Il y a environ 40 ans, Haïti n’était pas un sujet récurrent de l'actualité internationale. En 1980, 80 % des 5,5 millions de Haïtiens vivaient dans des zones rurales, sans grande possibilité de réclamer l’accès aux services publics, que ce soient les écoles, les hôpitaux ou la justice.
En 2024, Haïti est une nation de 12 millions d’habitants, dont 60 % vivent dans des villes et des bidonvilles sans accès à des services publics efficaces. Comptant moins de 10 000 policiers (1 pour 1 200 habitants) et sans véritable force armée, Haïti a vu sa situation sécuritaire se dégrader ces dernières années.
L'augmentation de la population urbaine, mieux informée et plus politisée, accroît la demande et la pression qui s'exercent en faveur d'un accès aux services sociaux de base, d'une plus grande participation citoyenne et de meilleures conditions de vie.
Un capital humain sous-exploité
L'incapacité du pays à tirer profit de son dividende démographique constitue l’élément le plus crucial. 70 % de la population a moins de 35 ans, mais chez les jeunes, le taux de chômage avoisine les 40 %. Ce n'est pas un fardeau, mais un véritable potentiel qui n'attend qu'à être exploité.
Malheureusement, ce qui aurait dû constituer un atout est devenu une bombe démographique, non pas parce que le pays est surpeuplé, mais parce qu'il y a une pénurie d'emplois et de travailleurs qualifiés dotés des compétences requises pour le monde du 21e siècle.
Aujourd'hui, des millions de jeunes sont dépourvus de véritables qualifications et n'ont pas bénéficié d’une éducation de qualité capable de leur transmettre les valeurs de la paix et l'intérêt d'avoir une formation. C'est toute une génération de potentiels entrepreneurs qui est devenue vulnérable. Ces jeunes constituent le principal vivier de recrutement des gangs armés qui terrorisent la population et sèment l'insécurité dans le pays.
Ce gaspillage du capital humain représente l'une des premières sources d'instabilité des 50 dernières années. La situation empêche également l'économie de croître, un développement qui pourrait amener le progrès social dont Haïti a besoin.
Au beau milieu de cette crise politique et institutionnelle, outre une grande vulnérabilité face aux catastrophes naturelles et à la violence des gangs, l'économie s'est contractée pendant cinq années consécutives. Le système éducatif haïtien a été ébranlé après la pandémie de COVID-19, et a entraîné la désertion des enseignants qualifiés.
Bien que le taux net de scolarisation ait considérablement augmenté pour se hisser à 90 % ces 25 dernières années, plus de 30 % des élèves décrochent après les 6 premières années d'école primaire. Seuls 10 % achèvent le secondaire.
Le secteur de l'éducation a besoin de soutien pour aider le pays à se remettre sur les rails
Aujourd'hui, Haïti cherche à maintenir des millions de jeunes scolarisés. Mais, ceux-ci décrochent avant d'obtenir une véritable qualification, sans apprendre la valeur de la paix ni acquérir les compétences nécessaires pour devenir une génération d'entrepreneurs.
Le nouveau plan sectoriel décennal de l’éducation vise à transformer le système éducatif, grâce à la mise en place d'un nouveau programme qui cherche à limiter l'échec et le décrochage scolaires.