Engagement conjoint à accroître le financement, la coordination et améliorer l'éducation des réfugiés
Une élève de l'école Al-Bahouaira dans la région du lac Tchad. Crédit : GPE/Carine Durand

Rédigé conjointement par Yasmine Sherif, Directrice du fonds Education Cannot Wait ; Alice Albright, Directrice générale du Partenariat mondial pour l'éducation et Keiko Miwa, Directrice régionale du développement humain de la Banque mondiale.

Le premier Forum mondial sur les réfugiés, qui s’ouvre aujourd'hui à Genève, se tient à la fin d'une décennie particulière au cours de laquelle le nombre de personnes réfugiées à travers le monde est passé à plus de 26 millions.

Ayant fui leur foyer à la recherche d’une protection, la majorité de ces personnes - environ 85 % - vit dans les pays les plus pauvres du monde. Par conséquent, bon nombre d'entre elles ont du mal à accéder aux services essentiels dans leurs communautés d’accueil.

Les difficultés d'accès à l'éducation en sont un bon exemple. Plus de la moitié des réfugiés dans le monde sont des enfants et quelques 3,7 millions d’entre eux ont perdu non seulement leur maison, mais aussi leur chance d’aller à l’école.

En raison des discriminations qu’ils subissent, de l'exclusion et du manque de financement, les enfants réfugiés sont cinq fois moins susceptibles d'être scolarisés que les enfants de leurs pays d’accueil. Seuls 61 % d’entre eux ont accès à l'enseignement primaire, 22 % au secondaire et 1 % seulement à l'enseignement supérieur, les taux de non-scolarisation des filles étant plus élevé que ceux des garçons.

L'éducation : une priorité absolue pour les réfugiés

Ces circonstances contrastent fortement avec la priorité que les réfugiés eux-mêmes accordent à l'éducation. « Education against all odds », la plus grande étude analysant ce dont les enfants vivant dans des contextes d’urgence humanitaire disent avoir besoin, a révélé que les enfants touchés par les crises sont plus de deux fois plus susceptibles de citer l’accès à l’éducation comme leur premier besoin.

Les membres de leurs communautés et eux-mêmes savent que l'éducation transforme des vies, offre les possibilités d’accès à un meilleur travail, à la santé et à de disposer de moyens de subsistance. De plus, en temps de crise, l'éducation peut jouer un rôle salvateur et vital. C'est un élément essentiel à la reprise, à la résilience et au développement à long terme.

La responsabilité doit être partagée

Les pays qui accueillent des réfugiés et les intègrent dans leurs systèmes éducatifs nationaux, souvent pour de longues périodes, allouent une grande partie de leurs ressources déjà limitées pour le bien de tous et le respect des droits et de la dignité des réfugiés. Cependant, malgré l’énorme générosité des pays hôtes, l’écart entre les besoins et les ressources disponibles pour répondre à ces besoins, y compris en matière d’éducation, continue de se creuser.

Guidé par le Pacte mondial sur les réfugiés, ce premier Forum mondial sur les réfugiés est une opportunité pour relever ce défi et traduire le principe central du partage des responsabilités en actions concrètes.

En qualité d’organisations multilatérales déterminées à assurer une éducation de qualité, inclusive et équitable pour tous, nous reconnaissons le besoin urgent de disposer de ressources financières plus importantes et de meilleure qualité pour garantir aux pays accueillant des réfugiés de pouvoir tenir la promesse d'assurer les opportunités d'apprentissage de qualité énoncées dans le Pacte mondial.

Développements prometteurs

Nous travaillons déjà, tant à titre individuel qu'en commun, à relever l’immense défi que la crise mondiale des réfugiés représente pour les systèmes éducatifs des pays hôtes.

En tant que plus grand bailleur de fonds des programmes d'éducation au monde, la Banque mondiale continue de financer les opérations de soutien aux réfugiés et aux pays hôtes à travers des financements de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) et de l'Association pour le développement international (IDA, du sigle en anglais). Ces institutions soutiennent l'intégration de l'éducation des enfants réfugiés dans les systèmes éducatifs des communautés d'accueil, tout en renforçant les systèmes éducatifs nationaux des pays hôtes. Ce faisant, elles veillent à ce que les enfants et les jeunes déplacés puissent accéder à des écoles inclusives et sûres ; et acquérir les compétences et aptitudes nécessaires pour prospérer au niveau de leurs communautés et au-delà.

Education Cannot Wait a été créé pour remédier aux niveaux historiquement bas des financements humanitaires alloués à l'éducation. C’est une organisation pionnière qui propose de nouvelles approches pour combler les déficits de financement de l'éducation dans des contextes d'urgence, à travers des plans pluriannuels de résilience notamment.

Le Partenariat mondial pour l'éducation (GPE) travaille dans près de 70 pays en développement pour garantir à tous les enfants d’avoir accès à une éducation de qualité. Le GPE mobilise des financements et fournit un appui technique pour aider les pays d'accueil des réfugiés à mettre en place des systèmes éducatifs résilients et efficaces, afin que tous les enfants puissent y être scolarisés. A l’heure actuelle, le montant total des financements accordés par le GPE pour soutenir une éducation de qualité dans plus de 20 pays où les réfugiés sont intégrés dans le système éducatif national, s’élève à 1,1 milliard de dollars. Grâce à son mécanisme de financement accéléré, le Partenariat octroie également des financements rapides pour soutenir l'éducation en situation de crise. Mi-décembre 2019, le Conseil d'administration du GPE s'est fortement engagé à étendre ce mécanisme, en débloquant jusqu'à 250 millions de dollars au cours des deux prochaines années pour financer l’éducation dans les pays confrontés à des crises.

Faire plus et mieux en travaillant ensemble

Nous reconnaissons qu'il existe également des opportunités pour nos organisations, si elles travaillent ensemble, d'apporter un soutien plus efficace, efficient et mieux aligné sur les besoins. Aujourd’hui, à ce Forum mondial sur les réfugiés, nous nous engageons à mieux coordonner nos financements et nos efforts.

Nous aiderons les gouvernements et les partenaires au niveau des pays à coordonner et à harmoniser la planification, le financement et l’offre en matière d'éducation aux réfugiés et à leurs communautés d'accueil.

Nous nous engageons à publier une stratégie décrivant comment cet engagement sera opérationnalisé l'année prochaine, à revoir nos efforts chaque année et à publier un aperçu des progrès détaillant où, quand et comment nous avons travaillé ensemble. Nous nous engageons à rendre compte de ces efforts lors du deuxième Forum mondial sur les réfugiés en 2023.

Toutefois, les organisations internationales bien qu'en travaillant mieux ensemble ne pourront tenir à elles seules la promesse du Pacte mondial sur les réfugiés de garantir que les systèmes éducatifs nationaux des pays hôtes assurent l'accès à l'éducation de tous les réfugiés.

Davantage de financements sont encore nécessaires

La communauté internationale doit mobiliser des fonds supplémentaires pour répondre à la crise des réfugiés, notamment dans le secteur de l'éducation. D'ici 2021, un financement supplémentaire de 1 milliard de dollars doit être assuré pour atteindre les objectifs attendus du fonds Education Cannot Wait visant à soutenir 8,9 millions d'enfants pris dans des situations de crises.

La Banque mondiale continue de soutenir l'éducation des réfugiés. Son portefeuille actif alloué à l’éducation dans les contextes fragiles et les pays d'accueil des réfugiés s'élève à 5,65 milliards de dollars US, dont 4,54 milliards de l'IDA (l'une des plus importantes sources de financements concessionnels destinés à éliminer l'extrême pauvreté dans les pays les plus pauvres au monde). Des opérations supplémentaires de 2,6 milliards de dollars sont en cours de préparation et attendues pour l'année prochaine.

En sa qualité de plus grand fonds mondial dédié au financement de l’éducation dans les pays en développement, la prochaine campagne de financement du Partenariat mondial pour l’éducation constituera un test supplémentaire de l’engagement de la communauté des donateurs à soutenir l’éducation dans les pays les plus démunis du monde. Depuis sa dernière reconstitution en 2018, le GPE a levé 2,6 milliards de dollars de financement international et mobilisé 30 milliards de dollars de financement national pour soutenir l'éducation des enfants les plus marginalisés au monde. Cependant, le besoin de financement reste énorme. La prochaine campagne de financement du GPE, qui se tiendra mi-2021, sera cruciale pour assurer un soutien continu à une éducation inclusive et de qualité, notamment pour les enfants réfugiés et leurs communautés d'accueil.

Malgré les engagements de certains donateurs, comme l'Union européenne, qui consacre désormais 10 % de son financement humanitaire à l'éducation, la moyenne mondiale n'est toujours que de 2 %. Parent pauvre d'un système humanitaire sous-financé et surchargé, l'éducation a urgemment besoin de plus de soutien.

Il est possible de faire des progrès

Nous avons une obligation collective envers les 3,7 millions d'enfants réfugiés qui ne sont pas scolarisés. Ils ne sont pas responsables du conflit qui les a chassés de leurs pays respectifs. Et ils ont un droit légal à l’éducation - un droit qui ne s’arrête pas en cas d’urgence.

Nous sommes convaincus qu'il est possible de fournir une éducation de qualité à chaque enfant réfugié et nous nous engageons à aider les pays qui accueillent des réfugiés à obtenir le financement nécessaire à cette fin.

À l’occasion du Forum mondial sur les réfugiés, nous demandons instamment aux pays d’aider les réfugiés du monde entier et les pays qui les accueillent, de s’engager à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour honorer les engagements en matière d’éducation énoncés dans le Pacte mondial sur les réfugiés.

Cette annonce a été précédemment publiée sur le blog du Rapport mondial de suivi de l’éducation pour tous (en anglais) de l’UNESCO

Une élève de l'école Al-Bahouaira dans la région du lac Tchad. Crédit : GPE/Carine Durand

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