Comment la société civile fait progresser le programme de l’ODD 4 aux niveaux mondial, régional et national

En savoir plus sur les nombreux échanges et réunions qui ont lieu pour identifier les défis et opportunités communs pour la société civile dans la réalisation de l'ODD 4.

06 novembre 2019 par Mame Codou Dieng Cisse, ANCEFA, Wolfgang Leumer, Global Campaign for Education, et Julia Sestier, Global Campaign for Education
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Lecture : 6 minutes
Les participants à une réunion interrégionale en Afrique du Sud. Crédit: GCE
Credit: GCE

L’Association Asie-Pacifique Sud pour l’éducation de base et l’éducation des adultes (ASPBAE) a également contribué à ce blog.

À travers le Mouvement, les axes et les priorités peuvent varier en fonction des contextes régionaux et nationaux. Les réunions régionales et interrégionales sont alors l’occasion d’identifier les domaines d’intérêt stratégique communs et d’en savoir plus sur les priorités et l’expertise spécifiques de chacun.

La Campagne mondiale pour l'éducation (CME) a été très occupée ces derniers mois car notre Fonds de la société civile pour l'éducation (FSCE) ainsi que des coalitions régionales membres, le Réseau africain de la campagne d'éducation pour tous (ANCEFA) et le Bureau Asie-Pacifique Sud pour l’éducation des adultes (ANCEFA) and the Asia South Pacific Association for Basic and Adult Education  (ASPBAE), ont organisé des réunions avec leurs membres et partenaires mondiaux, notamment le Partenariat mondial pour l’éducation (PME) dans leurs régions respectives.

Puis cela s’est poursuivi par une réunion interrégionale organisée par le Secrétariat mondial de la CME rassemblant les organisations régionales susmentionnées, ainsi que de la Campagne arabe pour l'éducation pour tous (ACEA) et de la Campagne latino-américaine pour le droit à l'éducation (CLADE).

Ces journées d’échange et d’engagement ont permis d’identifier les opportunités et les défis communs auxquels la société civile est confrontée pour réaliser l’ODD 4, avec des thèmes transversaux tels que le financement de l’éducation et des préoccupations concernant la réduction de l’espace de la société civile et le maintien du droit à l’éducation dans les situations d’urgence.

Programme de l'ODD 4 difficile à réaliser

Pousser le programme de l'ODD 4 et promouvoir le droit à une éducation publique gratuite et de qualité pour tous reste le fil conducteur, tout en mettant l'accent sur l'inclusion et la qualité. Pourtant, des problèmes subsistent comme le soulignent de nombreux rapports.

En Afrique, les difficultés d'accès à l'éducation pour les groupes marginalisés persistent et cela a été mis en évidence par le biais de discussions et de présentations d'exemples concrets d'activités visant à renforcer le plaidoyer en faveur d'une éducation inclusive.

La qualité de l'enseignement a également été identifiée comme un problème majeur, directement lié à au manque important d'enseignants qualifiés. En Afrique subsaharienne, seulement 64 % des enseignants du primaire et 50 % des enseignants du secondaire ont bénéficié de la formation minimale requise. Ce taux est le plus bas de l'Afrique subsaharienne, où un professeur est responsable en moyenne de 60 élèves, selon le Rapport mondial de suivi sur l'éducation de l'UNESCO (GEM) 2019.

Des participants à une réunion régionale au Sénégal. Crédit : ANCEFA

Les membres de l’ASPBAE ont décrit des difficultés similaires pour la réalisation de l'ODD 4 dans leurs contextes respectifs. Parmi elles figurent la difficulté d'assurer l'équité et l'inclusion des personnes handicapées, des minorités ethniques et des migrants. La violence sexiste en milieu scolaire a également été reconnue comme un problème crucial dans de nombreuses zones.

Aux Philippines, par exemple, E-Net, avec ses réseaux alliés et ses membres ayant une incapacité, a fait pression avec succès auprès du Parlement et du ministère de l’Éducation pour inclure l’allocation de 50 millions PhP (1 million de dollars) dans le budget national de 2019 visant à l'achat et l’élaboration de manuels scolaires et autres matériels didactiques destinés aux enfants handicapés (spécialement pour les enfants sourds, muets et aveugles) et 25 millions PhP (500 000 dollars) pour le renforcement des capacités des enseignants des écoles publiques en matière de promotion des droits, de l'inclusion et du respect de l'enfant, et de la discipline positive dans l’exercice quotidien de l’enseignement.

Tout cela s’inscrit dans la poursuite du plaidoyer d'E-Net Philippines en faveur d’une éducation inclusive et équitable. E-Net et le cluster de personnes handicapées collaborent actuellement avec différentes unités du ministère de l’Éducation à l’élaboration de matériels d’apprentissage appropriés.

De même, en Mongolie, la coalition AFE a réussi à faire adopter par le gouvernement une nouvelle loi sur l’enseignement bilingue, qui cible spécifiquement la minorité Kazahk pour qui le taux d’abandon scolaire est élevé en raison de la difficulté à maîtriser la langue d’enseignement.

Grâce à cette loi, la coalition espère faire en sorte que l’enseignement se fasse dans la langue maternelle pendant les premières années de la scolarité. La Coalition est également fortement impliquée dans le groupe local des partenaires de l’éducation (GLPE) et a participé activement au processus d'examen de la mise en œuvre du secteur de l'éducation, entre autres engagements politiques.

Pour CLADE en Amérique latine, l’un des principaux problèmes constitue à surmonter les obstacles structurels à la réalisation d’une éducation inclusive de qualité pour tous, à savoir la discrimination raciale et ethnique, et en particulier à l’égard des populations autochtones, ainsi que la discrimination fondée sur le sexe et la violence contre les femmes.

L'éducation dans les situations d'urgence : une préoccupation croissante

« Pour l'ACEA, l'éducation dans les situations d'urgence est au centre des travaux de la région arabe depuis un certain temps » a expliqué Fotouh Younes, de l'ACEA, lors de la réunion interrégionale de Johannesburg. L’Égypte, la Palestine, la Somalie et la Syrie sont directement touchées par les conflits et d’autres pays sont entourés de diverses crises et connaissent un afflux massif de réfugiés.

L'inclusion et la non-discrimination sont envisagées du point de vue de l'éducation dans les situations d'urgence, de même que le financement de l'éducation. Une question clé consistait à savoir comment garantir la disponibilité de fonds pour résoudre les problèmes d'inclusion dans les situations d'urgence.

Lors de situations de crise, l'éducation n'est pas une priorité dans les budgets des gouvernements, alors que l'accès des réfugiés à l'éducation est désastreux : selon le HCR, 61 % des enfants réfugiés fréquentent l'école primaire, contre 92 % en moyenne dans le monde. Au niveau secondaire, ce chiffre tombe à 23 %, comparé à 84 % dans le monde et seulement 1 % des réfugiés vont à l’université, contre 37 % des étudiants dans le monde.

L'insécurité constitue également une préoccupation croissante en Afrique. En effet, les conflits internes et les attaques terroristes qui entraînent des déplacements de population nuisent considérablement aux résultats en matière d’éducation. Les menaces contre les enseignants, les attaques contre les infrastructures scolaires et l'utilisation des écoles à des fins militaires ont perturbé l'éducation de plus de 400 000 enfants en Afrique de l'Ouest et contraint plus de 10 000 enseignants à quitter leur emploi.

Lors d'un meeting régional au Vietnam. Crédit : ASPBAE

L'évolution rapide des situations politiques et la crise qui sévit dans plusieurs pays ont également eu un impact négatif sur l'éducation en Asie et dans le Pacifique, l'ASPBAE ayant de plus en plus besoin de se concentrer sur l'éducation dans les situations d'urgence.

Nani Zulminarni, présidente de l'ASPBAE et directrice de PEKKA (Programme d'autonomisation des femmes chefs de famille) a mis l'accent sur la question de l'éducation tenant compte de la problématique hommes-femmes dans les situations d'urgence et de crise.

La Coalition afghane pour l'éducation nationale (ANEC) a discuté de la création du groupe de travail sur l'éducation dans les situations d'urgence (EiEWG), qui s'emploie activement à y améliorer les services d'éducation.

En Amérique latine, la crise s'articule autour de conflits sociaux et de menaces à la participation des citoyens. CLADE se concentre donc sur le renforcement de la démocratie en approfondissant les aspects civiques de l’éducation, en promouvant les débats et les discussions politiques et en approfondissant la collaboration avec les mouvements sociaux d’autres secteurs. Une approche intersectorielle est nécessaire pour contrer la tendance croissante à la criminalisation de la dissidence, à la répression des militants et à la militarisation des écoles.

Le financement de l'éducation : une priorité transversale

Le financement de l'éducation reste une priorité essentielle à tous les niveaux et dans toutes les régions.

Au cours de la réunion régionale d’ANCEFA, une séance de renforcement des capacités sur le financement de l’éducation et les questions connexes de privatisation a confirmé la position d’ANCEFA, alignée sur celle de la CME, en faveur du renforcement de l’éducation publique et contre la privatisation et la marchandisation généralisées de l’éducation.

Lors de la réunion ASPBAE, plusieurs facteurs ont été identifiés pour évaluer les tendances en matière d'implication du secteur privé, à savoir l'assiette fiscale nationale, la crise croissante de la dette, en particulier les dettes illégitimes ou accumulées de manière non transparente, la politique de gestion de la masse salariale du FMI et le financement public/l’aide allouée aux prestataires d’enseignement à but lucratif. Comme l’a déclaré David Archer d’ActionAid International lors des consultations régionales de l’ASPBAE, « le Partenariat mondial pour l’éducation est une plateforme très utile qui peut être utilisée pour susciter des discussions politiques favorables à l’éducation en tant que service public. ».

En effet, le PME a adopté une Stratégie de collaboration avec le secteur privé qui réaffirme son engagement en faveur de l'éducation en tant que bien public et droit humain fondamental.

Transition vers L’éducation à voix haute

Lors d'un meeting régional au Vietnam. Crédit : ASPBAE

Les réunions comprenaient une séance visant à préparer la clôture du Fonds de la société civile pour l'éducation (FSCE) et à maintenir un engagement fort avec le PME, en particulier par le biais de la représentation des organisations de la société civile au sein du Conseil et des Comités du PME et du nouveau fonds L’Éducation à voix haute. Le PME, Oxfam Ibis, qui gère L’Éducation à voix haute pour le compte du PME, et la CME ont discuté de cette nouvelle possibilité de financement avec des coalitions de l’éducation et ont expliqué les attentes des deux côtés.

Ces échanges ont réaffirmé que la CME restait plus que jamais ancrée dans les réseaux régionaux et les coalitions nationales tels que définis dans le Plan stratégique 2019-2022 de la CME, qui apporte une valeur ajoutée indéniable aux efforts de plaidoyer aux niveaux national, régional et mondial.

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