Cette semaine, les dirigeants de l'éducation et les décideurs politiques du monde entier se rassemblent pour le Forum mondial sur l'éducation à Incheon, en Corée du Sud. Les plus grandes questions qui y sont posées sont, comment la communauté internationale va-t-elle assurer une éducation de qualité pour tous les enfants dans le monde d'ici 2030? Que ferons-nous différemment ou mieux pour réaliser, au cours des 15 prochaines années, une percée significative en faveur du seul objectif de développement durable (ODD) qui mènera les progrès dans l'agenda mondial du développement? Pouvons-nous créer un nouveau paradigme de financement qui rende possible un niveau d’investissement et une propriété mutuelle beaucoup plus élevés?
Certaines réponses à ces questions difficiles peuvent être trouvées dans From Billions to Trillions: Transforming Development Finance, un document préparé conjointement par certaines des banques de développement les plus grandes du monde. Le document fait valoir que, pour atteindre les nouveaux objectifs de développement durable, la communauté internationale doit aller au-delà du soutien des bailleurs de fonds traditionnels aux pays en développement, vers un modèle inclusif qui capte le potentiel de toutes les sources et capacités financières. Cela comprend le soutien des bailleurs de fonds traditionnels, mais aussi un financement national et des investissements du secteur privé ainsi que la capacité, le tout de concert pour une utilisation efficace.
Le modèle opérationnel du Partenariat mondial pour l'éducation représente un microcosme de cette combinaison nécessaire d’objectif commun, d'appropriation nationale, d’engagement des ressources nationales, de responsabilité mutuelle, ainsi qu’un accent sur les résultats, comme suggéré dans la proposition du rapport From Billions to Trillions.
Un manque de 22 milliards de dollars US dans le financement extérieur
Mais le déficit est alarmant entre le financement de l'éducation actuellement disponible et ce qui est nécessaire pour atteindre le nouvel objectif de l'éducation durable. Selon le Rapport mondial de suivi de l'UNESCO, apporter une éducation pré-primaire, primaire et du premier cycle du secondaire de qualité et universelle aux pays à faible revenu et à revenu moyen-inférieur en 2030 demandera 22 milliards de dollars US supplémentaires par année en financement externe que ce qui est actuellement disponible.
Mobiliser autant de financement supplémentaire ne sera pas un mince exploit. On considère que l'aide au développement dans le monde entier pour l'éducation de base a chuté de près de 7% entre 2010 et 2013 alors que l'aide globale pour le développement mondial a augmenté de plus de 9%. Qui plus est, il y a diminution de l'aide aux pays fragiles et touchés par le conflit, où près de 70% de tous les enfants non scolarisés vivent.
Mais alors pourquoi insister sur le financement de l'éducation maintenant?
Au cours des 15 dernières années, nous avons travaillé dur pour mettre en œuvre les objectifs de l'Éducation pour tous. Bien que davantage d'innovation et de renforcement de la structure du mouvement mondial de l'éducation soient toujours les bienvenus, nous pouvons dire aujourd'hui que nous avons une bien meilleure idée de ce qui fonctionne, que ce nous avons fait il y a dix ans.
Nous avons maintenant des systèmes plus fiables pour coordonner les ressources des nombreux acteurs à l'intérieur et l'extérieur d'un pays donné. Beaucoup de pays en développement eux-mêmes ont amélioré leur propre capacité à construire et à maintenir leurs systèmes d'éducation. Les nouveaux objectifs de développement durable détiennent la promesse d'accélérer les avancées au-delà de celles que nous avons vues jusqu'à présent.
Mais nous ne pouvons accéder au niveau suivant sans davantage de financement. Et sans un effort renouvelé pour mobiliser les financements, les ODD seront largement en-deçà de nos meilleurs espoirs.
Engagement croissant des pays en développement
Les pays en développement eux-mêmes font énormément pour consacrer leurs propres ressources en faveur de l'éducation et dépenser ces fonds de manière plus efficace. Lors de la conférence de reconstitution des ressources du Partenariat mondial à Bruxelles l'année dernière, les pays en développement partenaires du GPE se sont engagés à une augmentation collective de 26 milliards de dollars US dans le financement national à l'éducation au cours des quatre prochaines années. En effet, les pays en développement partenaires du GPE augmentent leurs dépenses en matière d'éducation en moyenne de 10% en proportion du PIB après avoir rejoint le Partenariat.
L'UNESCO a établi des repères importants pour que les pays allouent au moins 4% à 6% de leur produit national brut et 15% à 20% de leur budget national à l'éducation. Nous avons besoin de nous engager à nouveau envers ces objectifs et ils devraient être suivis et contrôlés. Beaucoup de pays en développement sont sur la bonne voie pour atteindre ces points de repère, et certains l'ont déjà fait. Leur ténacité et dévouement croissants pour l'éducation sont un ingrédient nécessaire à la réussite, et un bon exemple pour les pays donateurs.
Dépenser de manière plus efficace le financement en faveur de l'éducation
La tâche à accomplir est non seulement de mobiliser un financement supplémentaire pour l'éducation, mais aussi de l’utiliser plus efficacement. À l'heure actuelle, le financement de l'enseignement ne profite pas assez aux plus démunis - les enfants les plus pauvres et les plus marginalisées. Nous devons cibler notre aide pour lutter contre les principaux blocages dans l'équité et la qualité, et éviter la fragmentation de l'aide. Les budgets nationaux doivent être dépensés plus efficacement, et nous devons travailler ensemble autour d'une compréhension commune des résultats que nous espérons atteindre. Il est important de comprendre que l'aide à l'éducation a besoin d’assurer des résultats à long terme, et non des gains à court terme.
Le Partenariat mondial se fonde sur les principes de l'appropriation nationale, la responsabilité mutuelle et l'efficacité de l'aide. Il travaille avec les pays en développement depuis de nombreuses années dans le but de renforcer les processus des politiques en faveur d’une éducation rigoureuse et inclusive, d'améliorer la coordination des financements nationaux et internationaux au niveau de l’éducation, et d'accroître l'alignement du soutien de l'éducation aux plans sectoriels nationaux.
Le modèle de financement du Partenariat mondial suit une formule de répartition fondée sur les besoins, basés sur la pauvreté, la vulnérabilité de l'éducation et la fragilité. Soixante-dix pour cent des fonds disponibles par pays reposent sur des plans sectoriels d'éducation cohérents, fondés sur des faits et financièrement viables, et soutiennent l'éducation de base du secteur telle qu’énoncée dans ces plans. Trente pour cent du financement est lié à la réalisation de progrès concrets en termes de qualité de l'apprentissage, d'efficacité du système éducatif et de l'équité.
Un meilleur soutien en faveur de l'éducation dans les pays fragiles et touchés par un conflit
Je suis particulièrement fière du travail accompli par le Partenariat mondial au niveau du soutien à l'éducation dans les pays fragiles et touchés par le conflit, où tant d’enfants non-scolarisés vivent.
En quelques années, le Partenariat mondial est devenu l'un des plus grands bailleurs de fonds de l'éducation dans ces pays, qui reçu 50% de nos décaissements en 2014, soit plus de 250 millions de dollars US. Le Partenariat mondial va continuer à travailler avec le secteur humanitaire pour combler l'écart de financement dans ce domaine.
Le moment de l’ambition est venu
Atteindre un programme aussi ambitieux pour l'éducation tel qu’énoncé dans les nouveaux ODD exigera un immense travail. Seule une augmentation concrète du financement permettra d'atteindre les nouveaux objectifs. Les efforts supplémentaires post-2015 doivent tirer parti de toutes les sources actuelles de dépenses dans l'éducation pour se concentrer sur l'équité et la qualité afin d’obtenir de meilleurs résultats. L’amélioration de la gouvernance et des partenariats est essentielle, ainsi que d'autres innovations, telles que le financement pour les résultats.
La distance entre le financement de l'éducation aujourd'hui et ce qu'il devrait être est énorme. Mais elle n’est pas insurmontable. Elle ne l'est pas si tous les partenaires actuels et potentiels rassemblent la volonté, l'énergie et la créativité de s’investir dans l’éducation de chaque enfant du monde entier. Elle ne l'est pas si nous, dans la communauté de l'éducation, ne présentons pas un cas clair et concluant à tous, comme quoi grâce à l'éducation, les destins des individus, des nations, et du monde entier s’amélioreront. C’est à nous de le démontrer.