5 raisons d’investir plus de 5 milliards de dollars : entretien avec Edwin Ikhuoria

Dans le cadre de sa campagne de financement qui vise à collecter au moins 5 milliards de dollars sur cinq ans pour transformer l'éducation de près d'un milliard d'enfants dans 90 pays et territoires, le GPE a posé 5 questions à Edwin Ikhuoria sur le pouvoir de l'éducation. Voici ses réponses.

22 avril 2021 par Secrétariat du GPE
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Lecture : 4 minutes
5 raisons d’investir plus de 5 milliards de dollars : entretien avec Edwin Ikhuoria

Edwin Ikhuoria est le directeur exécutif de l'ONG ONE pour l'Afrique.

1. La COVID-19 a poussé jusqu'à 115 millions de personnes dans l'extrême pauvreté et a imposé à l'Afrique subsaharienne sa première récession en un quart de siècle, la plaçant sous la menace d’une crise de la dette imminente. Quelles sont les actions clés que les leaders mondiaux doivent prendre pour assurer une reprise équitable à l’échelle mondiale ?

Alors que les pays du G20 ont maintenu leur économie à flot grâce à des plans de relance d’un montant total de près de 19 % du PIB mondial, nous avons pu voir que les pays africains n’ont pas cette même force frappe, leurs dépenses équivalant à moins de 2 % de ce PIB. La pandémie a réduit leur pouvoir d'achat en raison de la baisse des revenus, et accru leur vulnérabilité aux crises de la dette.

Pour se remettre de la pandémie, l'Afrique doit combler un déficit de financement d'environ 345 milliards de dollars américains au cours des 3 prochaines années. Les leaders mondiaux doivent aider les dirigeants africains à libérer plus de ressources, notamment à travers l'émission et la redistribution de droits de tirage spéciaux (DTS) d'une valeur de 650 milliards de dollars, et par la prolongation de l'Initiative de suspension du service de la dette (en anglais) jusqu'à au moins fin 2021.

2. Comment les dirigeants africains peuvent-ils, dans le cadre de leurs plans de relance, maximiser les dépenses dans des secteurs prioritaires comme l'éducation de qualité pour améliorer son impact sur la santé, la sécurité alimentaire et la croissance verte, afin que les économies puissent mieux se reconstruire ?

Bien que la pandémie ait coûté la vie à des centaines de milliers de personnes sur le continent aujourd'hui, une éducation de mauvaise qualité menace également l'avenir de millions de personnes. Nous ne pouvons pas nous sacrifier pour répondre à la crise aujourd’hui au prix d’un avenir catastrophique.

Investir dans l'éducation est essentiel pour accélérer la reprise et le progrès dans chaque pays. Pour éradiquer la pauvreté et la faim, améliorer la santé, former une main-d'œuvre qualifiée, protéger notre planète et reconstruire une société plus inclusive et pacifique, chaque individu doit avoir accès à une éducation de qualité.

Les gouvernements africains peuvent maximiser l'impact de leurs dépenses destinées à stimuler l'éducation. Pour cela, ils devraient identifier les besoins spécifiques à chaque contexte, fixer des objectifs politiques clairs et des seuils pour mesurer les progrès, intégrer les budgets de l'éducation pour atteindre des objectifs écologiquement durables et établir un mécanisme transparent pour suivre la mise en œuvre des politiques et des programmes.

Les entités publiques doivent lancer des appels d'offres qui mettent l'accent sur les performances ou les résultats qu'elles recherchent et veillent à ce que les multiples parties prenantes soient pleinement associées aux processus de formulation et d'exécution du budget.

3. Selon la Banque mondiale et l'UNESCO, les deux tiers des pays à faible revenu et des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (sur la base des données disponibles) ont réduit leur budget de l'éducation depuis le début de la pandémie. Dans un tel contexte, quel rôle jouent des mouvements mondiaux comme ONE pour mener des actions politiques en vue de protéger l'éducation dans les budgets nationaux ?

ONE et d'autres organisations jouent ce rôle essentiel qui consiste à mobiliser des voix et mettre en lumière la crise mondiale de l'apprentissage et la façon dont un financement efficace et équitable peut aider à changer la donne. Nous amplifions les voix des citoyens et tenons les gouvernements responsables de protéger les budgets alloués à l'éducation.

En utilisant des produits et des canaux créatifs, nous mettons en lumière l'urgence de la crise mondiale de l'apprentissage. Nous soutenons également les efforts des gouvernements à défendre cette cause et amener les autres pays à répondre et à protéger également leur budget de l'éducation.

4. Comment le GPE et ONE Africa collaborent-ils pour faire face à la crise de l'apprentissage ?

En mars, l'ONG ONE a publié un rapport (en anglais) contenant des statistiques accablantes. On pouvait y lire par exemple que cette année seulement, 70 millions d’enfants (soit plus de la moitié des enfants de 10 ans dans le monde) ne parviendront pas à acquérir les compétences de base en lecture et en écriture. D'ici 2030, cela pourrait représenter plus de 750 millions d'enfants, soit près de 10 % de la population mondiale.

ONE lancera également, ce 26 avril, un outil de plaidoyer pour montrer le nombre d'enfants à risque de ne pas acquérir les compétences de base en littératie au moment où ils atteindront l'âge de 10 ans, moment où ils devraient passer de l'apprentissage de la lecture à lecture pour l’apprentissage (c’est-à-dire, le moment où ils devront être capables de lire pour acquérir des connaissances).

Pour y remédier, ONE a lancé en février une campagne mondiale sur l'éducation incluant un quiz et une pétition (en anglais) appelant les gouvernements à s'engager pour un avenir dans lequel chaque enfant de 10 ans pourra lire. Cela suppose également de protéger toutes les sources de financement de l'éducation et de s’assurer que l’argent alloué est bien dépensé.

ONE appelle les gouvernements donateurs à adhérer aux objectifs britanniques en matière d’éducation des filles et à s’engager à contribuer à hauteur d’au moins 5 milliards de dollars lors de la campagne de financement du GPE.

Selina Nkoile, ambassadrice de ONE originaire du Kenya, a également été choisie comme une des jeunes leaders du GPE avec lesquels elle abat un excellent travail pour inciter les parlementaires (en anglais) et les décideurs politiques à défendre les promesses de financements et à protéger les budgets nationaux de l'éducation. De nombreuses autres activités et produits sont également en préparation.

5. Quel.s souvenir.s gardez-vous de vos années passées à l'école ? Y a-t-il eu des moments ou des enseignant.e.s qui vous ont particulièrement marqué ?

J’ai suivi mes études secondaires dans un établissement situé dans la caserne militaire d'une petite ville de Lagos au Nigéria. La plupart des élèves étaient des enfants de soldats de l'armée nigériane. Le niveau de discipline qui était perceptible tant à travers les activités académiques que les activités non académiques est ce qui m’a le plus marqué.

Du temps était alloué à des activités spécifiques en dehors des heures de cours et on veillait à ce que chaque élève ait des qualifications dans au moins deux activités professionnelles telles que l'agriculture, la menuiserie et les arts ménagers.

Cet équilibre entre les performances académiques et les activités non académiques a façonné une grande partie de ma vision de la vie. La philosophie de l’école était « caractère et sens du service ». Donc, vous pouviez avoir de bonnes notes dans les matières scolaires, mais vos mauvaises performances dans les activités extrascolaires pouvaient vous valoir un échec en fin d’année.

Aujourd'hui, je recherche toujours un certain équilibre dans tout ce que je fais et j'apprécie vraiment cette expérience de la recherche de l'équilibre dans toutes les sphères de la vie.

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Edwin Ikhuoria levant la main pour soutenir la campagne de financement du GPE.
Edwin Ikhuoria levant la main pour soutenir la campagne de financement du GPE.

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