoir l'équité dans la prestation de services éducatifs de qualité, en particulier dans les communautés défavorisées.

Dans le cadre de la réforme de l'éducation en Indonésie, le MdECRT a lancé un programme qui s’intitule « Merdeka Belajar » (soit « apprentissage émancipé ») et un ensemble d'initiatives dans le domaine numérique destinées à tous les élèves.

Le MdECRT a également élaboré et mis en œuvre des réglementations et des politiques en collaboration avec le ministère indonésien de la Communication et de l'Informatique afin de garantir un accès sûr et efficace à l'apprentissage numérique.

De plus, le gouvernement indonésien garantit un niveau de responsabilité suffisant pour effectuer le suivi et l'évaluation du processus de transformation numérique en promulguant des directives ministérielles (N° 6/2023).

Le programme de collaboration entre les communautés et les services pour la prospérité (KOMPAK) permet de suivre les vulnérabilités au niveau des villages grâce à différents systèmes de données qui tiennent compte du genre et de la situation de handicap, facilitant ainsi le processus décisionnel et une allocation équitable des ressources.

Au niveau de l'éducation, les systèmes d'évaluation des acquis scolaires sont intégrés aux plateformes d'apprentissage numérique et génèrent des données sur les acquis scolaires que les enseignants peuvent utiliser pour aider les élèves.

Les séries de politiques mentionnées ci-dessus peuvent être conçues et communiquées pour créer un environnement propice aux changements progressifs au sein des systèmes éducatifs afin de tirer pleinement parti de la transformation numérique.

Promouvoir la collaboration pour renforcer l'écosystème local au Malawi

La nature intersectorielle de la transformation numérique de l'éducation nécessite une collaboration multipartite afin de pouvoir tirer parti des ressources et de l'expertise nécessaires. Hélas, les problèmes de coordination et de capacité constituent des obstacles majeurs qui peuvent limiter les effets de la technologie sur les résultats scolaires.

Au Malawi, le leadership et l'engagement du gouvernement ont permis de rassembler les partenaires pour soutenir les réformes de l'éducation.

La création de plateformes de collaboration, notamment des groupes de travail sectoriels et techniques, des fonds communs pour les services éducatifs et un comité de pilotage sur l'apprentissage fondamental, a joué un rôle prépondérant dans le renforcement de l'écosystème local de l'éducation, en améliorant à terme les résultats scolaires.

Dans le cadre du Plan national d'investissement dans le secteur de l'éducation (NESIP, 2020-2030), le ministère de l'Éducation a élaboré un pacte de partenariat dont la réforme prioritaire vise à promouvoir « un apprentissage fondamental de qualité et un apprentissage de qualité pour toutes les filles et tous les garçons ».

Dans le NESIP comme dans le pacte, la technologie est considérée comme un moyen d'améliorer l'apprentissage. Le ministère s'est associé au EdTech Hub pour « renforcer la coordination des programmes assistés par la technologie (tels que le programme national d’apprentissage du calcul, le projet d’apprentissage de la lecture dans les petites classes, ainsi que le programme BEFIT) afin d'améliorer l'apprentissage fondamental et la prestation de services »

Le programme BEFIT (Building Education Foundations through Innovation and Technology, soit « Bâtir les fondements de l’éducation grâce à l’innovation et à la technologie »), qui est un exemple d'engagement collaboratif, constitue une initiative gouvernementale prometteuse qui couvre les secteurs de l'éducation, de la technologie et de l'énergie, et qui rassemble des directeurs d’établissement scolaire, des philanthropes et des acteurs du secteur privé.

Ce programme vise à améliorer les compétences de base en lecture, écriture et calcul de tous les élèves de la première à la quatrième année.

Le programme BEFIT comprend également un volet visant à autonomiser les enseignants, des interventions de perfectionnement professionnel destinées aux jeunes pour fournir des services de soutien en matière de TIC et de systèmes d'énergie solaire, ainsi qu'une recherche rigoureuse pour évaluer l'impact du programme avec des études récentes montrant des résultats prometteurs au niveau des acquis scolaires des élèves.

Combler l’écart entre les attentes, la réglementation et la mise en œuvre des initiatives de technologie au service de l’éducation pour favoriser un apprentissage équitable et inclusif

Il est primordial de cultiver le leadership et la collaboration à tous les niveaux du système éducatif pour s'assurer que la vision et les réglementations nationales en matière d'éducation et de technologie se traduisent par des mesures concrètes susceptibles d'améliorer l'apprentissage de tous les élèves.

Tous les efforts déployés pour mettre la technologie au service de l'éducation seront plus efficaces si les directeurs d’établissement scolaire, les responsables locaux, les enseignants, les autorités chargées de l’éducation au niveau intermédiaire et national et les dirigeants politiques sont :

• Impliqués et participent activement à l'élaboration de la vision et des politiques nationales visant à améliorer le système éducatif ;
• Capables de favoriser une culture de prise de décision fondée sur des données et des processus d'amélioration continue ;
• Mieux préparés, motivés et habilités à élaborer et à mettre en œuvre des stratégies de transformation numérique de l'éducation efficaces et fondées sur des données probantes ; et
• Soutenus par des structures de gouvernance, des mécanismes de responsabilisation et des partenariats stratégiques solides qui rassemblent des acteurs publics, privés et philanthropiques.

Le Malawi a été sélectionné pour faire partie des pays qui bénéficieront de l'initiative Tech4Ed du GPE, qui vise à renforcer les capacités des pays et à mobiliser des données probantes pour utiliser la technologie au service de l'éducation.

Le Malawi et l'Indonésie font partie d'un réseau de plus en plus grand de pays « passerelles », une initiative conjointe de l'UNESCO et de l'UNICEF visant à étendre l'enseignement public aux environnements numériques, notamment en facilitant le partage de connaissances et de bonnes pratiques (comme lors de la visite d'étude organisée en Indonésie en octobre 2024 avec le Malawi et d'autres pays participants).

Des initiatives, telles que « Apprentissage émancipé » en Indonésie, « BEFIT » au Malawi, « Passerelles vers l’apprentissage numérique public » et « Tech4Ed » qui favorise l'intégration de la technologie dans l'éducation, montrent le potentiel de transformation des solutions numériques pour améliorer les résultats scolaires.

Grâce à des partenariats stratégiques, un engagement collaboratif et un engagement envers des pratiques fondées sur des données probantes, ces programmes ouvrent la voie à un paysage éducatif plus équitable et plus inclusif.

Le succès de ces efforts repose sur une participation active et un leadership dynamique à tous les niveaux du système éducatif, pour garantir que la vision de la transformation numérique se traduise par une amélioration nette et durable de la qualité des apprentissages et de la préparation à la vie professionnelle de tous les élèves.

Alors que des pays comme le Malawi et l'Indonésie continuent d'innover et de partager les meilleures pratiques, la communauté internationale se rapproche d'un avenir où chaque élève, indépendamment de son milieu, a accès à une éducation de qualité renforcée par la technologie.