Résoudre ensemble la crise climatique et la crise de l'éducation

Le secteur de l'éducation est en première ligne des efforts de résilience face au changement climatique. Une meilleure planification et une meilleure préparation pourraient renforcer ce rôle, tout en minimisant l’impact des crises climatiques sur l'éducation.

18 juillet 2022 par Sarah Beardmore, GPE Secretariat, et Camilla Pankhurst, UK Foreign, Commonwealth and Development Office
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Des élèves passant un examen dans une salle de classe en plein air au lycée pour filles de Mpanda, dans le district de Mpanda, région de Katavi en Tanzanie. Crédit : GPE/Kelley Lynch
Des élèves passant un examen dans une salle de classe en plein air au lycée pour filles de Mpanda, dans le district de Mpanda, région de Katavi en Tanzanie.
Credit: GPE/Kelley Lynch

« Pour les pays du Sud à faible revenu, le changement climatique arrive comme un voleur dans la nuit ». Cette phrase a été prononcée par Agnes Makonda Ridley, ministre de l'Éducation du Malawi, à Wilton Park (en anglais), dans une allocution à la conférence sur les systèmes éducatifs intelligents face au climat, organisée le mois dernier par le GPE et le bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni (FCDO, du sigle en anglais).

Le Malawi a déjà été frappé par deux cyclones cette année. À chaque fois, des infrastructures scolaires sont détruites, des manuels scolaires précieux sont emportés, des enseignants perdent tout ce qu'ils possèdent et les élèves sont confrontés à la destruction totale de leurs communautés et de leurs terres agricoles.

Ces événements, autrefois exceptionnels, se produisent désormais cinq fois plus souvent dans le monde qu'il y a 40 ans. Avec l'augmentation des phénomènes extrêmes causés par le changement climatique, le Malawi n'est pas le seul pays à être vulnérable.

À chaque catastrophe climatique, les maigres ressources allouées à l'éducation sont une fois de plus réaffectées à la reconstruction, au détriment d'investissements qui pourraient améliorer la qualité de l'éducation. Le changement climatique rend la réalisation de l'ODD 4 encore plus inatteignable.

Le paradoxe réside dans le fait que l'éducation est le moteur socio-économique fondamental de la résilience au changement climatique (en anglais) et de la durabilité.

L'éducation a tout changé pour Selina Nkoile, qui a participé à la conférence de Wilton Park depuis sa communauté masaï dans le nord du Kenya. Lorsque la première école pour filles a ouvert ses portes dans sa communauté, elle avait 12 ans et était déjà promise au mariage.

Les investissements réalisés dans sa communauté (grâce à des sources extérieures) ont permis de construire l'école. Cela a favorisé l’annulation de son mariage et lui a permis, contrairement aux autres filles avant elle, de terminer sa scolarité.

Elle a, par la suite, mis en place des initiatives de permaculture qui ont permis de faire pousser des forêts vivrières et d'éduquer sa communauté masaï sur les plantes indigènes, à la fois médicinales et nutritives, sur lesquelles son village peut compter lorsqu’il ne pleut pas.

L'éducation des filles est largement reconnue comme un facteur de résilience communautaire ; 200 000 décès liés aux catastrophes climatiques pourraient être évités au cours des deux prochaines décennies grâce à une meilleure sensibilisation aux risques, si chaque enfant bénéficiait d’un cycle complet d’éducation secondaire d'ici 2030.

Le rapport du Projet Drawdown (en anglais) a révélé que l'éducation des filles, associée au choix et aux droits en matière de procréation, est un facteur déterminant dans la réduction des émissions de carbone. Il s'avère donc que l'éducation est aussi une bonne politique climatique.

Les difficultés et les possibilités qui nous attendent sont claires. Et si nous avons encore un long chemin à parcourir avant de pouvoir récolter les dividendes d'une génération de jeunes intelligents face au climat, le petit groupe d'experts, de fonctionnaires, d'universitaires, d'organisations de la société civile, de jeunes et d'agences des Nations Unies réunis à Wilton Park a conclu que nous disposons déjà de certaines des connaissances, des outils et des stratégies nécessaires.

  • Réduction des risques de catastrophes et résilience

Nous avons besoin d'une application plus systématique de la planification prenant en compte les risques de crises dans le secteur de l'éducation, y compris les évaluations des risques multiples et les mesures de sécurité dans les écoles. Des mesures telles que le Cadre global sur la sécurité scolaire peuvent contribuer aux efforts nationaux d'intervention en cas d'urgence, du niveau ministériel aux niveaux sous-régional, des districts, des communautés et des écoles.

Le secteur de l'éducation est en première ligne des efforts de résilience - de nombreuses écoles servent déjà d'abris contre les cyclones, de pôles de communication et de centres de réponse et de coordination communautaires. Les enseignants et le personnel de soutien à l'éducation font souvent office d'intervenants d'urgence et ravitaillent en repas et fournitures d'urgence lorsqu'une catastrophe survient. Les perturbations de l'éducation causées par les catastrophes pourraient être minimisées grâce à une meilleure planification et une meilleure préparation (en anglais).

  • Infrastructure

Les écoles et autres infrastructures éducatives font partie des bâtiments de travaux publics les plus nombreux et ont un potentiel considérable pour devenir des centres d'excellence en matière d'énergie verte, de réponse aux catastrophes et de pratiques durables.

Trop souvent, les écoles sont construites dans des endroits qui les exposent à des risques environnementaux connus. Les matériaux et les techniques de construction ne sont pas adaptés aux besoins, ce qui nuit aux enfants et à la planète et entraîne des coûts d'entretien et de reconstruction élevés en cas de crise.

Mais l'expertise nécessaire pour construire des écoles à faible coût, résilientes au changement climatique et écologiques, même dans les pays à court d'argent, existe ; les gouvernements doivent simplement savoir comment y accéder.

  • Programme d'enseignement, pédagogie et évaluation

Actuellement, les programmes scolaires et les enseignants sont surchargés et ne répondent pas aux besoins de la plupart des enfants dans les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire. Il n'existe que peu d'éléments permettant d'établir un lien entre le transfert de connaissances et le changement de comportement, et l'on manque d'exemples de programmes d'enseignement sur le climat adaptés au contexte des pays qui sont en première ligne de la crise climatique. Il faut que cela change. Il est essentiel que l'éducation formelle et non formelle apporte aux filles et aux garçons les connaissances, les compétences transférables et les expériences dont ils ont besoin pour faire face aux changements climatiques.

  • Coordination et financement intersectoriels

Le secteur de l'éducation est absent des Contributions déterminées au niveau national (en anglais) et des plans d'adaptation au climat de nombreux pays. Wilton Park a démontré l'énorme potentiel que représente l'intégration de l'éducation dans le dialogue sur le climat et a suggéré des moyens pratiques pour y parvenir. Le travail intersectoriel doit être encouragé et de nombreux enseignements sont à tirer de la mobilisation des réponses d'urgence multisectorielles pour faire face à la pandémie de COVID-19.

Le financement est essentiel, et l'un des résultats les plus prometteurs de Wilton Park a été l'identification des principaux fonds climatiques comme une source possible de financement des efforts visant à lutter contre le changement climatique dans et par l'éducation.

Quelle est la prochaine étape ?

L'événement organisé à Wilton Park n'était qu'une étape sur la voie de l'adaptation des systèmes éducatifs au changement climatique. Le GPE et le FCDO ont réuni ce groupe pour établir des liens et identifier les priorités, mais une action concertée est maintenant nécessaire dans les secteurs du climat et de l'éducation pour protéger l'éducation du changement climatique et réaliser le potentiel des populations éduquées dans le monde entier.

Le reste de l'année 2022 sera déterminant pour la réussite de cette initiative, le Sommet sur la transformation de l'éducation et la COP27 offrant des occasions de mettre le climat à l'ordre du jour de l'éducation et vice versa. Comme l'a dit le ministre britannique Ford aux participants à Wilton Park, « le sort de nos enfants et de notre planète ne font qu'un » - saisissons donc cette occasion pour garantir un avenir meilleur pour tous.

Le GPE continuera à produire des blogs sur les liens entre l'éducation et le changement climatique, afin de partager les bonnes pratiques, de mettre en évidence les possibilités d'efforts intersectoriels et de présenter les stratégies des pays partenaires pour répondre au changement climatique dans et par l'éducation. Inscrivez-vous à notre alerte e-mail « Éducation et développement durable » pour recevoir dans votre boîte de réception tous les blogs à venir sur ce sujet.

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