Éssayez un instant de vous imaginer ceci : vous n'êtes plus en sécurité dans votre pays d'origine du fait d’un conflit, de violences ou de persécutions que vous subissez. Vous rassemblez votre famille et passez la frontière pour rejoindre un pays voisin qui vous offre une protection internationale.
Peut-être avez-vous vu cela venir et avez-vous eu la clairvoyance de rassembler les documents nécessaires pour prouver votre identité et celle des membres de votre famille, ainsi que vos qualifications et votre parcours jusqu’ici. Peut-être n’avez-vous pas eu le luxe de disposer d’assez de temps pour tout cela. Parmi les choses que vous avez laissées derrière vous : votre maison, votre gagne-pain, votre famille élargie et vos amis, vos possibilités d’accès à des services sociaux tels que l'école, votre sentiment d'appartenance.
Dans le pays qui vous accueille désormais, le gouvernement ou le HCR vous fournit les « services de bases » : un abri, l’accès à l'eau et à l'assainissement, des services de santé d'urgence, de la nourriture. Dès que vous en bénéficiez, les autres services de bases manquants tels que l’éducation de vos enfants deviennent évidents. Si vous poursuivez toujours vous-même vos études, cela inclut peut-être également votre éducation à vous aussi.
L'éducation, un besoin fondamental pour les réfugiés
L'éducation ne peut pas être assurée dans un centre de distribution. Elle doit être planifiée, coordonnée, budgétisée, mise en œuvre, contrôlée et certifiée pour en garantir la transférabilité. Dans les contextes de crise, elle doit prendre en compte les problèmes sociaux et émotionnels qui affectent l'apprentissage des élèves déplacés et ceux des communautés hôtes.
Dans les milieux ruraux en particulier, l’éducation devrait tenir compte du fait que les élèves et les enseignants (tant ceux issus des communautés hôtes que les déplacés) peuvent ne pas comprendre ou être familier avec l’usage des langues d'enseignement telles que l'arabe, l'anglais, le français ou le portugais. Elle doit prendre en considération le fait que des apprenants n’ayant pu étudier pendant des années ou n’ayant jamais eu accès à l'éducation nécessitent qu’on mette en place, pour eux, des programmes d’apprentissage accélérés, des programmes de remise à niveau ou tout autre type de programmes adaptés. Elle doit également tenir compte et répondre aux besoins d'apprentissage des élèves handicapés, qui sont très souvent aggravés par le déplacement auquel ils ont été contraints.
La communauté internationale ne peut feindre d’ignorer le défi de plus en plus important que représente la situation des réfugiés
L’on s’accorde de plus en plus sur le fait que la communauté internationale doit soutenir de manière plus efficace et stratégique les gouvernements pour qu'ils assurent l’éducation des populations déplacées. Le Pacte mondial sur les réfugiés de 2018 a fixé un objectif ambitieux : [celui de faire en sorte] que les gouvernements soient en mesure d'inclure les enfants et les jeunes réfugiés dans les systèmes éducatifs nationaux dans les trois mois suivant leur déplacement.
On note une augmentation constante tant des déplacements internes que des déplacements des réfugiés. Entre 2005 et 2010, les déplacements de population ont augmenté de 109 %. Entre 2010 et 2019, cette augmentation est montée jusqu’à 165 %, avec près de 80 millions de personnes déplacées enregistrées. Un pour cent de la population mondiale - soit 1 personne sur 97 - est désormais déplacée de force (en anglais). La durée des déplacements des personnes réfugiées est également de plus en plus longue, avec en moyenne au minimum 25 000 personnes réfugiées de la même nationalité qui restent en exil pendant au moins cinq années consécutives dans un pays d'accueil donné. Le HCR estime (en anglais) que 15,7 millions de réfugiés (77 %) se trouvaient dans une situation de déplacement prolongé fin 2019.