Edwin Ikhuoria est le directeur exécutif de l'ONG ONE pour l'Afrique.
1. La COVID-19 a poussé jusqu'à 115 millions de personnes dans l'extrême pauvreté et a imposé à l'Afrique subsaharienne sa première récession en un quart de siècle, la plaçant sous la menace d’une crise de la dette imminente. Quelles sont les actions clés que les leaders mondiaux doivent prendre pour assurer une reprise équitable à l’échelle mondiale ?
Alors que les pays du G20 ont maintenu leur économie à flot grâce à des plans de relance d’un montant total de près de 19 % du PIB mondial, nous avons pu voir que les pays africains n’ont pas cette même force frappe, leurs dépenses équivalant à moins de 2 % de ce PIB. La pandémie a réduit leur pouvoir d'achat en raison de la baisse des revenus, et accru leur vulnérabilité aux crises de la dette.
Pour se remettre de la pandémie, l'Afrique doit combler un déficit de financement d'environ 345 milliards de dollars américains au cours des 3 prochaines années. Les leaders mondiaux doivent aider les dirigeants africains à libérer plus de ressources, notamment à travers l'émission et la redistribution de droits de tirage spéciaux (DTS) d'une valeur de 650 milliards de dollars, et par la prolongation de l'Initiative de suspension du service de la dette (en anglais) jusqu'à au moins fin 2021.
2. Comment les dirigeants africains peuvent-ils, dans le cadre de leurs plans de relance, maximiser les dépenses dans des secteurs prioritaires comme l'éducation de qualité pour améliorer son impact sur la santé, la sécurité alimentaire et la croissance verte, afin que les économies puissent mieux se reconstruire ?
Bien que la pandémie ait coûté la vie à des centaines de milliers de personnes sur le continent aujourd'hui, une éducation de mauvaise qualité menace également l'avenir de millions de personnes. Nous ne pouvons pas nous sacrifier pour répondre à la crise aujourd’hui au prix d’un avenir catastrophique.
Investir dans l'éducation est essentiel pour accélérer la reprise et le progrès dans chaque pays. Pour éradiquer la pauvreté et la faim, améliorer la santé, former une main-d'œuvre qualifiée, protéger notre planète et reconstruire une société plus inclusive et pacifique, chaque individu doit avoir accès à une éducation de qualité.
Les gouvernements africains peuvent maximiser l'impact de leurs dépenses destinées à stimuler l'éducation. Pour cela, ils devraient identifier les besoins spécifiques à chaque contexte, fixer des objectifs politiques clairs et des seuils pour mesurer les progrès, intégrer les budgets de l'éducation pour atteindre des objectifs écologiquement durables et établir un mécanisme transparent pour suivre la mise en œuvre des politiques et des programmes.
Les entités publiques doivent lancer des appels d'offres qui mettent l'accent sur les performances ou les résultats qu'elles recherchent et veillent à ce que les multiples parties prenantes soient pleinement associées aux processus de formulation et d'exécution du budget.
3. Selon la Banque mondiale et l'UNESCO, les deux tiers des pays à faible revenu et des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (sur la base des données disponibles) ont réduit leur budget de l'éducation depuis le début de la pandémie. Dans un tel contexte, quel rôle jouent des mouvements mondiaux comme ONE pour mener des actions politiques en vue de protéger l'éducation dans les budgets nationaux ?
ONE et d'autres organisations jouent ce rôle essentiel qui consiste à mobiliser des voix et mettre en lumière la crise mondiale de l'apprentissage et la façon dont un financement efficace et équitable peut aider à changer la donne. Nous amplifions les voix des citoyens et tenons les gouvernements responsables de protéger les budgets alloués à l'éducation.
En utilisant des produits et des canaux créatifs, nous mettons en lumière l'urgence de la crise mondiale de l'apprentissage. Nous soutenons également les efforts des gouvernements à défendre cette cause et amener les autres pays à répondre et à protéger également leur budget de l'éducation.