Une question centrale s’impose en ce qui concerne la génération d’apprenants d’aujourd’hui : quand et comment aborder les sujets du changement climatique et de l’environnement en privilégiant l’agentivité (la capacite d’agir), plutôt que l’anxiété et un sentiment d’impuissance ?
L’agentivité, une réponse à l’anxiété des élèves ?
Les niveaux élevés d’anxiété constatés chez les élèves concernant l’aggravation des conditions climatiques et environnementales dans les pays à revenu faible ou intermédiaire sont préoccupants.
Bien que l’essentiel des études portant sur l’enseignement des questions environnementales vienne d'Europe et d’Amérique du Nord, les études en notre possession suggèrent d’adopter des approches qui encouragent l'action menée par les jeunes et au niveau local pour limiter l’anxiété et le sentiment d’impuissance.
Malheureusement, de telles approches ne sont pas courantes dans l’enseignement formel. En effet, un chercheur affirme qu’un changement de paradigme dans l’éducation est nécessaire pour relever les défis liés au développement durable, un changement dans lequel l’éducation « cultive une vision du monde à la fois critique et relationnelle, qui valorise les droits de l’homme et les écosystèmes (et notre intégration dans ceux-ci), tout en se sentant obligé et capable d’agir, en particulier de manière collective ».
Les facettes du problème ?
Donc, comment dispenser une éducation qui mette en avant le développement durable ?
Premièrement, voici quelques réflexions sur le cadre dominant de l’éducation à la lutte contre le changement climatique. La recherche sur le changement climatique porte souvent sur la science du climat et les émissions mondiales de CO2. Est-ce que cela empêche d’avoir une perspective plus globale des écosystèmes et des droits humains qui englobe également les questions d’environnement au niveau local et national ? Allant de la biodiversité à la qualité de l’air et de l’eau ?
Deuxièmement, si des approches pragmatiques sont la voie à suivre, quelles sont les conditions préalables à leur mise en œuvre ? Les conclusions d’une étude exhaustive menée sur le programme scolaire adopté en Afrique de l’Est montrent qu’on ne saurait présumer de l’alignement éducatif, des ressources et de l’expertise pédagogique.
L’étude a révélé que le programme scolaire formel définissait un continuum de l’apprentissage allant du rappel des faits aux compétences de résolution de problèmes d’ordre supérieur, mais l’évaluation et les examens se concentraient sur le rappel des faits – ce qui à son tour influait sur la pratique en classe, aboutissant au phénomène qui s’appelle « apprendre pour l’examen ».
Quel changement pour quel groupe d’âge ?
Un autre défi consiste à mieux comprendre et tirer profit des différentes contributions que l’enseignement primaire, secondaire et tertiaire peut offrir. En éducation, il y a une tendance à « homogénéiser » notre réponse en utilisant des termes comme « éducation au changement climatique » et à négliger, ce faisant, les contributions spécifiques et les avantages connexes plus généraux apportés par les différents niveaux et types d’éducation.
Au niveau du primaire
Si 70 % des enfants âgés de dix ans ne peuvent pas comprendre « le sens » d’un texte alors, comme le souligne le dernier rapport de la Banque mondiale, l’axe de l’éducation sur le développement durable ne doit pas négliger les compétences fondamentales.
D’ailleurs, compte tenu du niveau de recherche sur l’anxiété climatique et la psychologie de l’enfant, des questions légitimes se posent concernant le bon moment (et la bonne manière) pour aborder ces sujets dans le programme scolaire au primaire.
Il se pourrait que le plus tôt possible ne consiste pas en la meilleure approche. Certes, il est possible d’aborder des notions de mathématiques au primaire en intégrant des calculs sur l’élévation du niveau de la mer, mais cela risque également d’accroître l’anxiété des enfants et d’inhiber leur agentivité.
Au niveau du secondaire
L’enseignement secondaire a été reconnue comme essentielle dans la promotion de l’éducation au développement durable que ce soit pour promouvoir un changement de comportement, servir de base à la transformation des compétences écologiques, ou encourager l’éducation des filles en faveur de leur liberté en matière de reproduction, et récolter les fruits de la transition démographique nationale.
Le dernier rapport sur le changement climatique de la Banque mondiale cite des études qui démontrent qu’« une année d’éducation permet d’accroître de 9 % la sensibilisation au changement climatique ». C’est un calcul tiré de la moyenne des données PISA recueillies auprès d’élèves de 15 ans et plus, autrement dit, des élèves qui ont réussi à accéder à l’éducation secondaire.
Il est évident que l'impact de l'éducation est cumulatif : sans des bases solides acquises au niveau primaire, l'éducation secondaire ne peut être assurée. Cependant, il est crucial de s'interroger sur la mesure de la sensibilisation au changement climatique, de l’agentivité et, finalement, de l’impact généré aux niveaux primaire et secondaire.
Il faut savoir que moins de 60 % des élèves dans le monde achèvent le premier cycle de l’enseignement secondaire. En Afrique subsaharienne, la moyenne est d’environ 45 %. Dans quelle mesure l’élargissement de l’accès à l’enseignement secondaire est-il important pour relever le défi du développement durable ?