Équitable, inclusive, transformatrice, tels sont les idéaux pour l'éducation mondiale aujourd'hui. Mais qu'en est-il de la résilience climatique ?

Des phénomènes météorologiques extrêmes fréquents et intenses mettent déjà en péril la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes dans le monde, en particulier pour les plus défavorisés et les plus vulnérables, notamment les filles marginalisées, et la situation risque encore de s'aggraver.

Prenons l’exemple de Madagascar, le 21^e pays le plus vulnérable au changement climatique, qui connaît en général trois à quatre cyclones par an. Cette année, six tempêtes et cyclones tropicaux ont frappé l'île, touchant quelque 571 000 personnes entre les mois de janvier et avril. Ainsi, en janvier et février 2022, l'enseignement a été interrompu pour plus de 133 000 élèves puisque les tempêtes tropicales ont détruit plus de 2 500 salles de classe.

De même, une saison de mousson sans précédent au Pakistan a submergé plus d'un tiers du pays, endommageant ou détruisant près de 19 000 écoles et touchant environ 3,4 millions d'enfants.

L'éducation est de plus en plus vulnérable au changement climatique. Ce dernier peut avoir des répercussions directes sur l'éducation, en mettant en danger la vie et le bien-être des enfants et des enseignants, ainsi qu’en détruisant les infrastructures scolaires et le matériel d'apprentissage.

Le changement climatique a également des répercussions indirectes sur l'éducation en aggravant l'insécurité alimentaire, la destruction des sols, les migrations forcées et les conflits. Cependant, l'éducation a un rôle important à jouer pour aider les communautés d'apprentissage et les systèmes éducatifs à atténuer les effets du changement climatique et à s'y adapter.

C'est la raison pour laquelle l'IIPE-UNESCO travaille en étroite collaboration avec les ministères de l'Éducation pour renforcer leurs capacités de planification de l'éducation adaptée aux crises, qui vise à protéger la qualité des apprentissages même dans les circonstances les plus difficiles.

Grâce à son approche participative et intersectorielle, la planification de l’éducation adaptée aux crises s'efforce de surmonter les inégalités et l'exclusion dans l'éducation tout en encourageant une culture de sensibilisation aux risques à tous les niveaux du système éducatif.

La planification de l’éducation adaptée aux crises influence les systèmes éducatifs à être proactifs plutôt que réactifs face aux risques. Pour le changement climatique, il s’agit de mesures d'adaptation, telles que la construction d'écoles résistantes au changement climatique et l'élaboration de plans d'urgence, ainsi que des mesures d'atténuation, telles que l'intégration du changement climatique dans les programmes scolaires et la garantie que les enseignants reçoivent une formation appropriée.

En ce sens, l'éducation n'est pas seulement une victime du changement climatique. Elle fait partie de la solution et peut accélérer la lutte contre le changement climatique. En revanche, les acteurs du secteur de l'éducation doivent bien comprendre les risques et savoir où et quand intégrer les diverses mesures d'adaptation et d'atténuation dans le cycle de planification de l’éducation.

Le travail de l'IIPE en Jordanie, ainsi qu'en Guyane, au Libéria et à Madagascar, pour ne citer que quelques exemples, donne quelques indications sur les différentes façons de gérer les risques climatiques.

Rendre toutes les étapes du cycle de planification résistantes au changement climatique

Quel que soit le stade où se trouve un pays dans le cycle de planification, des mesures pertinentes et efficaces peuvent être mises en place. Cela s’applique particulièrement lorsque la planification représente les intérêts de plusieurs acteurs, comme par exemple, les autorités nationales et infranationales, les communautés scolaires et les jeunes, notamment les plus vulnérables, comme les filles ou les jeunes femmes.

En Jordanie, une évaluation des risques liés au changement climatique est en cours d’élaboration dans le cadre du soutien de l'IIPE au ministère de l'Éducation en vue de développer une stratégie de gestion des crises et des risques pour le secteur de l'éducation.

L'évaluation permet au ministère de mieux comprendre les effets du changement climatique (dus aux températures extrêmes, aux glissements de terrain, aux crues soudaines, aux sécheresses et à autres phénomènes) sur le système éducatif.

Dans certains cas, l’analyse des risques climatiques repose sur la triangulation des données sur l'éducation avec des données météorologiques géocodées pour créer des cartes qui révèlent quelles écoles se trouvent dans des zones à risque.

Ces analyses permettent ensuite d'élaborer des plans, des programmes ou des stratégies en matière d'adaptation au changement climatique et d'atténuation de ses effets, afin de renforcer la résilience face au changement climatique à différents niveaux, du niveau central et intermédiaire au niveau des écoles et des communautés.

Au Liberia, le ministère de l'Éducation a intégré des mesures d'adaptation au changement climatique et d’atténuation de ses effets dans son prochain plan sectoriel de l'éducation (PSE), qui se poursuivra jusqu'en 2027.

Le travail en cours en Jordanie sur la planification adaptée aux crises vise à intégrer le changement climatique afin de s'assurer que tous les acteurs du secteur de l'éducation, y compris les communautés, les élèves, les enseignants et les responsables de niveau intermédiaire, puissent anticiper, se préparer et s'adapter aux effets du changement climatique.

Au niveau central, il s'agit de créer un cadre stratégique favorable et de promouvoir l'éducation au développement durable (EDD) en intégrant le changement climatique dans les programmes scolaires et la formation des enseignants.

Au niveau intermédiaire et au niveau des écoles, il s’agit de mettre en place des plans d'urgence au niveau des écoles, en mettant l’accent sur les menaces du changement climatique localisées, et de construire des infrastructures scolaires résistantes au changement climatique.

Mais un plan est efficace que s’il est bien mis en œuvre

Pour garantir une mise en œuvre efficace des mesures de lutte contre le changement climatique, les ministères de l'Éducation et leurs partenaires doivent impliquer les autorités infranationales, les communautés locales et les jeunes, notamment ceux qui sont le plus touchés par le changement climatique. Ces mesures doivent ensuite être soutenues par des plans de suivi et accompagnées de modèles de calcul des coûts et de financement fondés sur des données probantes.

Pour ce faire, il convient de renforcer les systèmes d'information pour la gestion de l'éducation (SIGE) afin de recueillir et d'analyser les données sur le changement climatique, ce qui nécessite de consulter les parties prenantes de plusieurs secteurs, notamment les ministères de l'Environnement et les autorités nationales de gestion des catastrophes.

Une mise en œuvre efficace dépend également des ressources financières mises à disposition. Comme celles-ci sont souvent limitées, il est primordial de les exploiter au maximum en investissant dans des projets susceptibles de générer le plus grand impact. L'IIPE aide désormais les ministères de l'Éducation à mobiliser des ressources en vue de renforcer le leadership du ministère pendant les crises ainsi que la collaboration intersectorielle.

Une urgence mondiale aux enjeux locaux

La crise générale de l’éducation a amené l'éducation à un point de basculement, où 70 % des enfants de 10 ans issus des pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire ne savent ni lire ni comprendre un texte simple. Le fardeau disproportionné que le changement climatique fera peser sur ces enfants ne fera qu’aggraver la situation.

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