Bien que le GPE n’octroie pas de financement à l'État d'Edo¹ son expérience en matière de réforme prioritaire de l'éducation de base nous fournit des informations utiles sur ce qui convient de transformer et la manière de transformer le système dans la pratique.

Lors d'une conversation avec la direction et le personnel du GPE, l'ancien gouverneur Godwin Obaseki a présenté le parcours de l'État, notamment les réformes qu'il a menées, les approches qu’il a adoptées, les décisions difficiles qu’il a prises et les découvertes qu’il a faites, ainsi que les points non négociables qui ont orienté les efforts de réforme.

Ces réflexions reposent sur les défis de taille que l'État d'Edo cherchait à surmonter, à savoir : des niveaux de compétences en lecture, écriture et calcul extrêmement bas, des infrastructures scolaires médiocres, un important taux d’absentéisme chez les enseignants, une faible responsabilité et une perte de confiance de la population dans l'enseignement public.

Telle était l'ambition du programme de transformation du secteur de l'éducation de base (EdoBEST) lancé par le gouvernement en 2018.

En accordant la priorité à l'apprentissage fondamental, en autonomisant les enseignants et en utilisant la technologie pour dispenser l'enseignement et l'apprentissage ainsi que pour favoriser la responsabilisation, le programme EdoBEST avait pour objectif de révolutionner l'éducation de base et d’améliorer considérablement les résultats d'apprentissage.

Un système transformé : des conséquences visibles

Parmi les grandes réussites du programme figurent :

• L'autonomisation des enseignants : au cœur du succès, plus de 16 000 enseignants ont été formés à des méthodes d'enseignement modernes, notamment à l'utilisation d'outils numériques, tandis que l'assiduité des enseignants (qui a augmenté après le lancement du programme EdoBest) et les cours dispensés ont fait l'objet d'un suivi et d'un soutien constants.
• Un taux de scolarisation plus élevé : le nombre d'élèves scolarisés a augmenté en passant de 230 000 en 2018 à plus de 384 000 en 2024, ce qui montre un regain de confiance dans l'enseignement public.
• De meilleurs résultats d'apprentissage : des progrès considérables ont été réalisés pour améliorer les résultats en matière de lecture, d’écriture et de calcul. Par exemple, les élèves de troisième année des écoles primaires bénéficiant du programme EdoBest obtiennent désormais les mêmes résultats en lecture, écriture et calcul que les élèves de cinquième année qui fréquentent des écoles ne faisant pas partie du programme EdoBest.
• Des gains d'efficacité : des progrès importants ont été accomplis pour améliorer l’efficacité du système. Par exemple, les taux de redoublement ont baissé de 50 %.

Quels ont été les principaux piliers de la transformation ?

La transformation du système éducatif de l'État d'Edo repose sur les cinq piliers suivants :

1. Promouvoir une gouvernance efficace et une meilleure responsabilisation

Une gouvernance solide a constitué la pierre angulaire du processus de transformation, en commençant par la restructuration du Conseil national pour l'éducation de base universelle (State Universal Basic Education Board, SUBEB).

Cet organe central revitalisé est devenu le centre névralgique des réformes systémiques et a aligné les objectifs sur les écoles, les enseignants et les administrateurs afin de garantir la cohésion et la clarté de la mise en œuvre.

Pour soutenir ces efforts, une approche de gestion basée sur la performance a été adoptée, qui associe les initiatives de réforme à des objectifs clairs et mesurables axés sur les résultats d'apprentissage et l'équité. Cette approche a permis de créer une responsabilité partagée qui a guidé les parties prenantes pour obtenir des résultats concrets.

La responsabilité a été renforcée par des inspections d’écoles régulières basées sur les données.

Ce processus d’examen de la qualité, facilité par un tableau de bord de données fiables, a fourni des informations en temps réel sur les performances des écoles, ce qui a permis aux administrateurs d'identifier les domaines nécessitant une attention particulière et de mettre en œuvre les interventions au moment opportun pour continuer à progresser.

2. Placer les enseignants au cœur de la transformation du système éducatif

L'État d'Edo a reconnu qu’un enseignement de qualité et un soutien aux enseignants constituaient à la fois le plus grand défi et le meilleur moyen de transformer le système éducatif.

Les enseignants ont été formés à la pédagogie moderne et ont reçu des outils numériques, notamment des plans de cours pré-téléchargés transmis sur des tablettes. Parallèlement, des partenariats solides ont été forgés avec les syndicats des enseignants.

Le programme complémentaire Edo Supporting Teachers to Achieve Results (EdoSTAR, soit Edo aide les enseignants à obtenir des résultats) a également été une pierre angulaire de la réforme du système éducatif.

Le programme EdoSTAR avait pour objectif de recruter et de retenir les meilleurs enseignants dans les écoles défavorisées, de remédier aux inégalités et de professionnaliser le corps enseignant.

Ce programme a mis en place des parcours professionnels liés aux performances, ce qui a permis de motiver les enseignants tout en les responsabilisant. Ces mesures ont contribué à restaurer la fierté et à remonter le moral des enseignants.

3. Utiliser les données et la technologie pour changer la donne et obtenir plus rapidement des résultats

Le programme EdoBEST a tiré parti de la technologie pour mener à bien les efforts de réforme aussi bien en classe qu’en dehors, ainsi que pour améliorer la responsabilité.

Les tablettes des enseignants pré-téléchargées avec des plans de cours scénarisés garantissent un enseignement cohérent et d’excellente qualité dans toutes les classes, ce qui permet aux enseignants de consacrer plus d'énergie à la manière dont ils dispensent les cours en classe plutôt qu'à la préparation du contenu des cours.

Des tableaux de bord en temps réel permettent de suivre l'assiduité scolaire, l'achèvement des cours et les performances des écoles, ce qui permet aux responsables de l'éducation de surveiller les progrès et de résoudre rapidement les problèmes.

Ces outils ont permis d’obtenir plus rapidement des résultats en facilitant une prise de décision en temps opportun et fondée sur les données.

4. Impliquer la communauté pour favoriser l'appropriation et la confiance

Parmi les mesures les plus importantes qui ont été prises pour impliquer les membres de la communauté dans la transformation de l'enseignement et de l'apprentissage figure la création de comités de gestion au niveau des écoles et la formation de leurs membres.

Ces comités ont impliqué les parents et les responsables locaux dans le contrôle de la mise en œuvre et de la gestion des réformes, et ont joué un rôle déterminant pour promouvoir l'engagement, améliorer la transparence et garantir que les réformes répondaient aux besoins locaux.

Lorsque les écoles publiques ont commencé à obtenir de meilleurs résultats, les parents qui avaient auparavant choisi l'enseignement privé sont revenus dans le système public.

Ce regain de confiance dans les écoles publiques est survenu suite à l'amélioration de l'enseignement et de l'environnement d'apprentissage, ce qui démontre l'importance d’intégrer les parents et les dirigeants communautaires dans les principales parties prenantes du secteur de l'éducation.

5. Favoriser une collaboration intersectorielle pour répondre aux besoins des enfants

Une collaboration et des partenariats avec d'autres secteurs ont été établis en vue d’éliminer les obstacles systémiques qui empêchent de répondre aux besoins des enfants et d'améliorer la qualité de l’apprentissage dans l'État d'Edo. Par exemple, le secteur de l'éducation s'est associé au secteur de la santé dans le but de veiller au bien-être physique et mental des élèves.

Le secteur de l'éducation a également collaboré avec le secteur du développement social et le système judiciaire dans le cadre d'initiatives sociales plus larges visant à lutter contre le décrochage scolaire des filles en supprimant les obstacles qui les empêchent d’achever leur scolarité, notamment les mariages précoces et la violence sexiste.

L'adoption et la mise en application de la loi sur l'interdiction de la violence contre les personnes dans l'État d'Edo, par exemple, ont permis au système éducatif de collaborer avec le système judiciaire pour enquêter sur les cas de violence sexiste perpétrés contre les étudiantes.

Quels ont été les catalyseurs du changement et les décisions difficiles à prendre ?

Le processus de transformation dans l'État d'Edo a été catalysé par un certain sentiment d’urgence, étant donné que les faiblesses du système éducatif menaçaient la stabilité socio-économique de l'État.

En effet, les niveaux élevés de migration clandestine des jeunes ont fait ressortir la nécessité de doter les élèves des compétences fondamentales et de relever les défis rencontrés dans l'éducation de base.

Parmi les décisions difficiles qui ont été prises figurent :

• la révision des intérêts politiques bien ancrés et d’un état d’esprit de maintien du statu quo afin de renforcer la responsabilité et d'améliorer l'efficacité ;
• la normalisation des méthodes d'enseignement grâce à des plans de cours scénarisés, ainsi qu’à la formation et au soutien continus des enseignants, ce qui a permis d'améliorer la qualité de l'enseignement ; et
• la priorité accordée à l'apprentissage fondamental de la lecture, de l'écriture et du calcul par rapport à d'autres priorités concurrentes, afin de s'attaquer aux causes profondes de la pauvreté des apprentissages.

Le rôle du leadership pour susciter la transformation

La présence de leaders investis et inspirants, à tous les échelons et dans tous les domaines, est fondamentale pour susciter la transformation dans l’ensemble des systèmes éducatifs. Dans le cas de l'État d'Edo, il est indéniable que le leadership de haut niveau a joué un rôle essentiel pour établir un tel leadership collectif.

Véritables ambassadeurs du changement, les leaders de haut niveau anticipent les besoins d’un système éducatif, exposent une vision et définissent une stratégie qui permettra de répondre aux attentes futures sur le plan des apprentissages et des compétences.

Ces leaders réalisent des activités et des campagnes de sensibilisation qui portent sur les différentes dimensions du programme de transformation, incitant ainsi les autres à suivre le mouvement et à forger des coalitions entre les décideurs politiques, les responsables et les administrateurs, les enseignants, les organisations de la société civile, les partenaires de développement et les partenaires non traditionnels comme les acteurs du secteur privé.

Ce blog fait partie d'une série sur la transformation des systèmes éducatifs mettant en évidence les voix et les idées de partenaires et de praticiens sur ce que nous apprenons sur la transformation des systèmes éducatifs dans différents contextes et ce que cela nécessite.

Nous tenons à remercier M. Godwin Obaseki, ancien gouverneur de l'État d'Edo (de novembre 2016 à novembre 2024) et son équipe du Conseil national pour l'éducation de base universelle (SUBEB), dirigée par la présidente du SUBEB, Mme Eyitayo Salami, d'avoir partagé avec le Secrétariat du GPE leurs réflexions et leurs enseignements tirés du programme d'EdoBEST.

1. Les financements du GPE couvrent d'autres États du Nigéria, à savoir : le financement de mise en œuvre en cours d’exécution d’un montant de 125 millions de dollars soutient trois États (Oyo, Amadawa et Katsina avec la Banque mondiale comme agent partenaire), tandis que le prochain financement pour la transformation du système soutiendra six États (Abia, Akwa Ibom, Bauchi, Kebbi, Kwara et Lagos avec la Banque mondiale et l'UNICEF comme agents partenaires) représentant un État de chacune des six zones géopolitiques du Nigéria, qui ont été sélectionnés par le groupe local des partenaires de l’éducation à Abuja à la suite d’un processus de sélection rigoureux. Le GPE soutient également les enfants non scolarisés à Kaduna (avec un financement de 62 millions de dollars dont la Banque islamique de développement est l’agent partenaire), les personnes déplacées à l'intérieur du pays à Borno, Adamawa et Yobe (avec un financement de 5 millions de dollars dont l’UNICEF est l’agent partenaire), ainsi que les réfugiés du Cameroun et les communautés d'accueil dans les États d'Adamawa, d'Akwa Ibom, de Benue, de Cross River et de Taraba (avec un financement de 5 millions de dollars dont Save the Children est l’agent partenaire).