Le 3 décembre 2017 marque le 25ème anniversaire de la proclamation de la Journée internationale des personnes handicapées par l’Assemblée générale des Nations unies. Cette journée a pour but de réfléchir à l’exclusion encore trop fréquente des enfants handicapés de l’éducation et à se poser les questions difficiles : l’engagement international pour une éducation de qualité inclusive est-il le signe d’un moment clé vers un changement majeur ? Ou le statu quo de la ségrégation et de l’exclusion va-t-il perdurer pour les enfants handicapés ?
Les faits
- On estime à 90 % les enfants handicapés non scolarisés dans les pays en voie de développement.
- La plupart des enfants handicapés ayant accès à l’éducation sont scolarisés de façon séparée, ce qui ne les prépare pas à une vie épanouissante en tant qu’adulte.
Un élan positif vers l’inclusion
- La Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH), ratifiée par 175 pays, appelle « un système inclusif à tous les niveaux ».
- Le paragraphe General Comment 4 de la CDPH établit une distinction importante entre exclusion, ségrégation, intégration et inclusion. Il souligne le fait que les systèmes engagés dans l’inclusion des élèves handicapés peuvent améliorer l’éducation pour tous les élèves.
- L’Objectif de développement durable 4 exige auprès de tous les États d’« assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité et [de] promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ».
Le poids de l’inertie
- De nombreuses mesures actuelles de responsabilisation utilisées pour évaluer la qualité incitent à l’exclusion et la ségrégation, puisque les enseignants ou les écoles risquent d’être pénalisés si leurs élèves obtiennent de faibles résultats aux tests
- Le fait d’axer la pédagogie sur le type de handicap plutôt que sur la méthode d’apprentissage contribue à ce que perdurent l’exclusion, l’investissement dans la ségrégation et l’intégration, et, par conséquent, un manque d’investissement dans l’inclusion.
Les personnes ayant un handicap mental et leur famille en cohérence avec le RMSE
Inclusion International, la fédération mondiale des personnes ayant un handicap mental et de leur famille a lancé une initiative, Catalyst for Inclusive Education, afin d’aider ses membres dans plus de 115 pays à faire progresser l’éducation inclusive.
Après une première année, les constats de cette initiative sont cohérents avec le Rapport mondial de suivi sur l’éducation (RMSE) 2017-18. Ci-dessous, une comparaison des deux organisations :
Catalyst for Inclusive Education | RAPPORT MONDIAL DE SUIVI SUR L'ÉDUCATION 2017 - 2018 |
Les enfants ayant un handicap mental sont ignorés par les systèmes éducatifs standards | L’inégalité est sous-estimée |
Il existe un manque de coordination entre les services du Ministère de l’Éducation | Les États manquent de plans de l’éducation clairement définis |
L’essentiel des dépenses liées à l’éducation des élèves handicapés est alloué à des services séparés ; les Ministères de l’Éducation sont ignorants des engagements internationaux | Les lois et politiques favorisant l'inclusion ne se traduisent pas dans la pratique |
La privatisation signifie que les parents doivent payer les aides à l'inclusion | La concurrence sur le marché peut aggraver les divisions sociales |
L’enseignement spécialisé est axé sur le handicap plutôt que sur la Conception universelle de l’apprentissage | Il existe peu d’accords sur les compétences requises par les enseignants |
Les tests standardisés mènent à l’exclusion | Le fait de se concentrer sur des tests standardisés comme moyen de mesurer la qualité produit un rétrécissement des programmes, un enseignement en fonction des tests et la sélection pour l’admission dans les écoles |
Le RMSE conclut que se concentrer uniquement sur la responsabilité peut entraver les progrès en matière d’inclusion, et qu’ignorer l’équité contribue au maintien de l’inertie des systèmes existants.
Les tests standardisés :
- sont destinés à la majorité et ignorent les enfants non scolarisés et les enfants handicapés ;
- supposent que tous les enfants atteignent les mêmes références et ignore leurs façons d’apprendre, qui peuvent être distinctes ;
- ne prennent pas en compte les mesures de protection sociale qui ne sont pas mesurables dans les tests ; et
- supposent un lien entre des scores élevés aux tests et la réussite postscolaire.
Selon le RMSE, « la responsabilisation doit être axée sur la création de pratiques et systèmes éducatifs plus inclusifs, équitables et de bonne qualité. »
La qualité et l’inclusion à l’avenir
Le Guide de l’UNESCO pour l’inclusion et l’égalité dans l’éducation (2017) propose certains conseils pour passer de l’inertie à un moment clé sur la voie de l’inclusion. Il défend l'idée que pour parvenir à la qualité et à l'inclusion, il faut :
- reconnaître que l’inclusion et l’équité sont les principes fondamentaux guidant tous les plans, politiques et pratiques en matière d’éducation ;
- concevoir un programme scolaire national et des systèmes d'évaluation correspondants pour traiter efficacement tous les élèves ;
- que tous les partenaires œuvrant aux côtés des élèves et de leur famille comprennent et soutiennent les objectifs de la politique nationale en faveur de l’inclusion et de l’équité dans l’éducation ; et
- créer des systèmes pour effectuer le suivi de la présence, de la participation et de la réussite de tous les élèves.
Certaines étapes simples peuvent aider les États à faire basculer la balance pour passer de l’inertie à un moment clé en faveur de l’inclusion. Les premières étapes clés sont les suivantes :
- Cesser de bâtir des écoles spécialisées ;
- Déplacer les ressources actuellement investies dans les écoles et classes spécialisées vers les politiques en faveur de l’inclusion ; et
- Modifier la formation initiale et continue des enseignants afin de les préparer à enseigner à tous les élèves.
Comment le GPE peut-il aider ?
Le récent Rapport sur le développement dans le monde 2018 (RDM) publié par la Banque mondiale est axé sur les acquis scolaires et la métrique de l’apprentissage, et prête peu d’attention aux questions liées à l’inclusion ou aux élèves les plus défavorisés. Malgré un manque d’attention portée sur l’équité, il offre une lueur d’espoir inhabituelle en signalant la valeur de l’investissement dans l’éducation, et en reconnaissant le droit à l’éducation. Le rapport effleure de nombreuses questions essentielles pour couvrir un thème aussi vaste que l’éducation, mais laisse la porte ouverte à un futur examen des liens entre équité et qualité.
Le Partenariat mondial pour l’éducation peut contribuer à faire basculer la balance en faveur de l’inclusion. La prochaine Conférence de reconstitution des ressources offre une occasion idéale à cette fin. L’ODD 4, adopté comme vision par le GPE, relie inextricablement qualité et inclusion. Soutenir des systèmes éducatifs entièrement inclusifs, incluant donc les élèves handicapés, doit être un objectif transversal. Il est temps pour le GPE d’œuvrer aux côtés de ses partenaires, notamment les gouvernements nationaux, les bailleurs, la société civile, le secteur privé et les fondations, au développement d’un plan d'action correspondant à cette vision.
Lorsque cela se fera, le 3 décembre sera un grand moment de célébration.