Une version de ce blog a été initialement publiée sur le site de NORRAG (en anglais).

À travers le monde, les perturbations telles que les catastrophes naturelles, les conflits, les impacts liés au changement climatique et la pandémie de COVID-19, sont en constante augmentation.

À cela s’ajoute la montée en force de l’intelligence artificielle générative qui soulève des questions quant au rôle des enseignants et la finalité de l’apprentissage, constituant une menace existentielle pour l’éducation.

Le renforcement de la résilience est proposé comme la solution à ces défis, et depuis le début de la pandémie de COVID-19, l'intérêt pour la résilience s’est accru : Google Trends indique qu’avant 2020, les recherches sur la « résilience du système éducatif » étaient peu nombreuses, mais le terme a connu un pic en mars 2020, et le nombre de recherches a presque doublé depuis.

Dans la littérature sur l’éducation ainsi que dans les politiques nationales et les plans de relance à la suite de la pandémie COVID-19, des efforts pour cultiver des systèmes éducatifs plus résilients ont été proposés pour assurer une réponse plus adaptée et un meilleur rétablissement face aux crises, ainsi qu’une meilleure préparation aux nouveaux chocs et bouleversements. Toutefois, sans une compréhension ciblée et partagée de la résilience des systèmes éducatifs, il y a un risque que cela ne devienne qu’un concept à la mode.

Cadre pour la résilience des systèmes éducatifs

Un cadre pour comprendre et examiner la résilience des systèmes éducatifs a été développé dans le contexte d’une étude exploratoire commandée par le KIX du GPE et mise en œuvre par l'Education Development Trust.

L'étude intègre une revue de la littérature universitaire et de la littérature grise, une analyse des documents politiques, et des entretiens avec des informateurs clés chargés de la planification sectorielle dans 10 pays à faible revenu et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, et tous les pays partenaires du GPE.

Comme l’illustre la figure ci-dessous, un système éducatif résilient se caractérise par des politiques et des plans qui intègrent le renforcement de l’ensemble du système, pour anticiper les risques, planifier, réagir et récupérer en situation de crise, et pour prévenir et atténuer de futures perturbations.

Cadre émergent pour conceptualiser la résilience des systèmes éducatifs

Chaque activité est résumée ici, avec un exemple de ce que cela implique :

• Renforcer : un système résilient existe dans un cycle continu de renforcement pour s’assurer qu’il est fiable et souple quel que soit l’état d’urgence. Les activités de renforcement du système peuvent passer par le financement, la supervision et le soutien des écoles, la qualité de l’enseignement, les programmes et les évaluations, les données, la planification, le suivi, la responsabilisation, la gouvernance et la gestion.
• Anticiper : les activités d’évaluation des risques prennent en compte les éventuelles crises qui affecteront l’éducation, notamment les perturbations « connues » qui pourraient ressembler à des expériences passées ou actuelles (telles que des catastrophes naturelles, des conflits violents, des pandémies), ainsi que des perturbations « inconnues » qui concernent les impacts liés aux changements climatiques ou l’intelligence artificielle générative (IAG).
• Planifier : la planification comprend tous les efforts visant à documenter les objectifs stratégiques, à codifier les droits et les responsabilités et à proposer un plan d’action. Les Plans sectoriels de l’éducation, en parallèle avec des plans spécifiques de réduction des risques, la planification de l’éducation en situation de crise, la sécurité des écoles et l’éducation face aux changements climatiques, sont des approches courantes pour planifier les opérations quotidiennes et prendre en compte les situations de crise et d’urgence.
• Réagir et rétablir : les plans d’intervention et de rétablissement entrent en vigueur lorsqu’une crise ou une catastrophe surviennent ; les plans efficaces comprennent des stratégies à court, moyen et long terme.
• Prévenir et atténuer : les politiques et les programmes qui tentent de prévenir les crises futures et d’atténuer les effets de perturbations existantes témoignent d’une forme de résilience. Les activités concernées peuvent inclure des programmes et des curriculum visant à réduire les conflits et la violence, l’éducation pour le développement durable, la réduction des risques de catastrophe et la préparation face aux situations d’urgence, et des travaux d’amélioration ou de réaménagement des infrastructures.

L’un des aspects fondamentaux du cadre pour la résilience des systèmes éducatifs est la prise en compte de l’égalité des genres et de l’inclusion sociale. Les crises et les situations de catastrophe affectent de manière disproportionnée les populations marginalisées, notamment les femmes, les filles, les personnes en situation de handicap et les personnes qui connaissent la pauvreté, surtout dans les zones rurales.

Pourtant, les populations marginalisées sont souvent exclues d’une participation significative au processus de planification des crises, et les plans et les objectifs actuels sous-représentent souvent leurs besoins particuliers. Dans ce contexte, les populations marginalisées devraient être incluses dans les activités d’élaboration des politiques, et leurs besoins mis en avant.

Quelques mises en garde sont toutefois à prendre en compte pour comprendre et appliquer le cadre. En effet, ce cadre se concentre sur les politiques et les plans plutôt que sur des activités de résilience ascendantes qui renforcent la résilience au niveau de l’individu, de l’enseignant, de l’école ou de la communauté.

Passer du cadre à la pratique

En outre, il existe souvent des chevauchements et des interdépendances entre les politiques et les plans : par exemple, les politiques relatives à la réduction des risques et des catastrophes anticipent les risques et planifient des interventions en conséquence, tout en prévoyant des activités de rétablissement à moyen terme, en s’assurant que les environnements bâtis, tels que les infrastructures scolaires, soient résilients au changement climatique pour éviter des catastrophes futures. De ce fait, une politique de réduction des risques et des catastrophes peut englober des activités d’anticipation, de planification, de rétablissement et de réponse.

Nous nous tournons maintenant vers les communautés de recherche et de pratique pour qu’elles répondent et testent le cadre lui-même. Les prochaines étapes pourraient inclure l’élaboration d’une liste de contrôle pour tester les différentes composantes du cadre détaillées précédemment et mettre l'accent sur les besoins en matière d’égalité des genres et d’inclusion sociale.

Nous comptons sur le développement et l’affinement de la compréhension de la résilience des systèmes éducatifs afin de garantir que les politiques et les plans renforcent effectivement la résilience dans les pays et ne devienne pas un simple concept à la mode.