Ceci est le cinquième post d’une série de collaborations entre le Partenariat mondial pour l’éducation (GPE) et l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA)
L’Afrique compte environ 1 650 institutions d’enseignement supérieur, dont un grand nombre sont en difficulté et nécessitent l’intervention de différentes parties prenantes, des gouvernements nationaux et des partenaires de développement pour permettre aux étudiants de développer au maximum leurs acquis et apporter une contribution efficace sur le marché du travail.
À l’exception peut-être de l’Afrique du Sud et des pays d’Afrique du Nord, le ralentissement économique de l’Afrique de la fin des années 1970, puis les programmes d’ajustement structurels (PAS) et la fuite des cerveaux qui s’est ensuivie ont durement affecté la performance des institutions d’enseignement supérieur africaines et entamé leurs capacités à fournir un enseignement supérieur de qualité.
De nombreuses institutions ont alors connu un déclin en termes de qualité d’enseignement, de recherche et de résultats de recherche. Celles-ci ont ainsi perdu en efficacité quant à leur capacité à contribuer au développement socioéconomique de leur pays.
Les défis auxquels est confronté l’enseignement supérieur en Afrique
En Afrique, l’enseignement supérieur est sous-développé et constitue une priorité de second plan depuis près de deux décennies. L’accès à l’enseignement supérieur pour le groupe d'âge concerné demeure à 5 %, moyenne régionale la plus faible au monde, avec seulement un cinquième de la moyenne mondiale affichée de 25 %.
Les femmes sont sous-représentées dans l’enseignement supérieur, en particulier dans les domaines scientifiques et technologiques. En termes de qualité, aucune université d’Afrique occidentale ou centrale ne figure dans les classements des 500 meilleures institutions d’études supérieures du monde.
En outre, de nombreux retards s'accumulent depuis quelques décennies dans le domaine des réformes. Ce sous-développement des institutions d’enseignement supérieur se traduit principalement par de forts taux de migration hors du continent africain de talents en demande de formations et d'opportunités de recherche à l’étranger.
Le paradoxe des diplômés sans emploi et du manque de main d’œuvre qualifiée
La plupart des pays africains sont actuellement confrontés à une pénurie de ressources humaines et de capacités dans les domaines des sciences, technologies, ingénierie et mathématiques, ainsi que dans les secteurs de l’agriculture et de la santé (Institut international d’ingénierie de l’Eau et de l’Environnement, 2013 ; Montenegro et Patrinos 2012 ; Banque mondiale 2007).
Le modèle actuel de production des compétences en Afrique ne correspond pas aux besoins du marché du travail et du développement. La tendance récente de l’enseignement supérieur africain affiche un faible pourcentage de diplômés dans les domaines de l'ingénierie, l'agriculture, la santé et les sciences.
Tandis que les diplômés de nombreuses institutions d’enseignement supérieur d’Afrique restent sans emploi, il n’en reste pas moins une importante pénurie de main d’œuvre qualifiée. La difficulté réside dans l’augmentation à la fois de la quantité et de la qualité des diplômés grâce à des investissements dans des laboratoires et des ressources humaines dédiées à ces disciplines tout en améliorant le lien avec les employeurs afin de favoriser une plus grande pertinence des formations et une solide collaboration internationale.
Le manque d’investissement signifie que les institutions d'enseignement supérieur d'Afrique sont actuellement dans l’incapacité de répondre aux besoins immédiats en matière de compétences et de contribuer à une croissance productive à moyen terme.
Les causes du manque d’adéquation entre l’offre et la demande
Ce manque d'adéquation avec les besoins et demandes de l’économie en matière de compétences est dû à l’absence d’une masse critique de professeurs de qualité, à l’insuffisance de financements durables et aux défauts en matière de gouvernance et de leadership (Alabi et Mba, 2012).
Plus largement, les systèmes d’enseignement supérieur d’Afrique occidentale et centrale et des autres régions d’Afrique manquent de spécialisation régionale adéquate.
L’enseignement supérieur en Afrique rencontre de grandes difficultés pour parvenir à une masse critique de professeurs de qualité. Le pourcentage moyen de personnel doté d'un doctorat dans les institutions publiques d'enseignement supérieur en Afrique est ainsi estimé à moins de 20 % (Soucat et al., 2013 ; Chronicle of Higher Education, 2013).
De nombreux départements n'ont pas plus d'un ou deux professeurs d’université confirmés, bon nombre étant proches de l'âge de la retraite. Cela constitue une entrave pour les départements et les universités en les empêchant de fournir des formations supérieures pertinentes (en partie pour développer eux-mêmes le corps de professeurs de l’enseignement supérieur) et d’instaurer un environnement propice à la recherche.
Par ailleurs, les faibles salaires des professeurs, le manque de financement et d’équipement consacrés à la recherche, ainsi qu’une autonomie limitée sont autant d'obstacles à la rétention des professeurs dans les universités africaines. Les perturbations de l’enseignement dues aux mouvements de grève du personnel et / ou des étudiants, causés par plusieurs facteurs, notamment la faiblesse du leadership administratif et le manque de ressources, constituent d’autres obstacles pour l’enseignement supérieur en Afrique (Rapport ACE, 2016).
Comment revitaliser l’enseignement supérieur en Afrique
Avec un début de redressement des économies africaines, la reconnaissance récente par le Groupe Banque mondiale et d’autres agences de développement du rôle important que peut jouer l’enseignement supérieur dans le processus de développement socioéconomique de l’Afrique, ainsi que la résurgence d’un intérêt pour l’enseignement supérieur, il devient impératif d'accélérer le redressement et la revitalisation des institutions d'enseignement supérieur dans l'ensemble du continent.
L’Association des Universités africaines (AUA) et ses partenaires, tout en jouant le rôle de catalyseur dans le processus de revitalisation, a conçu une série d'interventions destinées à améliorer la situation difficile dans laquelle se trouvent les institutions d'enseignement supérieur.
Ces interventions se concentrent principalement dans les domaines clés suivants :
- leadership et gestion institutionnelle ;
- mobilité universitaire, notamment la diaspora africaine ;
- développement des TIC pour l’enseignement, l’apprentissage et la recherche ;
- mise à disposition des thèses et des travaux universitaires africains pour un public élargi en Afrique et au-delà ;
- bourses d’études supérieures et petites subventions de soutien au doctorat ;
- relations entre les universités et les secteurs productifs de l’économie, avec un soutien des institutions d’enseignement supérieur africains pour aider le pays de tutelle à réaliser les objectifs de développement durable grâce à la recherche de politiques.
Des initiatives telles que les Centres d’Excellence d’Afrique (Africa Centers of Excellence), le Partenariat pour les Compétences en Sciences Appliquées, Ingénierie et Technologie (Partnership for Skills in Applied Sciences, Engineering & Technology), l’Université panafricaine, l’harmonisation de l’assurance qualité et de l’habilitation dans l’enseignement supérieur africain (Harmonization of African Higher Education Quality Assurance and Accreditation) font partie des différents efforts entrepris pour améliorer l’enseignement supérieur africain, qui doivent être soutenus, notamment mais pas seulement, par des moyens financiers.
La promotion de la collaboration entre l’industrie et les institutions universitaires
Un renforcement de la collaboration et des partenariats entre l’industrie et les institutions universitaires d’enseignement supérieur en Afrique sont nécessaires pour relever les multiples défis auxquels est confronté l’enseignement supérieur.
Les investissements dans ce secteur doivent veiller à ce que le cadre de gouvernance favorise l’excellence, une autonomie financière raisonnable et une amélioration de la responsabilisation de l’institution et de l’organe directeur.
Les institutions doivent promouvoir la décentralisation intérieure de l’administration des ressources et le recours à des systèmes de gestion et d’information, à la transparence administrative, à l’utilisation des ressources et à la communication des résultats.