2015 pourrait être une date historique pour l’homme. L’année où tous les gouvernements du monde fixeraient une échéance à leur engagement de longue date d’éliminer la pauvreté extrême, celle où ils conviendraient d'un nouveau cadre de développement à l’échelle mondiale pour garantir qu’aucun enfant ne meure inutilement, que chaque enfant soit protégé de la violence et puisse exercer son droit à une éducation gratuite et de qualité qui lui permette un véritable apprentissage.

Depuis qu’ils ont été fixés au tournant du siècle, les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et ceux de l’Éducation pour tous (EPT) sont d’importants catalyseurs de progrès sur la voie de l’accès garanti à l’éducation.  Comparé à la situation en 2000, 45 millions d’enfants sont désormais scolarisés à l’école primaire et l’égalité des sexes s’est nettement améliorée. 

On observe cependant, parallèlement à une scolarisation croissante en primaire, une crise de l’apprentissage, avec 250 millions d’enfants en 4e année de primaire incapables de lire, écrire ou faire les calculs de base. Ce sont les plus marginalisés, c’est-à-dire les enfants les plus pauvres et ceux qui vivent dans des zones touchées par les conflits, qui sont les plus vulnérables à la déscolarisation ou, s'ils sont scolarisés, à l’apprentissage le plus sommaire.

Le nouveau cadre post-2015 doit donc passer à l’étape supérieure de cette promesse de l'Éducation pour tous et parachever l’œuvre initiée par les programmes des OMD et de l’EPT, mais en se concentrant explicitement sur l'apprentissage et l'égalité.

Il doit être audacieux, engageant et ambitieux, et galvaniser la communauté internationale afin qu'elle agisse de façon focalisée et coordonnée pour scolariser tous les enfants, quel que soit le contexte, y compris en cas de conflit ou d'urgence. L’objectif est de garantir à chaque enfant l’opportunité de s’épanouir et de développer tout son potentiel dans la vie.

Un nouveau rapport de Save the Children

Le mois dernier, Save the Children a publié un nouveau rapport, Framework for the Future, qui présente notre vision d’un cadre capable d'atteindre de tels objectifs. Nos propositions comprennent douze objectifs concrets, intégrés avec des cibles associées qui, si elles sont atteintes, pourrait mettre fin à l’extrême pauvreté en une génération.

Ces objectifs sont réalisables mais ambitieux. Comme nous l’avons démontré dans de précédentes recherches, ceux-ci ne seront pas atteints à moins que la communauté internationale ne se saisisse de la lutte contre les inégalités persistantes qui maintiennent des enfants pris au piège de la pauvreté. Il s’agira de donner un sérieux coup de fouet à la responsabilisation des gouvernements, de bâtir des partenariats justes et solides en vue du développement et d'assurer un financement adéquat quel que soit le contexte, même dans les situations d’urgence.

La reconstitution des ressources du Partenariat mondial pour l’éducation est cruciale

Le Partenariat mondial pour l’éducation (GPE) peut jouer un rôle précieux en apportant des solutions au manque de financement et en répondant à la crise de l'apprentissage pour tous les enfants. Une solide reconstitution des ressources est une étape critique afin de susciter un large soutien pour un programme d’apprentissage équitable au-delà de 2015. Cependant, une augmentation des fonds ne suffit pas.

Tenir la promesse d’une éducation universelle de qualité va nécessiter des actions ciblées, et des financements ciblés, pour toucher les enfants les plus démunis, ceux qui ont un handicap, les filles, les enfants des minorités ethniques et ceux qui vivent dans des pays touchés par les conflits ou les situations d'urgence.  

Pour soutenir les avancées à l’échelle mondiale sur la voie d’un développement plus rapide et plus durable, Save the Children fait des recommandations spécifiques de lutte contre les inégalités :

• Désagréger les cibles selon le sexe, l’âge, l’appartenance ethnique, la localisation et le revenu. Les OMD ont prouvé que le fait de n’avoir aucun objectif éducatif ne fonctionnait pas pour traiter des inégalités en termes d'opportunités éducatives. Le cadre post-2015 doit répondre à cet échec.

Le Partenariat mondial pour l’éducation est bien placé pour mener une révolution des données, y compris en garantissant la désagrégation des données sur l’accès et les résultats d’apprentissage afin de mieux appréhender et répondre aux besoins des enfants les plus marginalisés et vulnérables.

Bien qu’importante, la simple désagrégation des données ne suffit pas, à moins qu'elle informe de façon explicite les stratégies sectorielles de l’éducation et leur financement. Le Partenariat mondial s'est fixé le but suivant : d'ici 2018, 90 % des pays en développement partenaires auront effectué une analyse des questions d’égalité et pourront produire des rapports d’avancement, et 80 % des pays en développement partenaires auront adopté des politiques explicites et une législation sur l’éducation des élèves en situation de handicap.

• Des cibles « tremplins » pour réduire de manière significative les différences entre les groupe favorisés et défavorisés. Dans le domaine de l’éducation, il s’agit de cibles permettant de réduire les différences en termes de développement de la petite enfance et d’apprentissage entre les riches et les pauvres. Les enfants vivant dans les milieux pauvres sont constamment et substantiellement défavorisés par rapport aux enfants de familles plus aisées, et ceci se traduit fortement eu égard à l'apprentissage concret. Les pays devraient adopter des cibles tremplins dans leurs plans de mise en œuvre nationaux, sur la base d'une analyse participative soigneuse des dimensions les plus répandues en termes d’inégalités et des obstacles que celles-ci représentent sur la voie des objectifs éducatifs post-2015. 
   
• Il est nécessaire de ne considérer un but atteint que lorsqu’il l’est pour tous les groupes sociaux et groupes de revenu, y compris les populations autochtones, les minorités ethniques, les migrants, les individus en situation de handicap, les enfants des pays touchés par les conflits ou en situation d’urgence et ceux vivant dans la pauvreté. Cette proposition a d’abord été avancée l’an dernier par le Groupe de personnalités de haut niveau du Secrétaire-Général de l'ONU sur le programme post-2015.

Tandis que commencent à se dessiner les contours des Objectifs de développement durable du Groupe de travail ouvert (GTO) des Nations unies, les gouvernements doivent s’engager à garantir la scolarisation et l’apprentissage de tous les enfants, dans tous les contextes. Les résultats de la Reconstitution des ressources du Partenariat mondial, les négociations du GTO et la réunion mondiale de l’Éducation pour tous au sultanat d’Oman pourraient marquer un tournant décisif en déterminant si le nouveau cadre répondra à ses objectifs, sera capable d’inspirer et de rassembler la communauté internationale.

Le temps est venu d’un leadership visionnaire et audacieux pour bâtir un cadre solide pour l'avenir, qui soit capable de concrétiser le droit universel d'apprendre, et de mettre fin, une bonne fois pour toutes, à l'extrême pauvreté.