Un appel urgent à financer l'éducation des réfugiés

Un nouveau rapport de Save the Children explore l'état de l'éducation des réfugiés en 2023 et plaide pour que la communauté internationale intensifie et mobilise les fonds nécessaires pour la financer.

22 juin 2023 par Susan Nicolai, Save the Children
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Lecture : 4 minutes
Des enfants déplacés participant à des activités psychosociales dans un centre d’accueil à Madani, au Soudan. Crédit : UNICEF/UN0856169/Mohamdeen

Des enfants déplacés participant à des activités psychosociales dans un centre d’accueil à Madani, au Soudan.

Credit: UNICEF/UN0856169/Mohamdeen

La semaine dernière, le HCR a publié ses chiffres actualisés sur les déplacements forcées dans le monde. Les chiffres présentent un triste tableau – fin 2022, 108,4 millions de personnes dans le monde ont été déplacées de force en raison de conflits et de fragilité – une augmentation de plus de 5 % par rapport à seulement six mois auparavant.

Le nombre de réfugiés a atteint 35,3 millions, soit la plus forte augmentation annuelle jamais enregistrée.

Près de la moitié des enfants réfugiés ne sont pas scolarisés et, à moins que des mesures ne soient prises, l'augmentation actuelle du nombre de réfugiés rend d'autant plus probable que cette génération et les générations futures d'enfants réfugiés soient privées de l'éducation dont elles ont besoin pour restaurer leur avenir.

Cette semaine, Save the Children a publié un nouveau rapport, plaidant pour que la communauté internationale intensifie et mobilise les fonds nécessaires pour financer la crise de l'éducation des réfugiés.

Les systèmes éducatifs des pays d’accueil sont au bord de l’effondrement

De nombreux réfugiés vivent dans des pays à faible revenu, dont la République démocratique du Congo, l'Éthiopie, l'Ouganda, le Soudan et le Tchad. L'accueil d'importantes populations de réfugiés met à rude épreuve les services déjà fragilisés de ces pays.

Les menaces croisées de la COVID-19, des conflits et du changement climatique pourraient retarder davantage les progrès de l'éducation.

Les pays à faible revenu comme ceux-ci ont de toute urgence besoin d'un financement accru de l'éducation. Cependant, leur croissance économique devrait rester inférieure aux niveaux d'avant la pandémie. Cela entravera la capacité des gouvernements à allouer le financement national nécessaire pour élargir l'accès et la qualité de l'éducation des enfants réfugiés et ceux des communautés d'accueil.

Le poids de la dette limite les capacités des gouvernements à financer l’éducation

Actuellement, plus de la moitié des pays à faible revenu sont surendettés ou exposés à un risque élevé de surendettement, ce qui signifie que les gouvernements sont incapables de remplir leurs obligations financières et ont besoin d'un allégement de la dette.

Ces charges de la dette ont des impacts significatifs sur la capacité des gouvernements à financer correctement leurs systèmes éducatifs.

L'analyse de Save the Children pour notre rapport a révélé que 4 des 14 principaux pays d'accueil de réfugiés à revenu faible ou intermédiaire ont dépensé plus pour le service de la dette extérieure que pour l'éducation en 2020.

Nous avons également constaté que les paiements d'intérêts sur la seule dette extérieure par les pays à revenu faible et intermédiaire dans les 20 principaux pays d'accueil de réfugiés s'élevaient à plus de 23 milliards de dollars en 2020 - ce qui est suffisant pour envoyer chaque enfant réfugié vivant dans des pays à revenu faible et intermédiaire à l'école pendant près de 5 ans.

L'allégement de la dette pourrait clairement jouer un rôle important dans la mobilisation des financements nécessaires pour garantir que chaque enfant réfugié ait accès à l'éducation.

Le coût de l'éducation des réfugiés

Nous savons ce qui fonctionne pour offrir une éducation aux réfugiés et combien cela coûterait. En 2021, la Banque mondiale et le HCR ont mis à jour le coût annuel estimé de l'éducation des enfants réfugiés dans les pays à revenu faible et intermédiaire que Save the Children avait initialement calculé en 2018 dans son rapport Time to Act.

Leurs chiffres actualisés estiment ce coût annuel à 4,85 milliards de dollars à l’échelle mondiale. Il s'agit d'une estimation pré-COVID et ce coût peut s’avérer plus élevé si on inclut les dépenses supplémentaires liées aux interventions d'éducation en réponse à la COVID-19.

Ces coûts ne doivent pas seulement être considérés comme un investissement dans les enfants réfugiés, mais aussi dans les enfants des pays d'accueil, qui peuvent bénéficier de l'expansion et des investissements dans les services d'éducation.

Des élèves de l'école primaire publique de Klessoum dans la région du Chari-Baguirmi, au Tchad. Crédit : GPE/Carine Durand

Des élèves de l'école primaire publique de Klessoum dans la région du Chari-Baguirmi, au Tchad.

Credit:
GPE/Carine Durand

La solidarité internationale envers les pays d'accueil des réfugiés fait défaut

Et pourtant, les donateurs bilatéraux ont collectivement réduit leur aide directe à l'éducation de 359 millions de dollars entre 2019 et 2020, selon la Banque mondiale et l'UNESCO. Aujourd'hui, une aide supplémentaire est destinée à atténuer les conséquences de la guerre en Ukraine et d'autres crises.

L'éducation est également l'un des domaines humanitaires les moins financés, ne recevant que 3,1 % du financement humanitaire mondial en 2021, les appels en faveur de l'éducation ne recevant que 22 % des fonds nécessaires.

Les principes du partage équitable de la charge des réfugiés justifient fortement le soutien de la communauté internationale. Les pays d'accueil des réfugiés réagissent avec une générosité incroyable, en ouvrant leurs frontières et leurs systèmes nationaux.

À l'opposé, les pays à revenu élevé réagissent avec une hostilité croissante, réduisant les budgets d'aide et laissant certains des pays les plus pauvres du monde assumer le coût de l'éducation des réfugiés.

L'opportunité du Forum mondial sur les réfugiés

Le Forum mondial sur les réfugiés en décembre est l'occasion de créer un nouvel espoir pour les personnes réfugiées à travers le monde. Cependant, les engagements doivent être soutenus par des financements si nous voulons concrétiser la promesse du Pacte mondial sur les réfugiés.

Il existe de nombreux obstacles à l'intégration des enfants réfugiés dans les systèmes éducatifs. Mais notre rapport montre pourquoi le manque de financement est l'un des plus critiques.

Save the Children appelle les donateurs et les institutions multilatérales à mobiliser des financements pour couvrir le coût annuel de 4,85 milliards de dollars nécessaires pour assurer l'éducation des réfugiés et renforcer les systèmes éducatifs dans les pays à revenu faible et intermédiaire.

Les recommandations de notre rapport indiquent comment ce financement pourrait être mobilisé, y compris le rôle important que joue le Partenariat mondial pour l'éducation dans le financement de l'éducation des réfugiés.

Ayant déjà perdu leur maison et été témoins d'actes de violence indicibles, trop d'enfants réfugiés passent à côté de leur éducation et leurs espoirs d'un avenir meilleur. Nous mettons le monde au défi de faire mieux.

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