Les pays africains doivent assurer un bon retour des filles à l'école après la pandémie de COVID-19

À l’heure des réouvertures d’écoles à travers le continent après les fermetures liées à la pandémie de COVID-19, le Centre international de l'Union africaine pour l'éducation des filles et des femmes en Afrique (UA/CIEFFA) a lancé la campagne #AfricaEducatesHer qui sensibilise aux problèmes qui empêchent les filles et les femmes d'accéder à l'éducation durant la pandémie. C’est également un appel à prendre, dès maintenant, des mesures pour garantir le retour des filles dans les écoles au fur et à mesure qu'elles rouvrent.

21 octobre 2020 par Rita Bissoonauth, African Union International Center for Girls and Women’s Education in Africa
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Des élèves de la Langata West Primary School de Nairobi au Kenya en février 2015. Crédit : GPE/Mediabase
Des élèves de la Langata West Primary School de Nairobi au Kenya. Février 2015.
Credit: Crédit : GPE/Mediabase

Alors que les écoles commencent à rouvrir à travers le continent après la longue période de fermeture due à la crise de la COVID-19, le Centre international de l'Union africaine pour l'éducation des filles et des femmes en Afrique (UA/CIEFFA) voudrait s’assurer que le retour à l'école des jeunes filles se déroule dans de bonnes conditions.

La pandémie de coronavirus a causé des perturbations importantes dans les systèmes éducatifs des États membres de l'Union africaine (UA). De plus en plus de données et de preuves montrent que certaines mesures prises pour assurer la continuité de l'apprentissage durant la pandémie ont en fait aggravé les inégalités liées à l'enseignement et à l'apprentissage.

Des inégalités déjà existantes accentuées par la pandémie

Alors que de nombreux gouvernements à travers l’Afrique se sont tournés vers Internet, la radio et la télévision pour assurer l’apprentissage à distance des élèves pendant la période de fermeture des écoles, l'accès limité à Internet et l’indisponibilité du matériel d’apprentissage, deux éléments essentiels à l'apprentissage à distance, n’étaient pas accessibles à de nombreuses filles.

Déjà avant la pandémie, seuls 17.8 % (en anglais) des ménages en Afrique avaient accès à Internet chez eux (selon l’Union internationale des télécommunications - UIT) et le continent ne représente que 21 % des internautes dans le monde. L'Afrique enregistre également un certain écart numérique entre les sexes (en anglais), avec un taux de pénétration d'Internet de 33,8 % pour les hommes et de seulement 22,6 % pour les femmes en 2019.

Dans un contexte marqué par la COVID-19, cela signifie que de nombreuses filles n'ont tout simplement pas accès aux opportunités d'apprentissage à distance, y compris par voie numérique. En plus d'un accès inégal à la technologie, les fermetures d’écoles exposent les filles à des risques accrus de violence, de mariages et de grossesses précoces, d'exploitation et de travail des enfants.

L'UA/CIEFFA craint que de nombreuses filles ne retournent tout simplement pas dans les écoles au moment de leurs réouvertures.

Ceci est aggravé par l'impact économique de la COVID-19 sur les revenus des ménages, alors que le continent est confronté à la pire récession qu’il ait connu en 25 ans. Les familles étant affectées financièrement, l'expérience montre qu'en période de crise financière, les filles sont les premières à être déscolarisées, mises au travail pour aider à subvenir aux besoins de la famille et s'occuper de leurs frères et sœurs cadets.

Lancement de la campagne #AfricaEducatesHer

C’est dans cet état d’esprit que l'UA/CIEFFA a lancé, le mois dernier, une campagne de sensibilisation aux problèmes qui empêchent les filles et les femmes d'accéder à l'éducation pendant la pandémie de COVID-19. Celle-ci se veut également être un appel à l’action, lancé en direction des jeunes, des éducateurs, des organisations civiques et des Etats-membres de l'UA. Baptisée #AfricaEducatesHer, elle invite les États et les partenaires au développement à agir dès maintenant pour garantir le retour des filles dans les écoles au fur et à mesure qu'elles rouvrent.

Lors du lancement, le Dr Mahama Ouedraogo, directeur du département des ressources humaines, de la science et de la technologie de l'Union africaine, a déclaré :

Nous sommes confrontés à une pandémie mondiale qui, comme jamais auparavant, menace les progrès réalisés par les États membres de l'UA en termes d'accès, de participation et d'achèvement des études aux niveaux du primaire et du secondaire dans le paysage éducatif africain.

Dans le cadre de cette campagne, l'UA/CIEFFA mettra en avant les expériences d’apprentissage des filles des niveaux du primaire, du secondaire et du supérieur pendant la période de fermeture des écoles.

Ils prendront également en compte les recommandations d’élèves, d’éducateurs et de défenseurs des droits humains de toute l’Afrique et de la diaspora africaine sur la manière dont les gouvernements et les partenaires de développement devraient promouvoir et protéger les droits des filles en matière d’éducation en temps de crise.

J'ai rappelé à l'auditoire que l'éducation est un droit humain fondamental et non un privilège, et que les fermetures d'écoles nuisent aux filles à bien des égards, et ont souvent des conséquences sur le long terme.

Une fois que les filles sont déscolarisées, la probabilité qu'elles retournent à l’école est très faible. Cela ne veut pas dire que nous oublions les garçons, mais nous devons garder en tête que les filles sont les plus vulnérables.

Les filles risquent davantage de ne pas retourner à l'école

Comme avec la crise d’Ebola, la pandémie de COVID-19 montre que les fermetures des écoles et des institutions d’éducation en général augmente la vulnérabilité des femmes et des filles.

Les partenaires de développement et les ministères de l'éducation à travers l'Afrique ont salué le leadership de l'UA avec le lancement de la campagne #AfricaEducatesHer.

Une action à l’échelle continentale est nécessaire pour galvaniser toutes les parties prenantes qui travaillent à la sauvegarde du droit des filles à l’éducation et pour stimuler la collaboration et le partage des meilleures pratiques qui favorisent la continuité de l’éducation des filles en Afrique.

Lors du lancement, Justin Sass, Chef de la Section de l’éducation pour l'inclusion et l'égalité des genres à l'UNESCO, a souligné : « Nous devons nous engager avec les enseignants et les directeurs d'école afin qu'ils puissent comprendre ce qui s'est passé pendant les fermetures d'écoles et quelles ont été les épreuves auxquelles les filles ont été confrontées et les défis qu'elles devront relever une fois de retour à l'école. »

Les partenaires de développement comme le Partenariat mondial pour l'éducation, l'UNESCO et le FAWE devront jouer un rôle essentiel en soutenant les efforts des gouvernements et des communautés pour ramener les filles à l'école, notamment à travers un financement de l'éducation plus important et meilleur, et en aidant les pays à améliorer le financement national et à assurer la formation des enseignants.

Alors que les gouvernements sont confrontés à des chocs économiques triples dus à la COVID-19 (baisse des budgets nationaux, réduction du financement des donateurs et aggravation de la pauvreté des ménages), il existe un risque de réduction des budgets alloués à l’éducation, notamment l’éducation des filles.

C’est MAINTENANT le moment d’agir et c’est pourquoi l’UA-CIEFFA soutient le mouvement mondial mené par le GPE qui invite chacun de nous à lever la main pour rappeler aux leaders de ce monde l'importance de #FinancerLéducation, afin que l’éducation des filles reste une priorité en cette période critique et au-delà.

Les États membres de l'UA n'ayant pas encore ratifié et intégré les instruments juridiques régionaux et internationaux qui permettent aux filles d'accéder à l'éducation doivent agir maintenant pour garantir que les décennies de progrès accomplis par le continent en vue de l'autonomisation des filles et des femmes par l'éducation ne se perdent pas ; et que toutes les filles retournent dans les écoles lorsqu’elles rouvriront.

La campagne #AfricaEducatesHer appelle les ministères en charge de l’éducation des États membres à prendre des engagements officiels et à renouveler leur engagement à soutenir et à protéger les droits des filles, en particulier le droit à l’éducation.

Un appel à l’action pour l’éducation des filles après la pandémie de coronavirus

Dans son mot de clôture, le Dr Mahama Ouedraogo a exhorté les participants à travailler ensemble de manière évolutive et innovante au niveau local et communautaire pour atteindre la cible N°4 des Objectifs de développement durable des Nations Unies et l'Aspiration 6 de l'Agenda 2063 de l'UA.

« Nous devons formuler et mettre en œuvre en synergie des stratégies et des initiatives pertinentes qui accordent une attention particulière aux besoins des groupes les plus vulnérables, dont ceux vivant dans des zones reculées, les personnes en situation de handicap et/ou vivant en situation de crise, en particulier les filles et les jeunes femmes, notamment pendant la conception des programmes de remise à niveau ses apprenants lors de la reprise », a-t-il dit.

L'UA/CIEFFA a également annoncé un appel à soumission de contenus créatifs invitant les filles, les élèves, défenseurs des droits humains et enseignants africains à soumettre des vidéos, des articles de blog, des poèmes, des photos et des œuvres musicales présentant leurs expériences d'apprentissage ou d'enseignement durant la pandémie de COVID-19 et les initiatives qu'ils mettent en œuvre pour s’assurer que les filles de leurs communautés retournent à l'école.

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