Après avoir écouté attentivement et pris des notes, les délégués qui assistaient récemment à une réunion de revue sectorielle de l'enseignement supérieur ont vivement applaudi Dylan Magoli, 18 ans, alors que celui-ci descendait de la tribune. Il venait de faire une présentation qui comportait des propositions sur la façon d'améliorer l'accès à l'éducation pour les élèves des zones rurales du Zimbabwe.

Dylan faisait partie des délégués qui comptaient des directeurs d'école, de hauts fonctionnaires, des consultants, des membres de la société civile et des agences des Nations Unies, réunis à l'occasion de la revue sectorielle conjointe 2023. Cette rencontre annuelle d'évaluation et de planification du secteur de l’éducation est coordonnée par le ministère de l’Enseignement primaire et secondaire, avec le soutien du GPE.

Dylan a parcouru environ 100 km depuis son lycée de Gweshe situé en milieu rural dans la province du Mashonaland central pour assister à la réunion organisée à Harare, la capitale du pays. Il s'est dit motivé plus qu'intimidé par la prestigieuse assistance.

« J'étais ravi », explique-t-il. « En tant qu'élève, j'étais très heureux à l'idée que nous puissions présenter nos idées à des personnalités aussi respectées et que celles-ci étudient nos contributions. », a-t-il ajouté. Dylan étudie les mathématiques, l'économie et le commerce à un niveau avancé.

Dylan fait partie des élèves qui ont participé à la revue sectorielle conjointe et ont occupé le devant de la scène lors des présentations, des séances de groupe et des discussions plénières.

La revue sectorielle conjointe réunit sous un seul toit les parties prenantes de toute la chaîne du système éducatif, de ceux qui travaillent à des postes dans des zones éloignées à ceux qui travaillent au plus haut sommet du ministère en passant par les partenaires. Le but est de faire le point sur la mise en œuvre du plan stratégique pour le secteur de l’éducation (PSSE 2021-2025) et de planifier l'avenir.

Bien que d'ampleur nationale, les réunions de la revue sectorielle conjointe ont une portée qui atteint chaque coin du pays en renforçant les capacités, selon Gabriel Mhumha, directeur de l'éducation pour la province du Mashonaland occidental. « Nous partageons beaucoup de connaissances et nous échangeons les bonnes pratiques. Ce faisant, je trouve des solutions aux problèmes que je rencontre dans ma province » rapporte M. Mhumha, dont la province est essentiellement rurale.

« J'ai toujours trouvé que la revue sectorielle conjointe jouait un rôle fondamental en nous permettant de suivre les progrès du Mashonaland occidental par rapport à des indicateurs importants comme l'accès et la qualité de l'éducation, lesquels sont nos principaux domaines de résultats. Nous obtenons ainsi un retour sur les progrès réalisés province par province, ce qui fait ressortir les difficultés aux niveaux des provinces, des districts et des écoles. Nous pouvons ainsi mettre au point des interventions ensemble ; nous abordons les problèmes collectivement plutôt que de manière cloisonnée », affirme-t-il.

M. Mhumha souligne la stratégie du ministère qui consiste à décentraliser le recrutement des enseignants à l'échelle provinciale dans des régions où l'accès et la qualité de l'éducation sont menacés à cause de la diminution des effectifs. « Cette stratégie est le fruit des discussions que nous avons eues lors des réunions de la revue sectorielle conjointe. C'est plutôt utile et cela nous aidera à stabiliser les effectifs en tant que province. Sans personnel suffisant, nous ne pourrons jamais atteindre nos objectifs en matière d'accès et de qualité », poursuit M. Mhumha, dont la province compte plusieurs districts éloignés et vulnérables comme Kariba et Hurungwe.

La revue sectorielle conjointe de 2022 s'est déroulée du 25 au 27 juillet 2023. C'est sa deuxième édition depuis la récente adoption du PSSE 2021-2025. Les délégués ont réfléchi aux réalisations obtenues et à l'atteinte des indicateurs clés comme l'accès à l'éducation, la scolarisation et la rétention des élèves, la qualité des services, la disponibilité des enseignants, l'accès au matériel pédagogique, la mise en œuvre efficace des lois et des politiques ainsi que les résultats d'apprentissage comme les taux de réussite.

Les délégués ont adopté 29 mesures pour favoriser la mise en œuvre des recommandations dans cinq domaines clés en 2023, à savoir le financement, l'apprentissage inclusif (méthodes alternatives d'enseignement et d'apprentissage), les infrastructures, l'évaluation des programmes, ainsi que la revue, la réforme et le renforcement du système.

Sœur Praxedis Nyathi est directrice de l'école primaire AMR dirigée par l'Église catholique dans le district de Lupane dans la province du Matabeleland Nord dans l'Ouest du Zimbabwe, à environ 600 km de Harare. Elle affirme que son école et elle peuvent concrètement témoigner des retombées immédiates et à long terme de la revue sectorielle conjointe.

« J'ai beaucoup appris de ce que les autres ont présenté ici. Par exemple, j'ai appris à mieux gérer les enfants surdoués et ceux qui avaient des difficultés d'apprentissage. Le problème de pénurie d'enseignants dans notre école a été résolu, car nous avons accueilli deux nouveaux enseignants », explique-t-elle. Pour elle, l'intervention va permettre à son établissement d'améliorer son taux de réussite, dont la moyenne est actuellement de 90 %.

Sœur Nyathi, qui fait partie des personnes ayant donné une présentation lors de la réunion, affirme que la revue sectorielle conjointe est une occasion formidable d'entrer en relation avec diverses parties prenantes comme les partenaires de développement.

Comme la revue sectorielle conjointe cadre avec les objectifs de développement du gouvernement, le ministère de l’Enseignement primaire et secondaire a intégré le processus dans son calendrier annuel de planification, de suivi et de budgétisation. C'est ce qu'a expliqué Evelyn Ndlovu, alors ministre de l'Éducation. « Cette généralisation de l'outil de planification (la revue sectorielle conjointe) en garantira la pérennité, au-delà du GPE », affirme-t-elle. Dans ses remarques lues en son nom par le secrétaire général lors de l'inauguration de la revue sectorielle conjointe, la ministre encourage les délégués à être ouverts aux idées nouvelles.

Dylan, l'élève du lycée de Gweshe, approuve. Selon lui, la nature inclusive et participative de la revue sectorielle conjointe donne plus de force à la voix des élèves. Pour illustrer son propos, il fait une analogie avec la relation entre un médecin et son patient. « Pour que le médecin puisse établir son diagnostic et donner le bon traitement, il doit impliquer le patient en lui demandant comment il se sent et où il a mal », explique Dylan, qui rêve de créer son entreprise apportant des solutions technologiques aux difficultés auxquelles est confronté le secteur de l'éducation en Afrique.

« Il en va de même pour le secteur de l'éducation. Pour améliorer le système éducatif, il faut que les principales parties prenantes puissent participer. Il est extrêmement important que les élèves soient impliqués dans toutes les questions touchant à l'éducation », conclut-il.