Lorsqu’on observe l’évolution des projets éducatifs à travers le monde, aucun effort de réforme ne semble avoir été adopté aussi rapidement ces dernières années que celui concernant le coaching des enseignants. Et pour cause. Les recherches montrent que cette pratique, contrairement à d'autres réformes (comme la réduction de la taille des effectifs dans les salles de classe, par exemple), peut se traduire par une amélioration de la qualité de l'enseignement qui, à son tour, produit des effets plus positifs sur les résultats scolaires des élèves (Kraft et al, 2018).
Par conséquent, bailleurs de fonds, autorités nationales et responsables de mise en œuvre font de plus en plus confiance aux coachs et au coaching pour aider les enseignants à mettre en pratique, dans leurs salles de classe, les connaissances acquises lors d'ateliers. Le but est d’améliorer l’apprentissage et de contribuer, par extension, à réformer la pratique de l'enseignement en elle-même.
Toutefois, comme tant à démontrer cet article, l’accompagnement ne fonctionne que s'il est bien conceptualisé, bien conçu et bien mis en œuvre. Et ici, les programmes de coaching prévus dans les projets de développement international, au sens large, ne sont pas toujours efficaces.
Les fondements théoriques du coaching semblent souvent intuitifs et ne se basent pas toujours sur des résultats de recherches. De nombreuses initiatives d’accompagnement des enseignants sont fondées sur des théories du changement incomplètes et les mécanismes de recrutement, de formation et de soutien au coaching sont souvent inadéquats.
Dit autrement, l’intérêt suscité par le coaching, s’il ne se base pas sur des fondements qui font de ces espoirs une réalité, tend à conférer à cette pratique une dimension « magique » qui met en danger l’efficacité de cette forme potentiellement puissante de développement et de soutien professionnel des enseignants.
Je présente ces dangers du point de vue de quelqu'un qui a accompagné les enseignants, qui a été formé au coaching cognitif et dont le travail ces dernières années a été de concevoir et de superviser des programmes de coaching financés par des bailleurs de fonds dans les pays en développement.
Danger N°1 : aucune expérience en matière d'enseignement n'est nécessaire
L'accompagnement est très technique. C'est un aspect du développement professionnel très différencié, individualisé et personnalisé qui se focalise uniquement sur le métier. Enseigner est extraordinairement complexe, c'est pourquoi tant de personnes ont du mal à le faire bien.
Démonstration de compétences ; compréhension profonde des nombreuses dimensions de l'enseignement ; empathie avec les nombreuses difficultés auxquelles les enseignants font face ; expérience de la réalité des écoles, des salles de classes et des interactions avec les élèves ; conseils basés sur des expériences antérieures et crédibilité sont des compétences essentielles à l’accompagnement – et elles découlent toutes de l'expérience des enseignants..
Danger N°2 : tout enseignant peut facilement devenir un coach
Mais l’inverse de ce qui précède existe aussi, à savoir que si vous avez été enseignant, ipso facto, vous pouvez être coach ! Et lorsque nous formons des coachs, cela se résume souvent à leur faire remplir des formulaires d'observation, des formulaires de conformité et de responsabilisation financés par les bailleurs de fonds.
Pourtant, si l'enseignement est complexe, le coaching peut l'être davantage. Les « briques » d'une solide expérience d'enseignant doivent être liées par le « mortier » des compétences en matière de coaching : retour d'information, compréhension des approches d’accompagnement à déployer (Cf. Danger N°7), résolution des conflits, gestion du changement et compétences en communication (telles que savoir résumer, s’adapter, paraphraser) qui font passer les enseignants d'un niveau de performance à un autre.