Une approche communautaire pour promouvoir la santé et l'hygiène menstruelles : points de vue de jeunes de Tanzanie, du Myanmar et du Pakistan

Des jeunes leaders du GPE du Myanmar, du Pakistan et de Tanzanie s'expriment sur l'importance de l'hygiène menstruelle, soulignent les défis propres à leurs régions et décrivent les mesures qu'ils prennent pour encourager un changement de pratiques.

28 mai 2024 par Salha Aziz, GPE Secretariat, Su Myat Noe, GPE Secretariat, et Anzal Abbas, GPE Secretariat
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Lecture : 5 minutes
Sobia Nisaar avec sa fille Dania, 13 ans, à l'école primaire pour filles de Nishtar Colony, à Lahore au Pakistan. Crédit : GPE/Sebastian Rich
Sobia Nisaar avec sa fille Dania, 13 ans, à l'école primaire pour filles de Nishtar Colony, à Lahore au Pakistan.
Credit: GPE/Sebastian Rich

Le présent blog reflète les avis indépendants des jeunes leaders du GPE qui ne sont pas émis pour le compte d'une quelconque organisation.

La Journée mondiale de l'hygiène menstruelle a pour but de rompre le silence sur les menstruations, de promouvoir la santé et l'hygiène menstruelles et de faire face aux importantes répercussions des problèmes menstruels sur les filles et les femmes dans le monde.

Cette année, nous mettons en lumière les témoignages édifiants de nos jeunes leaders qui œuvrent en faveur de la santé et de l'hygiène menstruelles dans leurs communautés. Salha (Tanzanie), Anzal (Pakistan) et Su (Myanmar) partagent leurs points de vue sur l'importance de l'hygiène menstruelle, soulignent les défis spécifiques rencontrés dans leurs régions et décrivent les mesures préventives qu'elles ont prises pour favoriser le changement.

 

Salha Aziz

En Tanzanie, les problèmes de santé et d'hygiène menstruelles, tels que l'accessibilité et le coût des protections hygiéniques, des toilettes propres équipées d'eau salubre, des vestiaires réservés aux femmes, des poubelles, des incinérateurs, ainsi que de l'éducation à la gestion de la santé et de l'hygiène menstruelles, constituent de véritables défis pour les femmes et les filles.

Les filles manquent 3 à 7 jours d’école par mois pendant leur cycle menstruel, ce qui entraîne de mauvais résultats scolaires et peut même entraîner des abandons scolaires.

Les taux de grossesse chez les adolescentes sont également plus élevés, dès lors que les filles sont contraintes d’avoir des relations sexuelles pour obtenir l'argent nécessaire à l'achat de serviettes hygiéniques.

Grâce à la Binti Salha Foundation et dans le cadre de notre domaine d'intervention qui consiste à défendre les droits des adolescentes et des jeunes femmes en matière de santé, nous sensibilisons les filles, les garçons, les enseignants, les parents et les membres de la communauté à l'hygiène menstruelle et à la gestion des menstruations.

Nous plaidons également en faveur de l'amélioration des infrastructures scolaires afin qu’elles soient équipées de toilettes standard qui répondent à tous les besoins d'une jeune fille en période de menstruation, et nous formons des jeunes femmes qui ne sont pas scolarisées à la couture, afin qu'elles puissent fabriquer des serviettes hygiéniques réutilisables à un prix abordable.

Cette année, nous avons recueilli 1 million de TZS (environ 400 USD) dans le cadre de notre campagne Mvalishe Akasome Campaign, dont l’objectif est de fournir des serviettes hygiéniques à au moins 1 100 écolières en deux étapes.

La première étape a débuté le 18 mai 2024, lorsque nous nous sommes alliés à l’ONG Her Movement lors de leur gala sur la santé et l'hygiène menstruelles, et avons contribué à leur objectif de collecte de 7 000 serviettes hygiéniques en faisant don de 304 serviettes.

La seconde étape commencera le 28 mai, soit le jour de la Journée mondiale de l'hygiène menstruelle, lors de laquelle nous distribuerons les 796 serviettes restantes aux filles de trois écoles d’enseignement secondaire situées à Dar Es Salaam.

En tant que défenseure des droits des adolescentes et des jeunes femmes, je participe et collabore également avec la Global Menstrual Collective pour promouvoir la politique des serviettes hygiéniques détaxées dans notre pays qui vise à garantir que les serviettes hygiéniques soient accessibles et abordables pour chaque femme et chaque fille en Tanzanie.

 

Su Myat Noe

Au Myanmar, les filles et les femmes doivent faire face à des défis de taille en matière de santé et d'hygiène menstruelles en raison du conflit, de l'instabilité économique et de la stigmatisation culturelle qui y sévissent actuellement.

La plupart des filles de notre pays ont grandi en disposant de connaissances et d’informations limitées sur la menstruation avant d'avoir leurs premières règles, en raison de croyances, de normes et de tabous culturels. Elles sont angoissées et gênées de demander à leur tuteur comment prendre soin d'elles-mêmes pendant leurs règles.

Par conséquent, les filles manquent de confiance en elles et ont des idées fausses sur leur corps, ce qui les incite à éviter toute activité sociale. Même si elles sont conscientes, elles ne possèdent pas toujours les connaissances appropriées pour utiliser des produits hygiéniques propres, les changer de manière régulière et maintenir un bon niveau de propreté général.

Les femmes et les jeunes filles de mon pays sont confrontées à des défis considérables en matière de santé et d’hygiène menstruelles, tels qu’un accès restreint aux produits hygiéniques et aux installations sanitaires.

En effet, les crises économiques rendent ces articles trop coûteux et les conflits viennent perturber les chaînes d'approvisionnement. Par ailleurs, le nombre de personnes déplacées augmente de plus en plus en raison de l'instabilité politique. Les filles et les jeunes femmes déplacées ont un accès restreint à l'internet et à des informations correctes sur leurs santé et hygiène menstruelles.

Dans les camps de personnes déplacées, les femmes et les jeunes filles ont souvent recours à des solutions peu hygiéniques pendant leurs menstruations en raison de la pénurie et du coût élevé des serviettes hygiéniques.

Le manque d'eau potable et d'installations privées dans les écoles et les foyers exacerbe les risques sanitaires et affecte le bien-être mental, dès lors que les femmes préfèrent boire l’eau potable que de l’utiliser pour leur hygiène intime.

En tant que défenseure de la jeunesse, j’œuvre actuellement pour sensibiliser les filles, les responsables d’enfants et les jeunes aux droits en matière de santé sexuelle et reproductive par le biais du programme baptisé « Champions du changement » (« Champions of Change » en anglais).

J'organise également des dialogues intergénérationnels avec les membres de la communauté pour explorer les normes et les malentendus qui existent sur la menstruation, et je profite de ces occasions pour fournir des informations correctes sur les pratiques en matière de santé et d’hygiène menstruelles.

À l'avenir, j'envisage de collaborer avec Plan International Myanmar pour dispenser une éducation sexuelle complète, sensibiliser à la santé et à l’hygiène menstruelles et améliorer l'accès des adolescentes aux produits hygiéniques.

Je continuerai à sensibiliser le public au moyen d'ateliers pédagogiques, en collaborant et en m’associant avec des organisations porteuses des mêmes valeurs, afin de fournir des produits hygiéniques et des installations sanitaires. Il est indispensable de remédier à ces problèmes afin de promouvoir la santé, la dignité et les opportunités des femmes et des filles au Myanmar, en garantissant qu'elles puissent gérer leurs menstruations en toute sécurité, même dans des circonstances difficiles.

 

Anzal Abbas

Dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure comme le Pakistan, la santé menstruelle pose de nombreux problèmes. Les filles et les femmes ne sont souvent pas assez sensibilisées sur le sujet, n'ont pas les moyens d'acheter des produits hygiéniques et ne disposent pas d'installations appropriées.

Les menstruations sont également entachées d’un sentiment de honte et de stigmatisation.

De ce fait, de nombreuses filles abandonnent l'école et leur taux d'abandon scolaire s’élève à plus de 80 %. Par ailleurs, 44 % des filles ne reçoivent pas d'éducation de base en matière de santé menstruelle, que ce soit à la maison, à l’école ou sur leur lieu de travail.

Les catastrophes naturelles telles que les inondations peuvent encore aggraver la situation. Les femmes déplacées se heurtent à des défis encore plus importants, comme le fait de ne pas disposer d'endroits sûrs pour changer ou jeter leurs produits hygiéniques et de ne pas se sentir à l'aise pour parler de leurs besoins à des professionnels de la santé masculins.

Des organisations non gouvernementales comme Aahung ont adopté le modèle d'éducation à la santé menstruelle pour remédier à ce problème.

Il est important de signaler que la santé menstruelle est considérée comme un sujet tabou au Pakistan. C'est la raison pour laquelle Aahung a cherché à s’associer avec les écoles pour dispenser une éducation à la santé menstruelle en formant des enseignants qui ont ensuite organisé des séances de formation pour leurs élèves dans l'espoir de faire évoluer les attitudes et la culture sociales à l’égard de la menstruation.

Après d'importantes évolutions sur la scène politique, le gouvernement du Sindh a officiellement intégré « l’enseignement des aptitudes à la vie quotidienne » en tant que matière obligatoire du programme d’enseignement primaire en 2018. Il s'agit d'un changement prometteur pour promouvoir la santé et l'hygiène menstruelles.

D'après mon expérience, un programme formel d'enseignement des aptitudes à la vie quotidienne a une incidence considérable sur les attitudes des gens.

En tant que professionnelle de la santé publique et de l'éducation, j'ai travaillé sur ce sujet avec des enseignants et des jeunes dans des régions telles que Khairpur, Sheikhupura, Jamshoro, Vehari, Mitari et Karachi, soit des districts qui font partie des régions les plus sous-développées du Pakistan.

Les programmes éducatifs qui ont une appropriation collective peuvent entraîner des changements sociaux positifs dans des pays comme le Pakistan.

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Nos jeunes leaders, Salha, Anzal et Su, apportent diverses perspectives et une multitude de solutions innovantes. Leurs contributions soulignent non seulement l'urgence de remédier aux problèmes de santé menstruelle, mais démontrent également le pouvoir des initiatives menées par les jeunes pour promouvoir un monde dans lequel la menstruation ne constitue plus un obstacle à l’égalité ni aux opportunités.

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