Burundi : comment un morceau de papier peut façonner votre vie

Ornella est une jeune fille qui se bat pour poursuivre ses études en dépit du fait qu’elle ne possède pas les documents administratifs requis pour s’inscrire dans une école.

26 septembre 2022 par Dominique Ngoma Nkenzo, Education Out Loud
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Lecture : 5 minutes
Sans certificat de naissance, Ornella, 18 ans, a du mal à poursuivre ses études. Crédit : Bafashebige
Sans certificat de naissance, Ornella, 18 ans, a du mal à poursuivre ses études.
Credit: Bafashebige

Cet article a été initialement publié sur le site internet de L’Éducation à voix haute.

« Dans les régions où le taux d'abandon scolaire est élevé, nous avons remarqué que de nombreux enfants nés de père inconnu finissent par quitter l'école car ils ne possèdent pas d'acte de naissance. »

Dénise Kandondo, Coordinatrice nationale auprès de Bafashebige

Ornella, une jeune fille de 18 ans issue de la province de Gitenga dans le centre du Burundi, se bat pour rester à l'école car elle ne dispose pas d’acte de naissance. Elle a eu la chance de pouvoir aller à l'école, car l'acte de naissance est une condition administrative requise pour s'y inscrire.

Ornella vient d'un foyer monoparental et a été élevée par sa mère. Elle connaissait son père, mais ne passait pas beaucoup de temps avec lui car il avait une autre famille, avec une femme et des enfants.

Bien que le père d'Ornella l'ait reconnue comme sa fille, il a oublié de déclarer sa naissance et est décédé avant d’avoir pu fournir les documents administratifs nécessaires. Au Burundi, seuls les pères ont le droit de déclarer la naissance de leurs enfants. La famille du père est autorisée à enregistrer l'enfant, mais dans le cas d'Ornella, elle a refusé de faire partie de sa vie. Par conséquent, elle a grandi sans disposer d’un acte de naissance.

Grâce à la détermination de sa mère, elle a pu aller à l'école primaire et secondaire en dépit de cette législation. Toutefois, ceci s’est avéré être un sérieux handicap lorsqu'Ornella a dû s'inscrire à l'examen de fin d'études secondaires organisé par l'État, dès lors que les candidats sont tenus de présenter leur acte de naissance pour s’inscrire.

« Au Burundi, vous avez besoin d'un acte de naissance pour vous inscrire à l'école. Vous en avez besoin pour vous inscrire aux examens, vous en avez aussi besoin pour vous inscrire dans l’enseignement secondaire et supérieur, pour voter et pour postuler à un emploi décent », explique Dénise Kandondo, coordinatrice nationale de l’EFAC (Education for All Coalition, soit la Coalition en faveur de l’éducation pour tous) auprès de Bafashebige. « Nous le savons. Pourtant, nous n'avons toujours pas de système en place pour obtenir des certificats de naissance pour ces milliers d'enfants qui ne sont pas enregistrés par leur père à la naissance », ajoute-t-elle..

Bafashebige s'engage à leur venir en aide

En juillet 2021, l'EFAC de Bafashebige a créé un bureau régional à Gitenga, où vit Ornella. L'EFAC est un partenaire de L’Éducation à voix haute partner.

Grâce au financement de L’Éducation à voix haute, la Coalition a pu décentraliser ses activités au niveau communautaire, explique Mme Kandondo. Les parents et les membres de la communauté prennent conscience du travail de la Coalition.

« Ils sollicitent désormais plus souvent leur intervention, notamment en matière de droit à l'éducation. » Elle précise que les communautés ont connaissance de leurs interventions car la Coalition fait partie d'un cadre de consultation régional, composé des gouverneurs des provinces de Gitega, Mwaro, Muramvya et Karuzi, ainsi que de responsables de l'éducation.

« C'est ainsi que nous avons été informés du défi rencontré par Ornella, une élève brillante qui s'est vu refuser l'accès à l'enseignement supérieur par les autorités éducatives provinciales », rapporte Dénise Kandondo.

Ornella a signalé son problème au responsable du bureau régional, qui a ensuite écrit une lettre à la Coalition, laquelle a à son tour envoyé une lettre au ministère de l'Éducation pour qu'il plaide son cas dans cette affaire.

L'EFAC de Bafashebige a réussi à fournir les documents administratifs qui devaient être ajoutés au dossier scolaire d'Ornella pour lui permettre d'accéder à ses cours et de passer l'examen.

Ornella a passé l'examen et a obtenu son diplôme ! Mais son combat continue car le document n’est que temporaire et elle doit désormais s'inscrire dans l'enseignement supérieur.

« Aider Ornella à accéder à des études supérieures est une procédure de longue haleine », déclare Mme Kandondo. « Le fait que la loi exige qu'elle soit en possession d’un certificat de naissance pour poursuivre ses études constitue un véritable défi et cette exigence ne peut être éludée éternellement. Ornella a maintenant 18 ans et peut donc faire appel au tribunal pour faire valoir son droit de recevoir les documents nécessaires, en tant que citoyenne du Burundi. La Coalition la soutiendra tout au long de cette démarche », ajoute Mme Kandondo.

Beaucoup d'autres filles se retrouvent dans la même situation qu'Ornella

Malheureusement, l'histoire d'Ornella n'est pas un cas isolé, remarque Mme Kandondo. « Au cours d'une étude visant à produire une base de données sur les groupes marginalisés et vulnérables dans les régions où le taux d'abandon scolaire est élevé, nous avons remarqué quelque chose que nous n'avions pas perçu auparavant : de nombreux enfants nés de père inconnu finissent par quitter l'école car ils ne possèdent pas d'acte de naissance ».

« Bien qu'Ornella ait reçu un soutien, de nombreux autres enfants confrontés à cette situation abandonnent l’école et se retrouvent dans des situations de travail des enfants et de mariage précoce », explique Mme Kandondo. « Ils sont vulnérables aux abus et aux viols et, par conséquent, le même schéma se reproduit et d'autres enfants naissent de père inconnu ».

« Mon histoire pourrait servir à d'autres enfants qui se retrouvent dans la même situation que moi », a déclaré Ornella. Il semble que son combat ait effectivement inspiré d'autres membres de sa communauté. Certaines filles qui avaient abandonné l'école en raison de grossesses non désirées ont sollicité l'aide et les conseils de la Coalition.

« Nous avons désormais obtenus d'autres témoignages d'enfants qui rencontrent des difficultés à l'école. Ces derniers sont marginalisés, ridiculisés par leurs camarades de classe et se voient refuser l'accès à l'enseignement supérieur par les autorités locales en raison de la politique selon laquelle seuls les pères peuvent déclarer la naissance de leur enfant. Nous plaidons en faveur de l'amendement de cette loi et de la politique d'inscription à l'école », a déclaré Dénise Kandondo.

Des progrès ont été réalisés en ce sens. La Coalition a gagné la confiance du ministère de l'Éducation et, après avoir signé un accord de partenariat, s’est vu accorder un espace stratégique en tant que partenaire clé dans l'élaboration des politiques éducatives. L'intégration dans le processus de planification de l'éducation lui a déjà permis de plaider pour la préservation de l'éducation gratuite.

Pourtant, elle est également consciente des défis qui l’attendent. « Malheureusement, les jeunes mères ont tendance à cacher le fait que leurs enfants ne sont pas reconnus par leurs pères, dans le but d’éviter toute stigmatisation. Cela a pour conséquence involontaire que leurs enfants abandonnent leurs études lorsqu’ils doivent présenter leur certificat de naissance au second cycle de l’enseignement secondaire. Nous devrons également plaider pour un changement des comportements. On n'accorde pas assez d'attention à ce problème. La situation d'Ornella l'a mis en lumière et nous continuons à plaider pour la révision de cette politique et pour un changement de comportement au sein des communautés », a conclu Mme Kandondo.

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