Ceci est le douzième billet d’une série de collaborations entre le Partenariat mondial pour l’éducation (GPE) et l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA)
La Journée internationale de la paix – journée dédiée au renforcement des idéaux de paix, au sein des nations et des peuples et entre eux - est célébrée partout dans le monde le 21 septembre. En cette année 2017, le thème choisi est le suivant : « Ensemble pour la paix : respect, sécurité et dignité pour tous. »
Au cœur de la paix, l’éducation est, comme le disait l’ancien Secrétaire-Général de l’ONU, « tout simplement un autre terme pour désigner la consolidation de la paix. »
De nos jours, ce sont des conflits violents qui sont à l’origine des plus grandes difficultés de développement dans le monde. Or les enfants et les systèmes éducatifs se trouvent souvent en première ligne de ces conflits violents. La montée d’un extrémisme et d’une radicalisation violents représente une grande menace pour nous tous. Les membres de groupes radicaux adoptent des idéologies politiques, économiques, sociales, culturelles et religieuses de plus en plus extrêmes et utilisent la violence pour atteindre leurs objectifs. Les pays africains sont également confrontés à la difficulté que représente le traitement objectif des causes structurelles des conflits, profondément ancrées et émanant d’injustices historiques, de marginalisation et de corruption.
L’éducation peut-elle se montrer à la hauteur ?
L’éducation transmet les connaissances, les compétences, les valeurs et les attitudes essentielles au développement social, économique et politique de tout pays. Ce rôle est bien articulé dans l’Objectif de développement durable 4 (ODD 4), qui cherche à assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité et à promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie.
En outre, la cible ODD 4.7 consiste quant à elle à faire en sorte que tous les élèves acquièrent les connaissances et compétences nécessaires pour promouvoir le développement durable, notamment par l’éducation en faveur du développement et de modes de vie durables, des droits de l’homme, de l’égalité des sexes, de la promotion d’une culture de paix et de non-violence, de la citoyenneté mondiale et de l’appréciation de la diversité culturelle et de la contribution de la culture au développement durable.
L’éducation : une arme à double tranchant
Si l’éducation est essentielle pour la consolidation de la paix, il importe de noter qu'elle comporte une double caractéristique. Des données probantes montrent en effet que lorsque l’éducation offre un accès équitable, qu’elle est de bonne qualité, pertinente et prend en compte les conflits, elle permet de promouvoir la paix et offre des environnements sécurisés. En revanche, lorsque les services éducatifs sont caractérisés par l’exclusion et l'inégalité, l’éducation peut alors exacerber les conflits. C’est pour cette raison que des efforts délibérés sont nécessaires pour mettre en place les politiques et stratégies requises afin d’optimiser les effets positifs de l’éducation sur la paix.
La Stratégie continentale 2016 – 2025 de l’éducation pour l’Afrique (CESA 2016 - 2025) embrasse ainsi un changement de paradigme en termes de politiques et de planification de l'éducation afin d'adopter « de nouvelles approches » en faveur de la promotion de la paix sur le continent.
L’éducation doit ainsi prendre en compte le contexte, notamment en cas de conflit ou de catastrophe, et tenir compte des disparités, notamment en termes d’équité.Quel type d’éducation pour relever ce défi ?
L'élaboration de politiques et de plans de l'éducation prenant en compte les conflits est une des principales interventions permettant de promouvoir la paix par l’éducation. Il s’agit alors d'entreprendre une analyse du conflit dans les systèmes, les structures et la prestation des services éducatifs pour identifier les moteurs de conflit ou de violence, ainsi que leur dynamique, dans le but d'élaborer une intervention concrète et réaliste susceptible de mobiliser les capacités de paix grâce à l'éducation.
Un changement de paradigme doit s’opérer en faveur de programmes encourageant la réalisation du potentiel d’un individu au maximum et le développement optimal du capital humain.
Les compétences des jeunes doivent être développées en vue du marché de l’emploi, sans quoi ceux-ci finiront par être exclus d'une participation active dans la société à laquelle ils appartiennent.
Sur le continent, les évolutions actuelles en faveur de la paix et de la citoyenneté mondiale sont notamment l’adoption de modèles de programmes permettant des voies flexibles pour développer les capacités et talents de tous les apprenants ; améliorer l'efficacité de la prestation des services éducatifs et la réduction du gaspillage à tous les niveaux.
Il est ainsi nécessaire de passer d’une éducation basée sur le contenu à une éducation basée sur la compétence, d’évaluations sommatives à des évaluations qui le sont moins. Il est également nécessaire de s’éloigner d’un enseignement et de ressources d’apprentissage basés sur le contenu pour se tourner vers des types d’exercices interactifs basés sur une activité.
Il est impératif d’adopter une pédagogie transformative telle que l'apprentissage dialogique, actif, reposant sur les interrogations et engagé, sur la base des intérêts du contexte et de l'apprenant. L’apprenant est donc au centre du processus d’apprentissage et a la possibilité d’explorer, de dialoguer, découvrir de nouveaux savoirs, réfléchir, et est poussé à agir.
Le programme scolaire et les services éducatifs doivent être conçus de sorte qu’ils sont culturellement et économiquement pertinents pour les contextes locaux, en se focalisant particulièrement sur les minorités, les nomades et autres communautés mobiles, tout en développant des opportunités d'apprentissage pour les jeunes et adolescents marginalisés et à risque.
Les difficultés
- Le manque de capacité des ministères de l’éducation à traduire les politiques et engagements en action et à former des partenariats souhaitables, tant au niveau national qu’au niveau de l'établissement scolaire.
- Des investissements dans l’éducation inappropriés pour satisfaire aux exigences du 21ème.
- Le manque de capacité des enseignants pour proposer un enseignement adoptant une pédagogie transformative.
- Un corps enseignant mal payé et démotivé.
Appel à l’action
Nous appelons les gouvernements africains à :
- Réviser et améliorer les programmes d’enseignement afin de veiller à ce qu'ils prennent en compte le contexte, notamment en cas de conflit et de catastrophe, et tiennent compte des disparités, notamment en termes d’équité.
- Développer des politiques éducatives tenant compte des situations de conflit et adapter la pédagogie.
- Traiter les problèmes liés à la violence structurelle, la marginalisation et l’exclusion sociale.